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Salut à toi, visiteur ! Sois le bienvenu sur ma page.

Ce n'est qu'une page en effet, bien loin du site perso aux dizaines de menus et sous-menus que j'avais créé et alimenté il y a... longtemps. Si tu me connais un peu, tu sais que je suis un grand paresseux, et c'est pour cela que mon espace personnel sur la Toile se résume désormais à une seule page.

Mais, toujours si tu me connais, tu sais bien que je suis une pipelette et que j'ai toujours des tas de choses à dire sur les sujets qui me passionnent. C'est-à-dire à peu près tout. ^^

Les étapes du résumé schématique de ma vie culturo-professionnelle ci-dessous sont donc cliquables, si tu as envie de lire mon bavardage.

Bonne visite dans mon univers, le cosmos qui s'agite dans ma tête... :-)

Ton navigateur ne semble pas supporter le WebGL, dommage... Voici une version très simplifiée de mon site, avec juste le contenu textuel.

Jeux

Huhu, toi aussi tu aimes jouer, explorer, tenter des choses imprévues ? ^^ Eh bien bravo. Oui, les "rails" sont cliquables eux aussi, pour me permettre de bavarder de façon plus générale sur un sujet.

Cela dit, je n'ai pas grand chose à dire sur les jeux vidéo : avec l'âge, on a de moins en moins le temps de jouer, ou en tout cas de se consacrer à des nouveautés. Je rejoue régulièrement à Dune, MadTV ou X-COM ; j'ai même (re)découvert le plaisir de jouer à Dune II sans bugs et avec quelques améliorations bienvenues (sélection multiple...) grâce à un portage open source. Idem avec OpenTTD, l'héritier de Transport Tycoon (que j'ai oublié de citer dans mes bubulles, tiens).

Et puis ce n'est pas qu'une question de temps : j'ai de plus en plus de mal à passer des heures sur un jeu chronophage qui ne débouche sur rien. J'ai besoin d'un minimum d'utilité, comme les relations sociales nées d'eRepublik. Ces temps-ci, quand j'ai envie de m'amuser, je suis un cours de géopolitique ou d'urbanisme, ça m'éclate encore plus qu'un Risk ou un SimCity.

Je vieillis.

Zelda (1991)

Ma première console. Cadeau de mon parrain. Mes premiers jeux vidéo, assis dans le salon, devant un écran cathodique. Mario. Duck Hunt. Duck Tales. Je n'ai jamais été doué pour les jeux de plateforme ; un jour, Papa rentre à la maison avec une autre cartouche, prêtée par un de ses élèves (si ça tombe il l'avait confisquée, tiens...). Je tombe amoureux de la couverture, déjà : un fond doré comme les hors-série de Picsou Magazine, un bouclier, une épée sur le bouclier, et un Z rouge immense. Z n'a jamais voulu dire Zorro pour moi.

Fermons la fenêtre nostalgie : je parle bien sûr de Zelda, Zelda 1 si vous voulez, le premier jeu de rôle/aventure de cette ampleur. Combien de centaines d'heures passées dessus ? Pas de solution en ligne à cette époque, pas de difficulté si finement dosée qu'elle devient facilité : Zelda était difficile, surtout à 6-7 ans, et surtout quand on est une tête de mule et qu'on veut le finir sans perdre de vie. Car dans Zelda, pour sauvegarder sa partie, il faut mourir : un crève-coeur.

Depuis, j'ai grandi, mais Zelda est resté là. J'ai aimé Zelda 3 et GB, mais j'ai surtout profité de l'apparition des émulateurs pour y rejouer, encore et encore, brûler chaque arbre un à un avec ma bougie rouge, attendre sur le pas de porte que les Darknuts me tournent le dos, pousser la pierre centrale dans le nez du serpent, et latter ce vieux grigou de Ganon en piaillant de joie comme un gosse. Que je suis toujours.

Dune II (1992)

Dune II marque une étape importante dans mon parcours vidéoludique, et ce pour trois raisons : 1) c'est le "père des RTS" (jeux de stratégie en temps réel), ancêtre des Command & Conquer, Warcraft, Starcraft, etc ; 2) il a pour contexte l'univers de Frank Herbert, dont j'ai chanté les louanges sur la page consacrée à la saga littéraire éponyme, et même s'il n'y est pas d'une fidélité exemplaire (j'aurais préféré voir les Tleilaxus au lieu des Ordos inventés de toutes pièces), il en respecte l'esprit, et c'est le plus important : l'atmosphère désertique et brûlante d'Arrakis est très bien rendue, les mentats sont superbes, chaque maison a un style de jeu qui lui est propre... 3) il est difficile, surtout si l'on ne choisit pas la maison Harkonnen : la dernière mission, avec les Atréides ou les Ordos, face au déluge "d'engins téléguidés" Harkonnen et Sardaukars est particulièrement épique.

Le jeu n'est pas sans imperfections, en particulier à cause de l'IA : très correcte pour l'époque, elle est néanmoins facile à berner, et dépend beaucoup d'un comportement scripté que l'on finit par connaître par cœur en répétant plusieurs fois une même mission. Dommage aussi qu'aucun mode multijoueur ne soit possible, et que les développeurs de Westwood n'aient pas encore inventé la sélection multiple : la micro-gestion des unités est assez compliquée, et il faut souvent se reposer sur la portée de tirs des "lanceurs" pour gagner une bataille.

Ces défauts de jeunesse n'enlèvent rien au charme de Dune II, et 20 ans après sa sortie, il m'arrive encore de rêver qu'une forme étrange trouble la surface des dunes, s'approche de ma moissonneuse, et soudain surgit hors du sable, gueule immense aux krys scintillants, se propulsant à des dizaines de mètres de hauteur par la seule puissance de son gigantesque corps annelé, engloutissant machine et hommes et sable et si précieux Épice, avant de retomber dans un tourbillon de poussière ocre et de s'en retourner dans les entrailles du monde...

Dune (1993)

Comment un jeu vidéo tenant sur une disquette (1,44Mo) peut-il être supérieur à un film réalisé par un maître du cinéma ? Comment est-ce possible de captiver, d'envoûter avec des bitmaps pixellisés en 256 couleurs ? Comment raconter une histoire si riche, issue du plus grand livre de SF jamais écrit, mieux qu'en deux heures et quelques de débauche d'effets spéciaux ? Comment, en quelques notes sur un synthétiseur MIDI, transporter le spectateur/joueur à l'autre bout de la galaxie et le faire sentir, instantanément, chez lui ?

Dune est un modèle. Une œuvre multimédia que l'on devrait montrer et même rabâcher dans les écoles de game design. Le jeu vidéo n'est pas Candy Crush, pas plus que le septième art ne se résume à Superman. Tu peux triturer tes formules mathématiques tant que tu veux, lisser ta courbe de difficulté, gaver le joueur de rewards et d'achievements, tu ne feras jamais que de la soupe. Peut-être cela te rendra-t-il riche, mais tu ne seras jamais un artiste.

Le potentiel de créativité est tel, dans notre si beau pays, que j'enrage de voir des talents gâchés à recycler des recettes éprouvées, comme autant de remakes d'un film popcorn. Il y a tellement mieux à faire, et pas nécessairement au détriment de la rentabilité ! Regarde un instant la renommée du jeu Dune, en faisant abstraction du livre, du film, etc : c'est un des "abandonwares" les plus téléchargés au monde, sa bande son mythique a fait le succès de Stéphane Picq, des captures d'écran du soleil couchant sur le désert d'Arrakis sont fréquemment choisies comme illustration des jeux DOS du début des années 90...

Pardon de squatter la place dévolue à ce jeu fabuleux pour pousser mon coup de gueule, mais c'est à mon sens la meilleure façon de lui rendre hommage, d'honorer son héritage. En mémoire de Cryo et de tous les studios français disparus depuis vingt ans, et en témoignage de mon admiration pour ces artistes-programmeurs qui maîtrisaient l'alchimie et transformaient les kilo-octets en pépites, je t'invite à jouer, à rejouer à Dune, et à méditer sur l'insoupçonnable puissance du jeu vidéo, et sur la futilité de la performance brute et des artifices visuels.

MadTV (1994)

J'aurais pu citer des tas de jeux de gestion : c'est un de mes genres favoris, à la fois parce qu'il répond à ma légère obsession du rangement ou, devrais-je dire, de l'ordre naturel et du travail bien fait (si tu es comme moi, je sais que tu comprendras ce que je veux dire), mais aussi parce qu'il ne nécessite pas d'agilité particulière, de réflexes, comme un Donkey Kong, un Tomb Raider ou un bon vieux shoot'em up. J'ai deux mains gauches.

SimCity, Civilization, Settlers, Transport Tycoon et tant d'autres ont bercé mon adolescence, mais c'est MadTV qui reste le plus cher à mon cœur. Ce n'est pas le plus beau, pas le mieux réussi techniquement (j'y reviendrai), mais je ne peux m'empêcher de sourire à l'évocation de ce jeu - et j'évite d'en parler trop, vu que ça déclenche immanquablement une irrépressible envie d'y rejouer et de le finir pour la 247è fois.

J'irai très vite à t'en présenter les bases : tu gères une chaîne de télé, programmes des émissions, achètes des droits de diffusion, choisis les news les plus fraîches, et finances tout ça avec la publicité. Le gameplay est simple, et si les concurrents (gérés par l'ordinateur) paraissent bien plus riches et efficaces au début, tu t'efforces de survivre, de te faire une place, jusqu'à être assez fortuné pour offrir une Rolls à Betty, la journaliste/secrétaire/poule de luxe du dernier étage, afin de l'épouser et de partir loin, loin de ce métier débile.

Car c'est là tout le charme de MadTV : ce jeu est une parodie, et la traduction extrêmement approximative de l'allemand n'arrange rien. Ta journée-type pourrait ressembler à ceci... 17h : arrivée dans le bureau du chef. Qui t'engueule, comme d'hab, dans un germano-français cocasse qui anéantit magistralement son autorité. 17h30 : tu vas acheter un film pour le début de soirée, "Les Oiseux" (sic), puis l'amènes à ton bibliothécaire tellement défoncé à l'acide qu'il devient tout vert après quelques minutes en ta présence. Ou alors c'est toi qui es shooté, va savoir. 17h58 : tu te souviens soudain que tu as oublié de t'occuper des news, cours jusqu'à l'ascenseur, tambourines sur la porte, hélas ton concurrent bleu (nommé Churchill) est en train de s'amuser avec ; l'heure file, trop tard, 18h sonnent, ton journal télévisé affiche un splendide 0,00% d'audience. Tu jures de te venger. 18h20 : le programme culturel de 18h, "Entropie démoscopique en post-moderne", fait un bide, comme prévu ; tu montes voir le publicitaire, signes un contrat avec BikeShop ("BikeShop est top !"), une des rares compagnies à tolérer des audiences abyssales. Forcément, ils ne paient quasiment rien. 18h40 : tu t'occupes des news, enfin. Au menu du jour : Bush et Saddam jouent au cheval à bascule (nous sommes en 1991), Kevin Costner raconte son enlèvement par les extra-terrestes, et le meurtrier-laptop est aperçu en train d'essayer de remettre à l'eau la baleine échouée à Londres (sic, sic et resic). 20h15 : le talk-show avec Garrison Lord fait un tabac ; tu retournes voir ton ami publicitaire et signes avec Nobill, tes 24% d'audience te le permettent. Dans l'ascenseur, tu chantonnes le slogan de la marque : "moins cher, encore moins cher, Nobill". 21h10 : "les Oiseux" n'intéressent pas grand-monde, à part mémé et pépé, et encore : mémé tricote, et pépé s'endort à moitié (oui, oui, tu vois tout ça à l'écran). Tu descends au rez-de-chaussée pour boire un verre avec le poivrot qui fait office de gardien ; il te signale qu'un attentat est prévu à 23h dans les bureaux de la République Populaire de Duban, alias "Duban Peuples", l'émirat qui truste le 7è étage. À ne surtout pas confondre avec la République Démocratique de Duban, alias "Duban Libre" au 5è, mais je vais t'épargner le pourquoi du comment politico-bordélique de tout cela, hmm ? 21h40 : tu mets une enchère à 180k$ pour tenter d'acheter Roger Rabbit chez le vendeur de films. 21h42 : ce mécréant d'Archie (ton concurrent rouge) est aussitôt monté à 190k. La soirée va être longue. 21h50 : tu te rends au supermarché (sic) pour engager les acteurs du 7è épisode de "La Croisière s'amuse", la série que tu produis à grands coups de millions et sur laquelle tu fondes tous tes espoirs. Tu décides qu'Alf l'extraterrestre ferait un super majordome, et mises sur Depardieu pour le rôle du matelot alcoolique. Avant de partir, tu achètes un paquet de mouchoirs pour Betty (c'est le seul cadeau que tu peux encore lui offrir, tu n'as plus un rond). 22h05 : Betty t'envoie bouler parce que tu n'as pas frappé avant d'entrer dans son bureau ; visiblement elle n'a même pas retenu ton prénom. Tu as envie de pleurer et d'étrangler sans plus attendre cette garce vénale. 22h30 : tu programmes une rediff' de Superman pour meubler la fin de soirée, puis pars en expédition pour monopoliser l'ascenseur jusque 22h59. Tu prends soin d'inverser les panneaux "Duban Peuples" et "Bureau de Churchill" à l'entrée de celui-ci. 23h00 pile poil : tu rends l'ascenseur et savoures ta vengeance en regardant le petit gros moustachu enturbané monter dedans, aller à l'étage de Churchill, entrer dans son bureau, en ressortir en courant, avant qu'un "BOOM" ne se surimprime sur la porte dudit bureau. Gniiiiihihi. Hi. Hi. 23h40 : Roger Rabbit est monté à 350k, tu n'en reviens pas. Tu jettes ton dévolu sur "Neuf semaines et demie", mais il te manque quelques milliers de dollars ; tu cours en demander à ton chef : "encore de l'argent ? Maintenant ça suffit ! Hors de ma vue, cochon !". Direction la bibliothèque, où tu reprends des mains du bibliothécaire vert "Tucker", "Dr Jivago" et "Citizen Kane", les vieilleries dispensables, pour les revendre. 23h54, tu mets toute ta fortune sur "Neuf semaines". 23h55, tu arrives à l'ascenseur. Archie est dedans : s'il va à la filmothèque, c'est sûr, il va surenchérir pour te pourrir la vie. Tu croises les orteils. Ouf, il descend à la Ligue Anti-Tabac (sic). 23h58, tu entres dans l'ascenseur, direction le rez-de-chaussée, où tu arrives à minuit pile, ce qui ravit le grand maniaque qui sommeille en toi. La journée est finie.

Tu trouves ça loufoque ? Normal, c'est MadTV. Et... Hum, tu m'excuseras, je dois te laisser, j'ai une envie pressante d'y rejouer. :D

X-COM (1995)

Si tu as déjà lu d'autres "bulles" de cette frise égo-centrée, tu as sans doute compris que j'aime ce qui est compliqué. J'y suis attiré, pour le meilleur comme pour le pire.

X-COM, le premier ("UFO : Enemy Unknown"), l'original, est un jeu d'une difficulté cauchemardesque. Pas parce qu'il est mal conçu, non non, le gameplay est bien pensé, étonnamment rôdé pour un titre aussi novateur ; il est difficile parce qu'il se veut réaliste du caractère hasardeux voire ubuesque de la résistance de quelques dizaines de soldats et ingénieurs humains face à une invasion alien en bonne et due forme. En clair : si tu dois recharger une sauvegarde 99 fois sur 100 pour réussir une mission, c'est juste parce qu'en vrai, tu aurais 99% de chances de te faire laminer.

Les aliens sont plus résistants que tes soldats, plus nombreux, mieux équipés, ils visent mieux, disposent pour certains de pouvoirs psychiques - pardon : psioniques - capables de ruiner ta stratégie en un coup de dés ; dans la plupart des cas, ils sont placés dès le début de la mission à divers endroits stratégiques, alors que tu dois péniblement faire sortir tes troufions un par un par l'unique porte de ton vaisseau (c'est parfois absolument im-pos-sible). Certes, l'aspect "gestion" (construction de bases et de vaisseaux, R&D...) te permet peu à peu de combler le gouffre technologique, mais les aliens mettent ce temps à profit pour infiltrer les gouvernements et réduire du même coup tes fonds...

Je peux te l'avouer ici : je n'ai jamais réussi à finir X-COM en difficulté "normale" sans tricher. Pas beaucoup, certes : un peu d'argent au départ, et surtout un stock d'Elerium, le carburant indispensable aux "gros" vaisseaux. Mais quand même. C'est terriblement frustrant, et régulièrement je retente ma chance.

X-COM 2 est tout aussi formidable, plus difficile encore, faute d'arme automatique sans munitions (les fusils lasers sont une vraie bénédiction dans le premier opus), et à cause de ces maudits Tasoths (qui combinent la puissance psionique et l'intelligence tactique des Ethereals avec l'endurance des Mutons). De longues heures de fun. Les épisodes suivants se sont égarés ; il y a quelques années, une trilogie très correcte (mais beaucoup trop facile) a fait surface, mais c'est surtout le remake de "Enemy Unknown", sorti en 2012, qui s'est montré à la hauteur de son glorieux ancêtre. Moins difficile toujours (il faut le mettre en difficulté maximale pour retrouver les sensations du mode "normal" de l'original), mais très bien réalisé, avec le bon dosage de tactique, de stratégie et de gestion. Si tu ne connais pas cette saga vidéoludique, commence par cette dernière mouture !

Duke Nukem 3D (1997)

Duke Nukem 3D n'a jamais été le meilleur FPS sur PC. Techniquement, il est loin derrière Quake, sorti peu après lui, et il comporte pas mal d'imperfections. C'est néanmoins un jeu culte, grâce à son ambiance très... testostéronée (?) ; mais ce n'est pas pour cette raison qu'il a marqué une certaine période de ma vie.

Non, comme dirait Mulder, la vérité est ailleurs. Duke Nukem, c'est LE jeu des LAN parties. Tu sais, ces réunions plus ou moins organisées où quelques dizaines de geeks débarquent avec leur ordi chéri, les relient entre eux, jouent à des jeux déconseillés aux épileptiques en bouffant des pizzas dans une joyeuse cacophonie. C'est au lycée que j'ai surtout profité de ces LAN parties, et à moindre mesure à la Fac. On jouait à Starcraft, à Half-Life (mais mon pc de l'époque n'a jamais voulu lancer ce foutu jeu), et surtout à Duke Nukem, pourtant déjà passé de mode. Pourquoi ? Eh bien tout simplement parce qu'il avait un éditeur de carte à la fois hyper bugué mais malgré tout utilisable et fun...

Résultat : on s'entretuait dans la joie et la bonne humeur, dans des "maps" maison. Notre lycée, fidèlement reconstitué (à l'exception de quelques retouches esthétiques nécessaires, comme des filles à poil dans le bureau de la pastorale ou du sang sur les murs dans la salle des profs). Mon appart, et même celui des voisins et le garage, là encore rendus avec une précision de géomètre (si l'on excepte les requins planqués dans le passage secret entre ma baignoire et celle de la voisine, et les nombreuses femmes, hum, dénudées sur mon plumard). L'école de Papa, mon chef d'oeuvre (nan en fait c'est moche, c'est juste que ça m'a pris des semaines à tout modéliser, barreau de chaise par barreau de chaise).

Crois-moi, l'ami(e), se planquer dans tes propres toilettes avec un RPG et 2 points de vie pour tendre un piège kamikaze au pote qui te traque, c'est jouissif. Je ne crois pas avoir eu autant de fous rires sur un autre jeu vidéo. Hmm, peut-être MadTV, mais c'est un jeu solo, rien à voir avec les hurlements d'une bande d'ados hilares. ;-)

StarCraft (1998)

Starcraft fait partie du top 5 des jeux auxquels j'ai le plus joué. J'y ai surtout joué longtemps : à la sortie de Brood War, je jouais essentiellement en LAN avec des amis (entre deux frags sur Duke Nukem) ; puis, dès que j'ai eu accès à Internet, j'ai mis à profit le merveilleux modem 28kbps du portable de Papa pour jouer en ligne, sur Battle.net. Ces parties acharnées m'ont occupé pendant des années, jusqu'en 2003, plusieurs mois après la sortie de Warcraft III.

Je jouais essentiellement Protoss, parfois Terran. J'étais du genre à faire la tortue pendant 30 minutes pour ensuite débarquer avec une nuée de porte-nefs, mais cette tactique ne fonctionnait que contre des potes : sur le Net j'en ai vite constaté les limites. ^^

L'équilibre entre les 3 races du jeu en faisait toute la richesse. En un contre un, je n'ai jamais trouvé ça fun. Ce qui me bottait, c'est d'allier les 3 races en 3v3, ou au moins de compter sur un allié Zerg pour équilibrer mes Protoss en 2v2. Et puis pendant mes derniers mois sur ce jeu, mon meilleur allié (Sooty, de Singapour) m'a convaincu de jouer en random : ce fut très instructif, et lorsque j'ai débarqué peu après sur Warcraft III, j'ai gardé cette bonne habitude. ;-)

La 4è Anomalie (2001)

Je n'ai plus exactement les dates en tête ; vers 2002 il me semble, j'ai atterri par hasard sur un jeu en ligne : la 4ème Anomalie. C'était un pionnier du jeu web, conçu pour être joué par groupes de 6 à 40 environ ; son créateur avait cessé de maintenir le code (en bon vieux PHP3), et le jeu tournait un peu dans le vide, sans maintenance malgré une communauté de joueurs actifs et motivés.

Après une première partie pour découvrir le jeu (ça ne m'a pas empêché de gagner, huhu), j'ai décidé de reprendre le flambeau, de poursuivre le développement et d'héberger le jeu sur un serveur plus fiable. C'est ainsi que je suis devenu "MJ" (maître de jeu) pendant quelques années...

Le principe de la 4è Anomalie est simple : une carte en 2D, avec des étoiles. Chaque étoile que tu possèdes te rapporte des ressources ; plus tu as de ressources, plus tu gagnes de points de pouvoir (PP) par jour. Les PP permettent de produire des vaisseaux et de les déplacer. Celui qui termine avec le plus de ressources a gagné.

Il y a bien sûr des subtilités : l'élection d'un empereur, le pillage de planètes, la terraformation, les rails stellaires... Stratégiquement, une partie avec de bons joueurs peut être passionnante pendant plusieurs semaines, sans nécessiter plus de 10 minutes par jour !

Parmi les évolutions que j'ai apportées au jeu original, je citerai une nouvelle carte beaucoup plus complète (indiquant ressources, vaisseaux et rails), des technologies comme l'espionnage, et surtout la co-existence de plusieurs parties aux règles différentes, pour satisfaire tout le monde : "ano4" pour les puristes du jeu original, "ano4terra" avec des ressources plus abondantes, "ano4hof" partie privée sur invitation pour les 30 meilleurs joueurs, "ano4imp" avec des alliances imposées dès le départ...

Comme toute chose, cela a pris fin, les joueurs les plus fidèles ont trouvé d'autres passe-temps. Mais ces 6 années (comme MJ, développeur et parfois joueur) restent un excellent souvenir, et qui sait, un jour peut-être les légendes du Hall of Fame se réuniront pour une ultime revanche... :-)

Warcraft 3 (2003)

Sur mon ancien site, j'avais une page Warcraft III longue cmb (comme mon bras), avec une ribambelle de replays de mes parties fameuses ou cocasses. Eh oui, j'ai été un joueur assidu, en particulier pendant ma période de chômage entre mon diplôme à Supinfo et mon embauche chez Klee Performance. Crois-moi, je ne regrette pas cette époque : passer sa journée à jouer est à peu près aussi triste que de picoler (et c'est moins agréable, mmm).

Quelques mots sur le jeu néanmoins. Je jouais en random (race aléatoire) la plupart du temps, avec une légère préférence pour les morts-vivants. Au faîte de ma gloire (pfffrt), j'étais plutôt bien classé en Europe, top 10 en 4v4, top 40 en 3v3, top 100 en 2v2 et top 120 en 1v1. Ces chiffres pourraient faire penser que je dépendais beaucoup de mes alliés, mais si tu as joué sur Battle.net, tu sais que le classement est beaucoup plus compétitif en solo. ;)

Depuis Warcraft III, je n'ai plus joué en ligne, hors jeux web. L'investissement personnel pour atteindre et conserver un niveau décent est vraiment disproportionné, surtout quand on dépasse 22-23 ans et qu'on a mieux à faire de sa vie...

Ogame (2004)

Brr, que de nuits passées à guetter une faille, un débris qui disparaît, ramassé par une flotte invisible, un adversaire qui va se coucher... J'ai eu ma période no-life sur Ogame, comme des tas de gens avant et après moi. Ce n'est pourtant pas un jeu exceptionnel, mais à cette époque de ma vie, j'avais des vides à combler.

Je garde en mémoire avec un soupçon de fierté certaines de mes plus belles victoires. Statistiquement parlant, j'ai plutôt bien réussi : sans jamais "payer pour progresser", une cinquantaine de "HoF" (batailles classées dans le "hall of fame"), une ascension jusqu'au top 3 (sur un "univers" de 4500 joueurs), quelques records de France, des concours remportés, bref au cours de mes 18 mois de grosse activité j'ai fait pas mal de choses. J'ai aussi pris du plaisir à écrire de nombreux roleplays pour mes "HoF" (et parfois pour ceux des autres), et c'est ce qui m'a finalement décidé à lancer mon blog d'écriture, pour voir si je parvenais à diversifier ma plume et à la faire vivre sans dépendre d'un support comme Star Trek Québec ou Ogame.

eRepublik (2008)

C'est un cas d'école pour les jeux web communautaires, et à certains égard, pour le jeu vidéo en général. eRepublik, c'est un concept très simple, inédit, lancé en "beta" avec des bugs invraisemblables pendant un an, puis en soi-disant "V1" avec encore plus de problèmes, etc... jusqu'à atteindre une forme de maturité technique, 3 ans plus tard, en ayant totalement perdu son âme sur l'autel de la rentabilité maximale.

Ce développement chaotique n'a pas empêché la réussite du jeu, mais celle-ci n'a qu'une seule cause : la communauté. Avant même la V1, eRepublik comptait 40000 joueurs, ce qui est considérable pour un jeu web adulte ; un écosystème s'est créé autour du jeu pour palier à ses nombreuses lacunes : forums nationaux, alliances, marché d'échanges, carte interactive, outils de transmission de consignes... Les développements (d'applications et de contenus) réalisés par cette communauté dépassent l'entendement, surtout si on les compare au jeu proprement dit.

J'ai fait partie de ces gens qui ont adhéré au concept et consacré du temps, à la fois pour progresser dans le jeu (devenir président, etc) et surtout pour améliorer autant que possible le plaisir de jouer ensemble. De ce fait, l'essentiel de ma "carrière" de joueur s'est faite sur le plan politique : je ne vais pas énumérer ici mes mandats nationaux et internationaux, je doute que cela t'intéresse. Je dirai tout de même, parce que j'en suis fier, que j'ai porté plusieurs projets de loi qui ont marqué l'histoire de l'eFrance (jusqu'à ce jour, pour certains), comme la "loi eFamilles" (qui encourageait l'adoption des nouveaux joueurs par deux "anciens", avec une petite couche de roleplay), le Service Militaire (pour former les futurs soldats et leur donner un cadre social enrichissant pendant leurs premiers mois) ou la légendaire "income tax wood" (système protectionniste extrêmement chronophage pour le Ministère de l'Économie mais qui a protégé et enrichi l'eFrance face au dumping hongrois). J'ai aussi été le "papa" du premier babyboom eFrançais, et heureux père adoptif de 40 (!) merveilleux enfants. :P

Après 18 mois de très intense activité, j'ai pris ma retraite, vivant de mes rentes après une sortie, humm, rocambolesque (mes compatriotes eFrançais apprécieront ^^). Depuis, je suis tout cela d'un oeil, revenant au Congrès donner mon avis de vieux croûton lorsque j'en ai l'occasion. Le jeu en lui-même ne présente plus aucun intérêt depuis 3 ans, seuls les joueurs payants (et pas 20€/mois hein...) ont encore de quoi s'amuser ; numériquement, l'eFrance est un nain à côté des superpuissances ultra-nationalistes (Serbie, Pologne, Hongrie...), mais peu importe, nous sommes envahis la plupart du temps, cela ne nous empêche pas de bavarder, de refaire le monde, de nous chamailler et, parfois, de remporter de belles victoires.

J'ai rencontré pas mal de gens intéressants et attachants sur eRep, et certains d'entre eux ont formé le noyau de l'équipe de DreamCave. Je pense qu'eRep était pour nous tous un modèle à la fois positif et négatif. :)

The Witcher III (2015)

Après des années passées loin des jeux "modernes", j'ai fini par me laisser tenter par The Witcher III. Autant te le dire franchement : j'ai mis la difficulté au minimum. Je n'ai plus les capacités physiques nécessaires pour jouer normalement, et je voulais avant tout jouer pour le scénario.

Et puis je me suis plongé dans cet univers... Des décors somptueux (malgré ma config pas tip-top), une musique envoûtante à souhait, des tas et des tas de clins d'œil aux autres grands univers de la fantasy (GRRM, Tolkien...) et à notre propre histoire médiévale... Rends-toi compte : j'ai même recommencé le jeu en entier un an plus tard, pour tester d'autres choix et tout simplement pour reprendre une dose de kiff. Combien de temps cela faisait-il que je n'avais pas fait ça ? Depuis X-COM je crois ?

Projets

Depuis la fin de l'aventure DreamCave, je panse mes plaies et je réfléchis. Ça ne veut pas dire que je n'ai pas d'idées. Wait & see.

Fanzine JV (1993)

Cela se passe au collège. J'ai 11 ou 12 ans. Avec mon meilleur pote, Benjamin (alias Flib, si tu te souviens de mon ancien site ça devrait faire tilt), nous nous lançons dans un fanzine dédié au Jeu parmi les jeux, au Saint Graal de l'enfant gamer : Zelda.

Le partage des tâches est simple : Benji dessine, j'écris les articles, et nous rédigeons ensemble les solutions. Eh oui, à cette douce époque, point d'Internet pour te mâcher le travail avec un "walkthrough" de 400 pages... Certains jeux bénéficiaient de soluces synthétiques et de cartes dans les magazines spécialisés, mais ceux-ci coûtaient cher, et manquaient (à notre goût) de style, de caractère, d'humour... Bref, nous voulions faire mieux.

La suite s'est perdue dans les brumes du temps : je n'ai jamais pu remettre la main sur les sauvegardes que j'avais faites (c'est un des grands drames de ma vie, oui). Je crois que nous avons tiré 5 ou 6 numéros, trimestriels au début, puis très espacés (euphémisme). Je me souviens bien, par contre, des heures incalculables passées sur Publisher (sous Windows 3.1, hein, pas le Publisher pour noobs, non non, le machin bugué et pas du tout intuitif, mais tellement génial pour l'époque). Je me souviens également de magnifiques dessins de Flib, de BD humoristiques, d'une illustration A4 de l'arbre de Secret of Mana... Hey, on faisait ça bien, je t'assure ! :)

Montage vidéo (1996)

L'évolution de la puissance informatique, au milieu des années 90, a ouvert tout un tas d'horizons pour les passionnés : traitement de l'image, du son... et de la vidéo. Enfin, il est devenu possible de convertir des vidéos en numérique, de les modifier, de les monter, et d'en faire des rendus très corrects.

J'ai dit "corrects", hein. Pour un rendu "pro", sur une bécane ordinaire, il faudra attendre quelques années de plus...

C'est donc au lycée que je me suis intéressé au montage et à l'encodage de vidéos. J'ai fait pas mal d'essais et de bidouilles sans intérêt, et ne citerai donc ici que deux projets.

Tout d'abord, avec Sébastien (alias Sebounet), nous nous sommes lancés dans la numérisation de divers contenus. Des épisodes de X-Files, pour commencer : transférés d'une VHS au PC (modeste 166MHz...) grâce à une carte d'acquisition Matrox Marvel (encodant en MJPEG), puis montés sous Video Studio (devenu par la suite Ulead Media Studio, puis racheté par Corel...) et encodés en MPEG1, le format le plus intéressant du moment. Eh oh, on ne rit pas, merci. Bon, d'accord, il fallait entre 12 et 24h pour encoder un épisode sur ma machine (P200...), mais c'était fun.

Quand nous avons réalisé que passer sur CD l'intégrale de X-Files nous prendrait quelques siècles de trop, nous nous sommes tournés vers des projets plus ponctuels. Je pense notamment à ce morceau de bravoure que fut la numérisation d'une conférence d'André Comte-Sponville, prêtée par notre prof de philo. Accroche-toi : après quelques semaines de tests et de bidouillages divers (et l'arrivée opportune du DivX), nous avons réussi à mettre 3h de conférence sur un simple CD de 700Mo. Aha ! Je te sens calculer le bitrate et te dire "mais comment est-ce possible ?"... Bon, je te donne un indice : tout le monde se fout de la stéréo et de la couleur du pull de l'orateur, non ? Voilà, on a fait ça en mono, en résolution minuscule, et surtout en noir et blanc. Mouahahahahahaaaaaah.

L'autre projet que j'évoquais est une sorte de teaser pour la Coupe du Monde 98, réalisé à partir de quelques centaines de photos. Bref, comment animer des images statiques. J'ai bien joué avec les effets de transition... C'est une expérience qui me sera utile par la suite, pour réaliser les DVD de la chorale de l'école de Papa, créer une vidéo rétrospective pour le mariage d'une amie, ou encore monter un court-métrage... ;-)

Jeux de rôles (MJ) (1996)

Le lycée, c'est le pied. Tu fais semblant de bosser, et tu passes ton temps à t'amuser.

Pour moi en tout cas c'était ça. Je ne garde pas un souvenir mémorable des cours, hormis l'histoire et la biologie. J'écoutais relativement attentivement (pour ne pas avoir à réviser ensuite, nanméoh), et consacrais le reste de mon cerveau à programmer ma Casio ou à griffonner sur mon bloc-notes.

Que griffonnais-je donc ? Peu de dessins : je n'ai jamais eu ce talent. Pas de poèmes non plus, ça m'est venu plus tard. Non, je mettais sur papier des idées de scénarios. Des cartes, des descriptions, des checkpoints d'avancement, quelques dialogues, des puzzles... Bref, tout le nécessaire pour un jeu de rôles.

Je n'ai pas eu l'occasion d'en jouer énormément : le seul moment où nous pouvions jouer à 5-6 pendant un certain temps, c'était le midi. Une heure par une heure, ce n'est pas l'idéal pour rester plongés dans l'histoire. Je me souviens malgré tout de deux parties que j'avais créées : une médiévale-fantastique, inspirée par Excelsior (un shareware DOS qui a marqué mon enfance), et une SF, mélangeant joyeusement Les Robots et X-COM.

Je ne pense pas m'avancer beaucoup en disant que cette expérience a servi de terreau à mon intérêt pour Star Trek Québec, et plus tard encore, à DreamCave...

Site perso (1998)

Le seul intérêt pédagogique de mon année à la Fac fut de me mettre en contact avec l'HTML. Dès le premier cours d'informatique, je décidai de créer mon site web - pas vraiment pour raconter ma vie, mais surtout pour parfaire ma maîtrise de cette technologie toute neuve (pour un français...) et me tenir prêt à suivre ses évolutions.

Cela n'a pas été aussi simple que ça ne l'est de nos jours. Le plus difficile fut de trouver un hébergeur correct, c'est-à-dire relativement fiable et sans pubs intrusives. Eh oui, à l'époque, quasiment tous les hébergeurs (et 100% des français) imposaient d'énormes bandeaux et/ou des pop-ups. Et Adblock n'existait pas. ;-)

J'ai fini par trouver mon bonheur chez Webjump, un hébergeur gratuit américain. Pendant plus d'un an, mon site s'est développé outre-Atlantique, passant à une V2 avec un menu en Java, puis une V3 avec un menu en Flash créé par un ami, Renaud. Cette V3 vit également l'arrivée de pages dynamiques grâce à PHP, et le transfert chez Free, nouveau paradis des sites français.

Mon brave petit site passa ensuite sur mon propre serveur, à mon domicile, et enfin sur un serveur dédié chez OVH ; au fil des années, quelques pages disparurent ou furent archivées, d'autres naquirent... Le site ne fut plus réellement maintenu à partir de l'ouverture de mon blog d'écriture, et ce dernier s'arrêta également lorsque je décidai de consacrer 100% de mon énergie à DreamCave. C'est la fin de cette aventure qui m'a amené à faire renaître de ses cendres mon site perso, avec un design digne de notre époque (enfin j'espère ^^) et du contenu totalement neuf.

Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage, Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage, Polissez-le sans cesse, et le repolissez, Ajoutez quelquefois, et souvent effacez. :-)
Court-métrage Star Wars (1998)

J'ai promis quelque part de ne proposer ici que du contenu inédit, aucun c/c de mon ancien site. Je vais donc proposer un point de vue différent sur cette belle aventure : pas de résumé du court-métrage, pas d'images, pas de descriptif factuel donc, mais une analyse subjective, faite avec le recul.

Petit rappel du contexte, tout de même (il ne faut pas que j'oublie que tu n'as très probablement jamais connu mon ancien site...) : juste après le Bac, une bande de potes se rassemble autour d'un projet un peu fou, réaliser un court-métrage sur le thème de Star Wars, à l'occasion d'un concours. Cette bande de potes compte une quinzaine de jeunes entre 16 et 20 ans, avec quatre "leaders" impliqués à temps complet : JB (scénario, dialogues), Phil (son, réalisation), FliB (effets spéciaux) et moi (numérisation, montage). Nous réunissons du matériel, caméra, micros, costumes, ordis ; deux jours de tournage sont prévus en studio sur fond bleu, le reste en forêt.

C'est là que le premier problème surgit : le tournage en forêt prend deux fois plus de temps que prévu, soit trois semaines en tout. Il se termine mi-août, donc deux semaines avant la deadline du concours, ce qui hypothèque fortement nos chances - mais la fougue de la jeunesse nous met des œillères... En attendant, les acteurs reviennent épuisés, bardés de tiques et de piqûres de moustiques. C'est en particulier le cas de FliB, qui doit malgré tout se coltiner la réalisation des scènes en 3D et les effets spéciaux, image par image sous Photoshop.

Deuxième problème : nos ordinateurs sont très loin de tenir le choc. Son Mac met 20 minutes à calculer UNE image en 3D. Mon PC est plus rapide, mais le transfert de données entre nos ordinateurs est un cauchemar : impossible de passer par réseau, seules les disquettes 1,4Mo fonctionnent... Nous passons donc des journées entières à ces simples transferts. FliB m'apprend à faire les effets "sabre laser" sous Photoshop, et j'avance comme je peux pendant qu'il se bat avec son Mac pour la 3D.

Résultat des courses : 50% des effets "sabre" sont réalisés, et 3 plans 3D (sur une dizaine) sont prêts fin août. Avec en trame de fond un troisième problème : des engueulades de frustration et des histoires de filles dignes de Beverly Hills. Rien de bien méchant, mais c'est assez pour que l'aventure finisse en eau de boudin.

Raconté comme cela, c'est un peu cauchemardesque ; j'en garde pourtant un excellent souvenir, et je ne regrette pas grand chose. Je pense que ce projet de six semaines a été une expérience très instructive pour tous les participants. Qu'avons-nous mal fait ? Trop d'ambition par rapport à nos moyens, et pas assez de sérieux dans le "recrutement" (c'était un peu "j'ai un pote qui veut participer, il peut faire quoi ?"). Un projet de potes, en somme, rien de très étonnant.

Ce qui laisse un peu songeur, c'est qu'apparemment, nous aurions eu une vraie chance au concours si nous avions pu finir : les vainqueurs s'étaient beaucoup moins cassé la tête, et notre histoire était vraiment originale. Tout cela fait furieusement penser à ce que j'ai vécu bien plus tard avec DreamCave, et c'est bien dommage de ne pas avoir réussi à ne pas reproduire les mêmes erreurs.

Radio perso (2000)

Comme lors de la création de mon site perso, mon objectif principal en lançant ma radio était de prendre le bon wagon, aux premières heures du streaming. Je ne m'en servais pas comme sauvegarde, le bitrate mp3 de 128kbps étant (déjà à l'époque) un peu faible pour mes oreilles délicates ; je ne cherchais pas non plus à capter un large auditoire. Non, tout ce que je voulais, c'était faire joujou avec les tout premiers moyens de diffusion multimédia sur le Web, et proposer aux visiteurs de mon site un petit bonus selon leur humeur.

Et comme pour mon site, c'est aux USA que j'ai trouvé un hébergeur : Live365 permettait à l'époque de créer gratuitement une radio, avec une quinzaine d'heures de musique en boucle, ou une diffusion en live depuis un outil comme Shoutcast. Ma connexion Internet étant assez limitée en upload, j'utilisais donc ma radio en mode playlist.

Ce petit paradis audiophile ne dura qu'une paire d'années : bien vite, les majors tapèrent du poing sur la table et réclamèrent de l'argent pour cette diffusion "sauvage". Live365 introduisit de la publicité, un peu, puis beaucoup, jusqu'à finir par rendre payant le service de streaming. Mais j'avais déjà cessé d'émettre : l'expérience avait été instructive, je devais passer à autre chose. C'est-à-dire à une diffusion privée via Icecast lorsque j'aurais besoin de partager ma musique avec des amis, mais aussi à V, l'étape suivante de mon intérêt pour la diffusion de contenu multimédia.

Star Trek Québec (2000)

Il y a des intérêts, des passions que l'on porte en soi dès l'enfance, et d'autres que l'on découvre sur le tard. Je ne sais pas si elles "apparaissent" réellement, j'ai plutôt le sentiment qu'elles étaient déjà présentes, latentes, prêtes à s'épanouir le moment venu.

C'est exactement ce que j'ai ressenti lors de mes débuts à Star Trek Québec, club francophone de jeu de rôle par email. Jusqu'alors, j'avais aimé la littérature, j'avais pris du plaisir, parfois, à écrire, que ce soit dans le cadre scolaire ou non - mais cela ne m'avait jamais effleuré l'esprit que cela puisse être un loisir. Et encore moins que cela me fasse autant de bien.

Je suis arrivé à STQ un peu par hasard, à moitié contre mon gré : Cédric, un ami amateur de jeux de rôle et féru de sciences, me le recommandait chaudement, et j'ai fini par céder, aussi peu convaincu que s'il m'avait emmené à un concert de Céline Dion. Il faut dire que je n'avais jamais accroché à Star Trek, et que je craignais de tomber parmi des nerds illuminés se taillant les oreilles en pointe pour avoir l'air cool.

Mes préjugés étaient bien évidemment stupides, et je découvris une communauté adulte, solidaire, cultivée, ouverte et franchement intéressante. Comme tout petit nouveau, je passai par l'Académie, et découvris les règles du jeu : Cédric me les avait expliquées, certes, mais c'est une expérience à vivre, pas à raconter. Dans un jeu de rôle par email, l'histoire s'écrit à tour de rôle, chacun prenant la plume quand il le souhaite pour ajouter quelque chose, que ce soit 4 lignes ou 4 pages. C'est ce que STQ appelle le "style libre" : pas de fil directeur, c'est aux joueurs (réunis par "vaisseau" de 10-15 membres) d'écrire l'histoire. L'autre mode de jeu est plus classique : la "mission" est dirigée par un maître d'histoire (MH) qui pousse les joueurs à résoudre des situations, de façon assez similaire à un épisode TV de Star Trek.

Ce qu'il y a de magique dans cette façon de jouer (et qu'il est difficile à expliquer en quelques mots), c'est que chacun contribue à l'histoire, quel que soit son style, quelle que soit son imagination. Certains écrivent des pavés très descriptifs, fourmillant de détails. D'autres ne s'intéressent qu'aux dialogues, souvent humoristiques. Certains mettent en avant leur personnage et lui inventent des tas d'histoires, tandis que d'autres créent des seconds rôles ou font jouer les personnages des autres joueurs. Cela pourrait être anarchique, comme ça l'est souvent sur les jeux de rôle publics sur forum ; à STQ, le système mis en place (Académie, commandement des vaisseaux) pousse naturellement chaque joueur à garder en tête la règle essentielle : jouer pour les autres.

Car la qualité d'un joueur se révèle dans sa capacité à inspirer ses compagnons. Ni le fond, ni la forme d'un "chapitre" ne sont critiques : ce qui est essentiel, c'est qu'en lisant ton texte, d'autres joueurs aient envie d'écrire la suite. Certains joueurs sont très doués pour ouvrir des portes, permettre différentes évolutions, à la manière d'un cliffhanger de série TV ou de façon plus subtile encore. D'autres, comme moi, aiment jouer avec les émotions du lecteur, mêler rire et larmes pour que ses tripes décident d'elles-mêmes d'écrire la suite.

J'ai bien conscience que je pourrais bavarder très longtemps sur ce sujet et que cela ne te permettrait pas pour autant de vivre cette émotion si particulière que je résumerais en "waouh, il/elle a compris où j'espérais en venir, et a écrit une suite encore plus belle que je ne pouvais l'espérer". C'est quelque chose que ressentent probablement des joueurs de jazz, ou des artistes d'improvisation. Il faut le vivre pour comprendre.

J'ai fait partie de STQ pendant plus de 5 ans, comme joueur puis comme MH, ne m'arrêtant que faute de temps, à cause de mon travail à KP. Ce que j'y ai appris a permis à mon blog d'exister, et a beaucoup contribué à la philosophie de jeu de Dreamaz. Je ne désespère pas de parvenir un jour à aller au bout de cette idée, de cette conception du "écrire ensemble".

Blog écriture (2005)

Mes quelques années à Star Trek Québec, puis les dizaines de "roleplays" écrits sur Ogame m'ont donné le goût de l'écriture. Ou l'ont libéré, plus probablement. J'ai pris conscience du plaisir que cela m'apportait, de la sensation d'accomplissement qui m'envahissait quand je réussissais à mettre en mots ce que je voulais faire passer. J'ai surtout pris mon pied en jouant avec mes lecteurs, en tirant les ficelles de leurs émotions, souvent grâce à l'humour.

Et puis je me suis demandé s'il y avait plus que ça. Parce que, bon, ce que j'écrivais restait toujours dans l'univers du jeu, et répondait à des critères bien définis : tout public, pas trop long, pas trop littéraire, "catchy". J'aimais ça, hein, ne me fais pas dire le contraire ; je me demandais juste si j'étais capable de faire autre chose.

C'est ainsi que, le 1er janvier 2005, en guise de résolution de nouvelle année, j'ai créé un blog pour y publier mes textes, au fur et à mesure de leur écriture. Je ne savais pas trop où j'allais, je voulais juste écrire : je m'ennuyais terriblement au travail, j'avais arrêté Warcraft III, j'avais donc un peu de temps et quelque chose qui ressemblait à une "envie pressante".

Au cours des 2 ou 3 ans qui ont suivi, j'ai publié quelques dizaines de textes. Des nouvelles, des poèmes, des chapitres d'un roman inachevé. C'était très hétérogène ; certains textes m'ont pris 3 heures, d'autres 3 mois ; certains me semblent encore aujourd'hui plutôt bons, beaucoup me font rire par leur banalité. J'ai pu varier les styles et les thèmes, faire des expériences. Je me suis aussi joint à une petite communauté de jeunes auteurs pour avoir des critiques constructives et progresser.

Le blog est hors ligne depuis un bon moment, faute de temps et de motivation pour le mettre à jour proprement ; promis, j'ai l'intention de remettre en ligne mes textes (même les plus mauvais ^^), je m'y attellerai une fois cette page perso terminée. Ce ne sera plus un blog, je pense ; je réfléchis encore à la forme que cela prendra.

Aujourd'hui, 1er janvier 2014, neuf ans après la naissance de mon blog, je contemple le chemin parcouru. Qu'il est court... Je n'ai pas passé assez de temps à écrire, je le sens dans mes os. Je ne veux pas céder à la facilité en invoquant ma difficulté croissante à taper au clavier ; je sais qu'il y a d'autres raisons. Serai-je plus brave au cours des années à venir ? Si je dois voir 2023, je ne veux pas regretter à nouveau d'avoir si peu fait, si peu écrit. Il va falloir plier le destin à ma volonté, pour une fois.

Edit juillet 2014 : aha ! Regarde ça, j'ai tenu parole ! http://blog.matthy.net/ J'attends tes commentaires, vraiment. :)

V (2005)

J'imagine que nous avons tous, occasionnellement, des idées lumineuses qui pourraient faire un tabac si on les mettait en œuvre. La difficulté, ce n'est pas d'avoir l'idée, c'est de la réaliser (chose que certaines personnes un peu rêveuses refusent d'admettre...).

"V" - simple nom de code, pour "vie virtuelle" - est de ces idées jamais entreprises. En avance sur leur temps (j'espère ne pas te paraître prétentieux), avec un potentiel immense, et laissées lettre morte faute de moyens.

L'idée maîtresse de V réside au carrefour entre télé-réalité, intelligence artificielle, jeu vidéo et littérature fantastique. Il s'agit de créer un monde virtuel persistant, essentiellement autonome, en 3D ; d'y ajouter quotidiennement une fine dose (quelques minutes tout au plus) d'événements scriptés (dialogues, rencontres, combats, etc) ; d'offrir l'accès à tout cela en temps réel depuis tout dispositif numérique connecté.

Oui, à première vue, c'est une sorte de Loft Story dans un univers 3D. Pas une planète entière, évidemment, la tâche serait colossale : le projet envisageait pour commencer 5 lieux (villes, villages ou endroits remarquables) de quelques hectares de superficie. La partie "automatique" de l'univers assigne à chaque personnage des tâches quotidiennes (comme aller traire les vaches) et une liste d'actions plus ou moins probables (câliner son/sa chéri(e) dans la piscine ^^) : une sorte de comportement de PNJ dans les jeux de rôle, en version "vie quotidienne réaliste".

Quel intérêt pour le spectateur dans tout cela, au-delà de l'aspect "vivarium" ? Eh bien chaque spectateur est aussi, s'il le souhaite, joueur ; et ceci à deux niveaux. Tout d'abord, chaque semaine, un vote est lancé, dans chaque "lieu", pour déterminer l'issue d'une situation indécise dans la partie "scénarisée" de l'histoire : par exemple, "qui va remporter le combat ?" ou "Juliette va-t-elle céder aux avances de Roméo ?". Le spectateur peut donc, à son échelle, piper les dés du Hasard. Par ailleurs, il peut être investi de la direction d'un personnage en particulier : il ne s'agit pas pour lui de l'incarner comme dans un jeu de rôle, mais d'être une sorte d'ange gardien, d'orienter (seul, cette fois) certaines décisions, de personnaliser son apparence ou son habitat, etc.

Tu te demandes probablement déjà quel est le modèle économique d'un tel projet. Il est très simple : accès gratuit pour suivre les quelques minutes de "résumé" chaque jour dans un des cinq lieux. Pour avoir plus de lieux à suivre, et/ou pour pouvoir laisser une fenêtre ouverte en temps réel 24h/24, et/ou pour être "l'ange gardien" d'un personnage, ce sont des abonnements, de 2 à 30 € par mois. Plus des "virtual goods" (vêtements, meubles, etc) pour les "anges gardiens" désireux de dépenser davantage.

La principale difficulté d'un tel projet, lorsque je l'ai conçu en 2005 (!), c'était le nombre de modèles et d'animations à réaliser en amont : une fois l'univers lancé, il est toujours possible (et souhaitable) de l'enrichir, mais il faut un minimum pour démarrer. En partant de zéro, cela représentait quelques centaines de mois/homme, et c'est ce qui a stoppé net le projet : il nécessitait des moyens inaccessibles à un studio indépendant.

Huit ans plus tard, le problème reste le même, à moindre échelle toutefois (l'animation 3D a bien progressé). Je suis convaincu qu'un projet similaire verra bientôt le jour, et il sera porté par un grand studio, ce qui lui donnera les moyens financiers nécessaires mais également parce que ledit studio pourra probablement réutiliser des travaux déjà réalisés (Blizzard pourrait allègrement piocher dans ses modèles de WoW par exemple).

Pourquoi, alors, un tel univers n'a-t-il pas encore vu le jour, si le nombre de modèles et d'animations n'est plus bloquant ? Ce n'est pas pour des raisons techniques. Oh, il y a quelques challenges tout de même, mais rien d'impossible. Les serveurs n'auraient qu'une instance à calculer en temps réel, et alimenteraient les clients de scripts scénaristiques en XML ; à mon sens, ces clients devraient être des navigateurs, la 3D reposant sur WebGL, pour permettre une visualisation sur mobile. L'intégration avec les réseaux sociaux serait une évidence ; la création d'un écosystème communautaire autour de l'univers (forums, concours, animations IRL) s'imposerait, mais tout cela est connu aujourd'hui.

Non, ce qui freine l'arrivée d'un projet comme V, c'est l'extrême frilosité ambiante. Plus personne n'ose investir dans une entreprise risquée ; or créer une nouvelle forme de loisirs est forcément un pari. Le monde du jeu vidéo ne connaît plus que le recyclage de licences éprouvées et la production en masse de jeux Facebook sans valeur ajoutée. Celui de la télévision meurt à petit feu et préfère presser le citron jusqu'au bout plutôt que de chercher de nouvelles dynamiques. L'audace n'est plus à la mode, et je ne pense pas qu'il faille tout mettre sur le dos de la "crise", car l'argent circule toujours... Nous vivons hélas une époque réactionnaire, effrayée par l'avenir et repliée sur de prétendus acquis.

Trêve de sociologie de comptoir ; le fait est que personne en France aujourd'hui n'aurait le cran de se lancer dans un tel projet. Il faudrait sans doute aller voir du côté de Google. Hé, madame ou monsieur de chez Google, ceci est un appel du pied discret. :)

Roleplay (2007)

Tiens donc. Pourquoi ajouter une bulle-étape "roleplay" alors que j'ai déjà évoqué les jeux de rôle ?

La réponse est indirectement liée à eRepublik. En m'inscrivant à ce jeu, pour la première fois en une décennie d'Internet, j'ai pris mon nom civil, j'ai assumé mon identité. Bien sûr, ma carrière politique dans le jeu m'a amené à surjouer certains traits de mon caractère, à prendre des postures que je n'ai jamais dans la vie réelle. Malgré tout, j'étais Matthieu Bonne, rémois quasi-trentenaire, ingénieur en informatique - pas de tromperie sur la marchandise. Même mon handicap n'était plus un mystère, même si je ne le clamais pas sur les toits.

Si j'insiste sur eRepublik, c'est parce qu'il en était tout autrement par le passé. Comme une majorité d'internautes, j'avais un pseudonyme, plusieurs même ; le plus courant était Lain, issu de la série éponyme. Lain était à peu près Matthieu, c'était un vrai pseudo ; en tant que Lain, j'étais sans doute un peu plus cool et gamin qu'en vrai, mais globalement, c'était moi. On ne peut pas en dire autant des autres.

Ces "autres" étaient plus que des pseudonymes. Parlons plutôt d'identités. Je jouais des rôles, et mes "personnages" avaient une histoire, un style, un réseau de relations. Cela n'était qu'un jeu au début : je prenais un nom bidon pour jouer à un jeu en ligne quelconque, d'autres joueurs venaient me parler sur IRC, ICQ ou MSN, et je m'inventais une autre vie. Peu à peu, de peau en peau, j'ai pris plaisir à prévoir ces vies imaginaires à l'avance, à construire ces identités avant de les faire entrer en scène. Je m'amusais à augmenter peu à peu la difficulté : chaque nouveau personnage s'éloignait encore un peu plus de "moi". J'étais retraité malicieux, prof Noir patient et idéaliste, adolescent colérique, mère de famille en manque de reconnaissance, homosexuel inverti, loup solitaire riche et misanthrope.

Oui, oui, c'était totalement creux, narcissique, pas la peine de me faire la morale, j'en suis bien conscient. Je l'étais déjà à l'époque, d'ailleurs, mais j'étais tellement au 36è dessous, dans ma "vraie" vie, que le positif que je tirais de ces autres identités était une perfusion nécessaire. J'avais plus d'amis dans ces vies imaginaires qu'en vrai, tu vois un peu le tableau ? Dans ces autres peaux, je faisais des choses que des gens admiraient, j'étais utile, on comptait sur moi : l'exact contraire de mon existence charnelle. Je ne me suis jamais noyé dans cette illusion, je suis resté conscient à chaque instant de la vanité de ces masques ; ça n'avait rien d'une pulsion pathologique, ni d'un déni de la réalité. Je cherchais juste un peu d'oxygène.

Au fil des années, j'ai "réduit la voilure", faisant disparaître les identités qui comptaient le moins pour les gens qui les connaissaient. Et les dernières ont suivi, lentement. Je me suis progressivement réapproprié ce que mes personnages avaient de bon, d'intéressant, de talentueux ; ça peut paraître abstrait dit comme ça mais c'est pourtant exactement ce qu'il s'est produit : certains de mes "masques" avaient un talent que "je" n'avais pas, et "ils" "me" l'ont appris. Je te devine sceptique. Honnêtement, je l'étais aussi.

Au final, tout ce simulacre m'a beaucoup appris, sur les autres et sur moi. D'une certaine façon, il compensait en partie mon isolement des années Supinfo/KP, mais il m'a aussi permis de voir le monde par d'autres yeux, de sonder la complexité des rapports humains à l'écrit, et de vivre des situations que "je" n'aurais jamais connues autrement. Je me suis efforcé de ne blesser personne, et je ne dis pas ça pour me donner bonne conscience ; je sais qu'en m'effaçant peu à peu, j'ai attristé/déçu des gens qui tenaient (parfois un peu trop fort ^^) à un de mes personnages, mais je me dis que ça s'équilibre avec, entre autres, les deux personnes suicidaires que j'ai soutenues pour se sortir du pétrin dans lequel elles étaient. Rassure-toi, tout n'était pas aussi extrême, heureusement, sinon j'aurais pété un câble ; c'est juste qu'avec 30 ou 40 "relations" par identité, ça fait pas mal de monde, et ça balaie le spectre des relations humaines. Il y aurait des tas d'anecdotes à raconter, drôles ou émouvantes, mais cela n'a rien à faire sur un espace public. ;)

Voilà, tu peux considérer ça comme une facette sombre de ma personnalité, ou en tout cas un passage délicat de ma vie. Le mieux reste sans doute de ne pas porter de jugement, de voir le positif et le négatif, et d'en tirer des leçons pour la suite. En tout cas c'est comme ça que je vois les choses. :)

Dreamaz (2009)

Hmm, même remarque que pour DreamCave : il est encore tôt, pour moi, pour en parler facilement. Disons simplement que Dreamaz était un jeu web communautaire, comme Les Royaumes Renaissants ou eRepublik.

Là où il allait beaucoup plus loin que les jeux existants, c'était sur le réalisme. L'univers était une planète (ou devrais-je dire un satellite), Maz, avec une géologie, une géographie et des écosystèmes cohérents. Le temps s'écoulait en accéléré (x60), impactant la végétation, les troupeaux, la météo, les saisons... et les personnages (déplacements, actions, mais aussi vieillissement et mort).

Oui, tu as bien lu : dans Dreamaz, les personnages, joueurs ou non, naissent, grandissent et meurent. Tu joues un personnage 6 ou 8 mois, voire beaucoup moins si tu es soldat ou bandit ; le jeu à long terme repose sur la filiation, l'héritage, la transmission de talents. Les joueurs sont amenés à former des familles, à financer des écoles. Live another life. ;-)

Il y aurait énormément à dire sur les divers aspects du "réalisme" de Dreamaz, notamment sur nos travaux avec l'Université de Reims. Nous avions poussé le concept vraiment très loin, crois-moi. Mais tout cela n'est plus que poussière, immatériel comme les grains de sable du désert de Jubaar...

TEDxReims (2014)

Les années DreamCave m'avaient permis de développer un réseau de connaissances dans le milieu de l'entreprenariat sur Reims ; redevenir entrepreneur individuel et isolé avait tendance à distendre ces liens, et ce fut ma première motivation pour rejoindre l'équipe d'organisation de TEDxReims début 2014. Bien sûr, j'étais également intéressé par le concept des conférences TED, j'avais envie de participer à la diffusion d'idées novatrices et enthousiasmantes dans ma ville de cœur.

Je me suis d'abord investi dans le pôle communication, plus particulièrement pour maintenir le site Web et animer les réseaux sociaux ; après le succès de l'édition 2014, j'ai voulu tenter une nouvelle aventure et développer de nouvelles compétences en rejoignant le pôle speakers. Je m'occupe également des outils de communication interne de l'équipe, et de notre chaîne YouTube sur laquelle j'organise les événements « poursuivons TEDxReims » (lors desquels nos anciens speakers se voient offrir un droit de suite à leur conférence).

L'édition 2016 que nous sommes en train d'organiser s'annonce fameuse, je ne peux que te recommander de suivre ça de près !

PlaniDoc (2014)

PlaniDoc est né d'une demande de mon ancien collège : cela faisait plusieurs années que les documentalistes cherchaient en vain un logiciel pour gérer les réservations d'élèves et de groupes au CDI. Il existait un tel logiciel il y a une dizaine d'années, mais cela faisait longtemps qu'il n'était plus maintenu et tout gérer sur papier prenait un temps fou.

Nous avons donc établi ensemble un cahier des charges, tenant compte de leurs besoins mais aussi de ceux d'autres établissements scolaires afin de rendre PlaniDoc utile à un maximum de documentalistes. Je l'ai conçu avec les technologies Web les plus récentes pour permettre une utilisation aisée sur PC comme sur mobile, sans contrainte matérielle.

Tu trouveras plus d'informations sur ce projet sur le site de PlaniDoc. Il reste en développement continu pour l'enrichir petit à petit et faciliter la vie des documentalistes.

Slam (2021)

Le démon de l'écriture est revenu... Enfin...

Mais avec une nuance ! Je ne veux pas seulement écrire : je veux transmettre. Partager des émotions en direct. Et cela suppose de maîtriser son expression orale et scénique, ce qui, disons-le franchement, ne fait pas partie de mes talents. Et puis avec ma gestuelle très limitée et mon souffle de poussin asthmatique... Bon.

Je me suis donc dit que ce serait judicieux et motivant de travailler là-dessus. Les règles de base du slam me conviennent bien (notamment la limite de 3 minutes), tout comme sa grande liberté de ton.

Après quelques mois comme spectateur des scènes de slam rémoises, j'ai franchi le pas... Et depuis, je m'éclate, en écrivant et surtout en interprétant mes textes. Si ça t'intéresse, je mets ici les enregistrements dont je dispose.

Livres

Chut, je lis... ^^ Non, sans rire, je lis moins ces temps-ci, je m'occupe autrement. Quand une nouveauté de GRR Martin, China Mieville ou Dan Simmons sort, je me jette dessus comme un mort de faim (d'ailleurs, il faudra qu'on m'explique comment un mort peut se jeter sur quoi que ce soit... Crois-tu aux zombies ?) ; à côté de ça, je grignote quelques tomes du Disque-Monde, par ci par là. Disons que je suis dans une période creuse côté lecture.

La dernière fois que cela s'est produit, j'en suis sorti en écrivant. Quelque chose me dit que l'histoire est amenée à se répéter.

Les Robots (1991)

Isaac Asimov est l'auteur incontournable de la science-fiction. On lui préfèrera F. Herbert pour son génie épique, P.K. Dick pour son talent de visionnaire ou C. Miéville pour son style ; Asimov n'était peut-être pas le meilleur, mais c'est de lui que la lumière est venue. C'est indéniablement lui qui a donné ses lettres de noblesse à la SF, qui l'a faite entrer dans les bibliothèques comme un genre à part entière.

J'ai lu les nouvelles et romans composant le cycle des Robots en 1990-1991, en particulier pendant de longs mois d'hospitalisation(s) et de convalescence. Mon premier contact avec la SF, c'était juste avant : les Slans d'A.E. Van Vogt, à la bibliothèque de l'école ; déjà à cet âge j'adorais me compliquer la vie, donc quand j'ai vu les Robots en gros pavés Omnibus, j'ai foncé. Bien m'en a pris.

Mis à part ce contexte, en quoi les Robots m'ont-ils marqué ? C'est une oeuvre de vulgarisation au sens noble du terme : Asimov était un scientifique brillant et éclectique, et cette culture lui a permis de créer un univers cohérent, un futur raisonnable, lointain dans le temps et l'espace mais si proche dans son humanité qu'il nous semble familier. Il ne s'intéresse pas au futur juste par curiosité de "ce qu'il y a après l'horizon" : l'évolution technologique est surtout l'occasion d'examiner le comportement humain, de voir comment la société et les mœurs s'adaptent. Au fil des pérégrinations d'Elijah Baley et de son collègue/ami R Daneel Olivaw, Asimov nous fait volontairement "visiter" des planètes aux cultures très diverses, explorant autant de facettes de la société humaine. Toutes sont confrontées à l'apparition de robots enfin similaires aux humains, doués de conscience et d'émotions. Les répercussions de cette "ascension" des androïdes sont fascinantes, et 60 ans plus tard, nous semblent incroyablement actuelles.

Les Robots n'ont sans doute pas la puissance sociologique et le souffle épique de Fondation, l'autre grande saga d'Asimov ; mais ce sont des livres très accessibles, passionnants comme de bons polars, et "intelligents" parce qu'ils posent de bonnes questions tout en misant sur la sagacité du lecteur pour y répondre. Autant de traits qui en font un classique de la Littérature.

Dune (1993)

Dune est le plus majestueux space opera écrit à ce jour. C'est une œuvre baroque, complexe, faite d'aventure, de politique, de science et de philosophie... le tout sur plusieurs milliers d'années ; une fresque épique qui se lit et se relit avec un plaisir toujours croissant.

C'est tout ce que je dirai de "descriptif" ici ; c'est peut-être déjà trop. Je ne peux pas résumer Dune en quelques lignes, ni trouver les mots pour décrire son impact sur ma personnalité. Par chance, je ne suis pas le seul à avoir des frissons à la simple vue d'une dune de sable : Dune a conquis des millions de lecteurs et pénétré l'inconscient collectif au même titre que Roméo et Juliette, Frankenstein ou le Crime de l'Orient Express. Comment parler de désert sans penser à Arrakis ? Comment évoquer les mujahidin sans les associer aux Fremen ? Comment se retenir de rapprocher les philosophies Zen et Sunnite ? La liste est longue, aussi large que le spectre des champs d'intérêt de Frank Herbert.

C'est peut-être cela qui fait de Dune un des plus grands livres jamais écrits : il est passionnant, son univers est d'une incroyable profondeur, mais surtout, il fait réfléchir. C'est une sorte de méga-parabole, un conte à la puissance mille, que l'on peut relire tout au long de sa vie pour en tirer peu à peu la substantifique moelle. Cela relève quasiment du religieux, et je pense que ce n'est pas un hasard.

Je l'ai lu pour la première fois à 12 ans, en plein éveil de conscience. Sa puissance évocatrice a libéré mon imagination, bien davantage que Tolkien ou Verne. Asimov m'avait fait dévorer la SF ; ce qu'Herbert a apporté de plus, c'est cette provocation permanente au questionnement. Les thèmes qui lui étaient chers (souffrance, divinité, transhumanisme...) m'ont fait grandir, mûrir. J'étais dans une phase (bien adolescente) où j'avais l'impression d'arriver au bout de ce qu'il y avait à connaître et à comprendre, comme si la découverte était exclusive à l'enfance et que l'âge adulte n'était qu'une longue récolte ; Dune a balayé tout cela et ouvert des voies que j'explore encore aujourd'hui, deux décennies plus tard. C'est Dune qui m'a fait prendre goût à la philosophie, Dune qui m'a fait prendre conscience de la richesse des cultures orientales (et de l'absurdité du nombrilisme occidental), Dune encore qui le premier m'a donné envie d'écrire.

C'est cette complexité chère à Edgar Morin qui a fait de Dune la clé de mon passage à l'âge adulte, et qui continue de me fasciner lorsque je cède à la tentation permanente d'une relecture.

Un mot tout de même sur les livres satellites, écrits par le fils de Frank Herbert : ils ont la première qualité évoquée ci-dessus, pas la deuxième. Un amoureux de l'univers de Dune les lira avec plaisir, pour en savoir plus sur "l'avant" et "l'après" Dune, mais... c'est tout. Aucune relecture nécessaire, ni pour découvrir des subtilités, ni pour apprécier le style. Le génie d'un homme ne se transmet ni par les gènes, ni par des centaines de pages de notes. Si tu veux davantage de Frank Herbert, intéresse-toi plutôt aux 4 tomes du Programme Conscience (Destination Vide, L'Incident Jésus, L'Effet Lazare, Le Facteur Ascension) et aux 2 du Bureau des Sabotages (L'Étoile et le Fouet, Dosadi).

Le fléau (1995)

Le Fléau n'est peut-être pas le premier roman de Stephen King que j'ai lu, mais parmi les premiers, c'est celui qui m'a le plus marqué.

Parce qu'il narre une histoire apocalyptique, une aventure de survivants dans un monde à reconstruire, et que ce mythe de la tabula rasa fascine forcément un adolescent désabusé par la misère et l'absurdité qu'il découvre chaque jour un peu plus autour de lui.

Parce qu'il est typique de l'univers créatif de S. King, cru, ordinaire, teinté d'un fantastique qui n'a rien à voir avec celui de Tolkien - un mélange de superstition, d'ersatz de religion, de Destin et de la puissante mais discrète magie qui sommeille au fond de chacun de nous, sous nos peurs les plus viscérales.

Enfin, parce qu'il a fait partie de ces quelques œuvres qui ont prouvé au gamin que j'étais que le style littéraire avait une importance capitale dans la qualité d'un livre, mais que la qualité de ce style ne se mesurait pas à sa ressemblance aux Grands Classiques érigés en textes sacrés dans les programmes scolaires. D'un point de vue strictement linguistique, on est en droit de contester que S. King écrive "bien". Mais force est de constater que son style est diablement efficace.

C'est ce côté très humain, très accessible qui m'a frappé chez lui, et bien plus tard, j'ai lu avec plaisir ses Mémoires d'un Écrivain, dans lesquelles il illustre à merveille ce que je ressens lorsque, comme lui et tant d'autres, je prends une pelle et creuse dans mon imagination pour y trouver une histoire à raconter.

La part des ténèbres (1996)

Je ne suis pas particulièrement friand de romans (ou films) d'horreur ou de suspense. J'aime quand ces genres font irruption dans une œuvre "ordinaire", et Stephen King est un expert en la matière (Le Fléau, La Tour Sombre...).

Parmi ses romans "100% suspense", il y en a tout de même un qui m'a littéralement scotché. Non, ce n'est pas Shining. Ni Simetierre, ni Misery, ni même Carrie qui m'a bien plu... Non non, je pense à La Part des Ténèbres.

Ce n'est pas le plus connu, pourtant... Il raconte (avec, comme souvent chez SK, une fine dose d'auto-biographie) la dérive schizophrénique d'un écrivain et l'incompréhension grandissante de ses proches. Tout cela dans un contexte très hitchcockien (piou piou ! héhé).

Il me faudra attendre six ans pour frissonner à nouveau comme cela grâce à un livre, et ce sera L'Échiquier du mal, prix Locus 1990 devant... La Part des Ténèbres !

Ender (1998)

J'avais envie de parler d'Ender pour deux raisons. La première, c'est que c'est un des deux livres qui m'a replongé dans une lecture "désirée" après deux années (1è/Terminale) où je n'ai tout simplement pas eu le temps de lire un seul livre en-dehors de ceux requis ou conseillés au lycée. Cela peut paraître banal, mais deux ans, c'est long, et l'envie de lire s'étiole doucement. Fort heureusement, une amie (qui se reconnaîtra si elle lit un jour ces lignes) m'a offert deux petits livres de poche, deux cadeaux empoisonnés (dans le bon sens), car tous deux premier tome d'une série. L'un d'eux m'a fait découvrir La Ballade de Pern, saga sans génie mais remarquablement dépaysante et détendante. L'autre, eh bien, c'était La Stratégie Ender.

Voilà pour le premier point, sentimentalo(non je t'ai pas sonné, Eddy)-nostalgique si tu veux. Le second illustre mon côté "me faites pas ch*** avec vos modes, moi je fais toujours le contraire". Un poil agaçant, parfois, cet esprit de contradiction. Fatigant, aussi ; c'est tellement plus reposant de suivre le troupeau. Oui mais non, je suis un enquiquineur, j'assume. Ender, donc, a eu beaucoup de succès... pour son premier tome. Il se lit tout seul, on y retrouve tous les ingrédients de la soupe américano-mormone qui cartonne au cinoche, des gosses surdoués, une apologie de la vie militaire, un esprit d'aventure et d'initiative individuelle, un soupçon de mysticisme... C'est un très bon roman pop-corn, y'a pas à dire.

Le truc épatant, c'est que l'auteur a changé son fusil d'épaule pour écrire les tomes suivants. D'un seul coup, il s'est posé des questions existentielles, et son récit est devenu émouvant, profond, original. Le style a perdu un peu en homogénéité, mais dans l'ensemble, j'ai beaucoup aimé les tomes 2 à 4.

Manque de bol, ça a fait un bide commercial. Toutes proportions gardées, cela ressemble un peu à Dune : le public a été alléché par un premier tome très rythmé, et s'est senti paumé quand l'histoire a pris de l'épaisseur et que les nombreuses ficelles glissées dans le premier tome ont été tirées. C'est dommage, mais bon, c'est la vie ; je trouve ça plutôt bien qu'un auteur soit capable de faire évoluer un cycle de façon positive.

O.S. Card a sans doute un peu trop écouté les critiques (ou plus probablement son banquier), et les préquelles écrites par la suite m'ont vite lassé. Pas grave, je resterai sur Xénocide (le tome 4), ce qui permettra à Ender de ne pas sortir de mon top 20 SF avant un bon moment. :)

Fondation (2000)

Wouhlàlà ce que c'est compliqué de parler de Fondation... C'est un monument fondateur (oui je sais ça fait répétitif mais y'a pas de meilleur terme) de la SF, précurseur, visionnaire. Et accessible, comme tous les romans d'Asimov.

Il a beaucoup vieilli cependant ; plus exactement, les deux premiers tomes ont vieilli. Le cycle a été écrit sur une trentaine d'années, et cela se sent. Le contraste est encore plus frappant lorsque l'on lit les deux préquelles (Prélude à Fondation et L'Aube de Fondation, centrés sur Hari Seldon et la genèse de la psycho-histoire), puis que l'on enchaîne avec le tome 1, écrit presque 40 ans plus tôt. Scénaristiquement, il n'y a rien à dire, tout se tient, mais côté style, ça fait tout bizarre.

De ce fait, je ne peux pas conseiller la lecture de Fondation à quelqu'un qui découvre tout juste la SF ; les Robots conviendraient mieux, ou si l'on s'éloigne d'Asimov, les Slans de Van Vogt ou Ubik de Dick. Pourtant, il faut le lire, il faut absolument le lire. Les standards de la SF de la fin du XXè siècle ont tous repris des idées et rendu hommage à Fondation ; aujourd'hui encore, l'œuvre reste d'actualité. Peut-on manipuler les masses pour orienter l'avenir ? Quelle part de hasard intervient dans l'apparition de génies ? L'être humain est-il vraiment capable de se projeter dans l'avenir au-delà de sa propre existence ? Une conscience collective (type "ruche") peut-elle émerger d'une communauté humaine ?

J'aurais pu aller plus vite et dire que Fondation est un classique. Mais ce terme véhicule une connotation légèrement négative, du genre "moui ok tout le monde l'a lu, bah c'est pas pour ça que c'est bien, les Bronzés c'est un classique non ?". Hum. Alors j'ai préféré argumenter un peu. C'est un vrai bon classique, rogntudju ! ^^

Hyperion (2002)

J'ai tellement entendu parler d'Hyperion comme "le nouveau Dune" que j'ai été légèrement déçu en le lisant. Enfin, en le dévorant, plutôt, car il m'a captivé. Je me contredis un poil, non ?

Mettons de côté la comparaison avec Dune : elle a du sens, mais rien ne pourra jamais égaler le chef d'œuvre de Frank Herbert dans mon cœur. J'ai du sable d'Arrakis au fond des ventricules. Cela étant dit, il est clair qu'Hyperion est un magnifique space opera, complexe et profond, avec un poème (exquis) de Keats en filigrane et des thèmes qui rappellent inévitablement Dune : la souffrance, la divinité, la religion comme outil de pouvoir...

Côté histoire, c'est franchement trippant. La première partie (les Cantos) est sombre, introspective, angoissante, mystérieuse ; la seconde (Endymion) est plus légère, plus décousue aussi. J'ai préféré la première, mais comme je l'ai mentionné pour Ender, je trouve ça très bien qu'un auteur fasse évoluer son style au lieu de se cantonner à une recette qui fonctionne.

Mon seul petit regret concerne les personnages ; j'ai eu du mal à ressentir de l'empathie pour la plupart d'entre eux. Le Gritche a un... charisme indéniable ; Meina Gladstone est remarquable. Les pèlerins, puis Raul et Énée, c'est autre chose. J'ai prévu de relire l'ensemble du cycle en anglais pour voir si la traduction y était pour quelque chose, car je n'ai vraiment pas ressenti cette distance dans les autres romans de Dan Simmons.

Que cette réserve ne te dissuade pas pour autant de lire Hyperion ! Si tu hésites, commence par le cycle Ilium/Olympos, plus moderne et hollywoodien. Et ensuite, vas-y, lance-toi. Mais prends garde à ne pas finir empalé sur l'Arbre de la Douleur. ;)

L'Échiquier du mal (2002)

Mon premier contact avec Dan Simmons, auteur prolifique aux talents multiples. Tous les indices de ses succès futurs sont déjà présents dans L'Échiquier du mal : un thriller haletant, des aventures aux quatre coins du monde, une élite qui s'ennuie et sombre dans la pire des décadences, un héros juif... Il reprendra les mêmes recettes dans Hyperion, The Terror ou encore Ilium, tous passionnants. On ne change pas une équipe qui gagne.

Après avoir lu L'Échiquier du mal, Stephen King a déclaré que Dan Simmons était son meilleur concurrent en tant qu'auteur de romans à suspense. Je pense même que l'élève a dépassé le maître. ;-)

Mars (trilogie) (2003)

T'est-il déjà arrivé de rêver de quelque chose pendant des années, puis de découvrir que quelqu'un d'autre avait non seulement fait le même rêve, mais l'avait aussi couché sur le papier et développé au-delà de tes espérances ?

Coloniser Mars. C'est dans les tuyaux, aujourd'hui, en 2014 : des fonds privés se rassemblent pour envoyer un premier groupe de colons, avec une télé-réalité 24h/24 diffusée dans le monde entie, pour fédérer une population affamée et désespérée autour d'un idéal millénaire : repartir à zéro, ailleurs. Réinventer la société, les lois, les individus eux-mêmes.

J'ai rêvé de cela pendant toute mon adolescence ; du processus de sélection des futurs colons à la construction d'un village martien en habitats-bulles étanches avec cultures hydroponiques, en passant par ces terribles six mois de voyage en espace confiné. Et puis j'ai lu Mars la Rouge.

Souvent, quand tu te sens dépossédé d'une idée, d'un rêve, tu grognes, tu frises la jalousie. Là, pas du tout. Peut-être parce que ce rêve n'avait rien d'original : nous sommes des millions à entendre l'appel de la planète rouge. Mais surtout, K.S. Robinson a fait beaucoup plus que raconter un rêve : il l'a réalisé.

Dix ans de travail, en collaboration avec les meilleurs experts de la NASA : c'est ce qu'il lui a fallu pour accoucher d'un récit cohérent, détaillé, à la pointe de la science lors de sa sortie. Oui, attentions, Mars est un livre scientifique ; nous ne sommes plus dans la SF abracadabrante façon Star Wars, et même le grand Asimov est battu à plate couture. Mention spéciale aux cours intensifs de géologie martienne. J'adore.

C'est un roman pour amoureux de la connaissance, de la découverte, mais le plus remarquable à mon sens, c'est que l'histoire tient debout. Mars est colonisée, puis terraformée ; les enfants nés sur place sont différents des "terriens", aussi bien à cause de la gravité réduite que du fait des profondes transformations sociétales. C'est ce dernier point qui m'a le plus impressionné : l'auteur a réussi à dessiner l'évolution d'une société sur plus d'un siècle, une société dans un monde vierge et exigeant, mais toujours sous l'ombre lointaine d'une Terre tumultueuse. Politiquement et humainement, c'est un coup de maître.

En bref, si tu aimes Asimov, si Wikipedia est un de tes bouquins favoris, si tes trois mots préférés sont "bonjour", "pourquoi" et "comment", si ton cœur se serre quand tu lèves ton regard vers le ciel, n'attends plus. Mars la Rouge, Mars la Verte et Mars la Bleue t'appellent. :)

Des milliards de tapis de cheveux (2005)

Il y a des fois où cela fait sacrément plaisir d'avoir tort.

Je croyais qu'un space opera faisait forcément quelques tomes, 1200 ou 1500 pages minimum. Un peu comme un cycle de fantasy, mais en pire. Comment créer un univers, des planètes, des cultures, en 400 pages ? Comment entraîner le lecteur dans ce tourbillon si caractéristique ?

Et bam : Andres Eschbach, Des milliards de tapis de cheveux. Style impeccable, scénario machiavélique, c'est précis, puissant et efficace comme une voiture allemande (forcément). Et ça tient dans un misérable petit livre de poche tout rikiki qu'on lit en 3h chrono. Geez.

Je ne pense pas pouvoir t'expliquer comment l'auteur a réussi ce tour de force sans te révéler d'éléments-clés de l'intrigue ; il faudra donc me croire sur parole. C'est un roman à conseiller à tous, et en particulier à deux catégories de lecteurs : les anti-SF/fantasy (qui ont généralement la trouille du syndrome Roue du Temps, parfois à juste titre), et les amateurs de space opera fatigués ou débordés et qui hésitent à entamer un nouveau livre. Vois ça comme une friandise littéraire. :)

Perdido Street Station (2006)

Quelle surprise que ce livre !

Je n'étais pas particulièrement versé dans le steampunk, et je ne connaissais pas China Mieville. Ce sont des amis lecteurs sur un forum dédié à la fantasy qui me l'ont conseillé, et j'ai hésité quelques mois avant de m'y attaquer. Grosse claque. Une trentaine de pages pour plonger dedans (le style est ardu, en particulier en français), et ensuite, wouuuh...

Plus que l'histoire principale, plus encore que le style, c'est l'univers créé par Mieville qui m'a époustouflé. De nombreux fils scénaristiques ne sont que des amorces pour d'autres romans, parmi lesquels Les Scarifiés. Les Main-mises, la Fileuse, les Gorgones, les Artefacts, les sculptures de bave Khepri, mais où va-t-il chercher tout ça !? C'est terriblement exotique, et pourtant on s'y croit totalement, car Nouvelle-Crobuzon n'est finalement qu'une version baroque et déjantée de nos vieilles capitales européennes : l'Histoire et la souffrance se matérialisent et se mélangent à la crasse pour s'infiltrer dans la moindre fissure. Le message social est mordant et on ne peut plus contemporain.

La Horde du Contrevent (2007)

Tu as peut-être remarqué qu'il n'y avait pas beaucoup de livres français dans ma sélection. Ce n'est pas du snobisme, j'en ai lu, mais en SF et en fantasy, la création francophone n'est pas au niveau américain. Chacun ses points forts, je suppose. Pour la SF, on doit pouvoir l'expliquer de tout un tas de façons, mais pour la fantasy, cela m'amuse et m'intrigue toujours de voir que les plus captivants univers médiévaux sont créés par des citoyens d'un pays qui n'a pas connu de Moyen-Âge (au sens où on l'entend généralement).

Quoi qu'il en soit, s'il fallait ne retenir qu'un seul auteur français parmi les littératures de l'imaginaire, ce serait assurément Alain Damasio. C'est un peu notre China Mieville à nous : une plume exceptionnelle, une très grande culture (non américaine), un univers décalé, un engagement politique viscéral et passionné... Damasio est en-deçà de Mieville quant à la profondeur de ses histoires (mais qu'il est difficile de rivaliser avec Perdido !), mais son amour des mots et des bons mots donne un charme fou à ses écrits.

La Zone du Dehors était un premier roman surprenant, solidement bien écrit malgré une candeur politique un poil excessive. Damasio s'est ensuite donné dix ans, oui, dix ans pour écrire La Horde du Contrevent, et dès les premières pages on comprend pourquoi.

C'est une œuvre incroyablement ambitieuse. L'auteur donne une voix au vent, aux vents ; il invente un alphabet pour transcrire cette voix, et l'associe aux protagonistes de l'histoire comme autant de noms et de qualificatifs. Comme si la langue française ne suffisait pas - et pourtant, il la presse, il l'exploite jusqu'au bout, cette langue, il la fait briller comme un joyau qu'on tournerait sous le soleil pour trouver les moindres nuances de couleurs. Avec comme point d'orgue, s'il ne faut en citer qu'un, un concours de palindromes absolument phénoménal. Légendaire et jubilatoire. Un chef d'œuvre qui mériterait d'être étudié en collège parmi les classiques, pour éveiller le goût des lettres de nos chères têtes blondes (non, je n'ai rien contre les brunes).

Je ne veux pas résumer ce roman à ce brio stylistique : l'univers est très original, les personnages fascinants (mention spéciale à Golgoth et Caracole) et la fin très belle. Mais tout de même : c'est un des rares romans de fantasy que je conseille aux non-amateurs du genre, avec L'Assassin Royal et La Mosaïque de Sarance. Le cliché de la fantasy comme genre mineur pour écrivains ratés cède peu à peu du terrain... ;-)

Les Scarifiés (2009)

Il était évident que Perdido aurait une suite : l'histoire des principaux personnages avait certes trouvé sa fin, mais l'univers mis en place exigeait des développements. Il y en a eu deux à ce jour : Les Scarifiés et Le Concile de Fer.

Ce dernier se déroule encore partiellement à Nouvelle-Crobuzon et permet de retrouver certains vieux amis, comme les Main-mises et la Fileuse (ma préférée, tu t'en doutes si tu as lu Perdido), mais l'histoire a bien du mal à avancer et le récit souffre de certains défauts dans la construction. Les Scarifiés, au contraire, fait le pari de la nouveauté : nous explorons les confins de Bas-Lag, les immensités océaniques, et la politique crobuzonnaise n'est qu'un acteur distant, à l'image d'un empire colonial vu de l'autre bout du monde. L'action est trépidante, la description de la structure sociale de l'Armada est remarquable, et les seconds rôles sont particulièrement soignés, à l'image des Amants, ces illuminés qui dirigent l'Armada et donnent leur nom au roman. On se croirait dans une bonne vieille histoire de pirates, avec en prime cette "Mieville touch" qui agit comme un filtre Photoshop et fait surgir des couleurs bariolées et du fantastique là où l'on s'y attend le moins.

Ce qui est vraiment fortiche, c'est que tu peux lire Les Scarifiés sans connaître Perdido : ce n'est qu'un complément, utile pour saisir certaines subtilités. Bon, évidemment, tu liras les deux, parce que je t'aurai convaincu, mais tout de même...

... Je t'ai convaincu, hein ?

The Terror (2013)

J'ai déjà dit tout le bien que je pensais de Dan Simmons, aussi bien comme auteur de SF (Hyperion, Ilium/Olympos) que comme fils spirituel de Stephen King (L'Échiquier du mal). Je ne vais pas en remettre une couche, même si The Terror est un excellent roman à suspense.

Parlons plutôt du contenu. Eh oui, ce n'est pas juste une histoire haletante racontée avec brio. C'est d'abord une histoire vraie, du moins à l'origine : deux navires d'exploration arctique, dont le bien nommé HMS Terror, disparaissent corps et biens. La première partie relève presque du roman historique : une histoire de marins désabusés et d'explorateurs meurtris, en quête de gloire, dans un milieu hostile. Mais j'ai dit "presque" : une ombre plane. Une menace rôde, encore invisible mais bien palpable.

Et soudain, elle frappe. On ne sait trop qui ni pourquoi, mais quelqu'un, quelque chose extermine l'équipage, sournoisement d'abord, puis dans une débauche de violence. De nuit en nuit, les survivants se déchirent, cèdent à la folie (plus meurtrière encore que "l'ennemi"...). L'histoire se termine en boucherie.

Une autre commence. Elle patientait, sagement, la fin du carnage prophétisé. Et sans vraiment s'éloigner de cette rudesse, sans cesser de châtier les protagonistes, elle révèle la raison de tout ce drame, ce qui rend déjà plus supportable le souvenir de ces mois d'épreuves. Le désert arctique prend vie, prend corps. Le peuple inuit n'est pas le maître de ces terres : il sait qu'il n'est qu'un intrus toléré par des forces ancestrales. Mythologie et chamanisme s'entremêlent et transforment totalement le regard du lecteur sur cette contrée fascinante, sur le destin tragique des marins britanniques pris dans les glaces, et sur celui, plus tragique encore, d'une culture, d'une Histoire que la conquête industrielle a fini par terrasser.

J'ai toujours été fasciné par les peuples des déserts, sans doute influencé par Dune, et ce n'était pas par hasard que j'avais consacré beaucoup d'efforts aux Jubaari, aux Tollenn et aux Ilker parmi les peuples de Dreamaz. Les épreuves forgent les êtres, et vivre dans un environnement si peu hospitalier met inévitablement en valeur les qualités physiques et surtout morales des humains. J'ai retrouvé cela dans The Terror : une sagesse, un stade supérieur de conscience, et un tracé fin et précis de la condition humaine (oui, celle de Malraux) en harmonie avec son monde.

Hum, j'ai conscience d'écrire comme un hippie, ça doit être l'hydromel de ce midi. Lis ce livre, tu comprendras ce que je veux dire. Et tu ne verras plus jamais ta langue de la même façon. ^_^

La Terre Fracturée (2020)

J'ai lu pas mal de (belles) choses depuis 2-3 ans, mais c'est cette trilogie de N.K. Jemisin qui ressort nettement. Profondément moderne, inventive, féministe, captivante, c'est pour moi une œuvre majeure du XXIè siècle.

Le Seigneur des Anneaux (1992)

Je ne vais pas me faire que des amis, mais voilà : je ne recommande pas la lecture du Seigneur des Anneaux à tout un chacun. D'accord, c'est un classique de la fantasy et une immense inspiration pour des générations d'écrivains, de cinéastes et de rôlistes. Mais... Ce n'est pas une merveille littéraire pour autant.

Je crois qu'il y a deux cas de figure dans lesquels sa lecture vient réellement à point nommé. Le premier, c'est si tu es un amateur du genre : tu as lu Le Trône de Fer, L'Assassin Royal, La Compagnie Noire, et tu te demandes ce que tu vas bien pouvoir grignoter d'autre. Tu t'attaques donc aux seconds choix, aux sagas un poil moins originales ou ambitieuses (L'Arcane des Épées, La Couronne des Sept Royaumes, La Ballade de Pern), à celles un peu "adolescentes" (La Belgariade, Elric, La Romance de Ténébreuse), aux œuvres de fantasy historique (La Mosaïque de Sarance, Les Monarchies Divines)... Et là, l'attrait du Seigneur des Anneaux est indéniable. Tu lui pardonnes ses faiblesses, et tu l'acceptes comme un substitut, un palliatif en attendant Winds of Winter ou la suite des aventures du Fou et de Fitz.

L'autre hypothèse, c'est de découvrir le Seigneur des Anneaux au sortir de l'enfance, d'en faire une sorte de rite de passage vers l'âge adulte (du moins, ce que tu crois être "l'âge adulte" du haut de ton mètre trente). Le choisir comme "livre au choix" en classe, subir les remontrances (amusées ?) de la prof ("j'ai dit un livre, pas trois !"). Accepter les préjugés des "littéreux" et endosser, à tort mais par fierté, le costume du rêveur passéiste (le même dont on affuble les amoureux de reconstitution historique). Et enfin, rire sous cape, dix ans plus tard, en entendant des gens louer ou critiquer ce livre sans l'avoir lu, sur la base d'une adaptation ciné.

Tu l'auras deviné, j'étais dans ce deuxième cas, et ma jeunesse m'a permis de passer outre la lourdeur stylistique et les diverses incohérences. Ce n'est pas devenu mon roman favori : je l'ai lu entres les Robots et Dune. Forcément. Mais... Il arrivait au bon moment pour moi, et je n'aurais pas pu l'apprécier davantage. :)

Le Bateau ivre (1994)

Oh, je te vois venir avec tes questions. Keuuuuwa ? De la grande poésie en plein dans la "ligne" de la fantasy, genre si peu estimé des écrivains de la haute ? Rimbaud doit se retourner dans sa tombe !

Alors, primo, laisse Rimbaud tranquille, merci pour lui. Je crois qu'il doit avoir d'autres éléments d'inquiétude, parmi lesquels l'appauvrissement des langues et l'érosion des nuances dans nos divers moyens de communication.

Deuzio (oui, bon), ce n'est pas une ligne dédiée à la fantasy, nooon Môôôssieur, nooon Madâââme, le thème de cette série est l'imaginaire. Les œuvres qui y sont rassemblées sont celles qui ont le mieux stimulé mon imagination et ma créativité ; celles qui ont tissé la toile de mes rêves.

Et là, bim, voir Le Bateau Ivre ici prend tout son sens. Parce que, d'un côté, Rimbaud fut le premier poète à faire vibrer quelque chose en moi (Baudelaire m'a parlé davantage encore, mais plus tard, ce qui n'est guère étonnant). Et de l'autre, à côté de ces chefs d'œuvre presque mathématiques que sont Voyelles ou Le Dormeur du Val, eh bien Le Bateau Ivre explose les barrières et fait littéralement entrer la tempête dans ton esprit. Imagine si Bach avait écrit la 9è symphonie de Beethoven... Tiens, j'aime bien cette comparaison...

Je dis qu'il faut être voyant, se faire voyant. Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens. À coup sûr, Beethoven aurait approuvé.

La condition humaine (1997)

Comme beaucoup d'adolescents, j'étais assez peu réceptif aux classiques de la littérature que l'on nous assénait méthodiquement en cours de français. J'aimais lire, j'adorais lire, et je n'étais pas totalement insensible à la beauté de ces textes anciens ; ce qui me manquait, c'était la maturité. Je pense que l'on sur-estime beaucoup le degré de conscience individuelle, de recul et de capacité d'analyse d'un ado citadin des classes moyennes. A fortiori si c'est un garçon.

Anyway, j'ai bu à la fontaine de ces classiques et certains ont fait tilt quelques années plus tard (je pense à Baudelaire ou à Sartre) ; il y en a un, en tout cas, qui m'a plu tout de suite, et ce fut une vraie surprise. La Condition Humaine faisait partie des œuvres imposées l'année de mon Bac de français, et je ne crois pas trop m'avancer en disant qu'une grande majorité de mes amis préféraient Lorenzaccio.

J'ai un peu de mal à résumer en quelques mots ce qui m'a plu chez Malraux. Je crois que le point le plus important, c'est ce mélange entre roman politico-historique et réflexion philosophique : je me souviens d'avoir souvent pensé à Dune pendant la lecture. Les thèmes étudiés me parlaient ; ils faisaient écho à mon cheminement d'ado, à toutes ces questions existentielles que l'on peut se poser à 16 ans, plus ou moins consciemment. Je pense que ce livre me serait passé loin au-dessus de la cervelle si je l'avais lu un an plus tôt.

Enfin, il y a le style. Deux ans auparavant, j'avais trouvé en Balzac une sorte de modèle d'esthétique littéraire, un mètre-étalon de la qualité de style d'un texte. Malraux m'a fait réaliser qu'il n'y avait pas qu'une seule façon d'écrire merveilleusement bien. Ses ruptures, ses doubles niveaux de lecture m'ont scotché, et des rouages se sont mis à tourner dans ma p'tite tête. Pour plus tard.

La Ballade de Pern (1999)

Si tu connais l'œuvre d'Ann McCaffrey, peut-être t'étonnes-tu de me voir la citer parmi les Martin, Hobb, Cook et autres grands noms de la fantasy. C'est vrai qu'elle n'a pas cette envergure, ni sur le fond, ni sur la forme. Et pourtant...

La Ballade de Pern n'est pas une saga épique ; à la limite, on peut extraire 4 tomes qui forment une mini-saga, mais je ne suis pas partisan du saucissonnage pseudo-chronologique. Pern a été écrit sur plus de trente ans, et conçu comme une série de chroniques sur plusieurs siècles ; le lecteur est promené d'une époque à l'autre et les pièces du puzzle arrivent petit à petit. Remettre les romans dans un ordre "logique" gâche une grande partie du plaisir que l'on a à percer le mystère des Fils et l'origine des dragons.

Pern présente une société féodale idéale, dans laquelle l'équilibre entre Weyrs, Forts et Ateliers a quelque chose d'idyllique. Un peu comme dans La Romance de Ténébreuse, le peuplement de la planète est loin d'avoir atteint un niveau suffisant pour que la concurrence ait vraiment lieu : chacun a sa place, la guerre est impensable, et la vie est douce. C'est évidemment très éloigné d'une fantasy réaliste comme celle de GRR Martin, mais c'est justement ce qui fait son intérêt : on voyage, on s'évade, on pense à autre chose... Les personnages de Pern sont très humains, mais leur vie a tout du rêve, du conte de fées ; ils ne passent pas le plus clair de leur temps à comploter, à trahir ou à souffrir la loi d'un autre, ils chevauchent de sympathiques dragons, jouent de la musique, s'aiment, donnent la becquée à des bébés dragons... Enfin, ils s'éclatent, quoi.

Il faut vraiment lire Pern pour se (re)donner le moral, pour remettre en route les circuits de l'imaginaire dans une période où l'on a du mal à rêver, où nos nuits semblent réservées aux cauchemars. C'est une antidote à la morosité et à la triste banalité de nos quotidiens. D'autres romans peuvent remplir cet office, mais Pern est selon moi une référence. :)

Le Trône de Fer (2001)

Attention : chausse-trappe. Parler du Trône de Fer (ASoIaF pour les intimes) est devenu délicat, limite ringard, depuis qu'HBO en a lancé l'adaptation télévisuelle (assez réussie au demeurant). L'oeuvre de George R.R. Martin est devenue un passage obligé de la culture geek (dans son sens le plus large), un peu comme Tolkien avant elle. "Ouah l'autre, il a même pas lu les bouquins, trop naze le mec, il sait même pas que John Snow va se faire t..."

Bien sûr j'adore ce bouquin, ces bouquins. Bien sûr je pourrais en faire des tartines, tresser des lauriers à l'auteur, parler de tel ou tel chapitre... Mais des tas d'autres gens l'ont fait, non ? Si tu passes un peu de temps ici, c'est pour apprendre quelque chose, pas pour me voir bêler avec la meute. Pardon, aboyer avec les moutons.

Je vais donc proposer deux paragraphes sur le Trône de Fer : un pour ceux qui l'ont lu (A Dance with Dragons compris), un pour tous les autres. Et je vais commencer par ceux-ci (les derniers seront les premiers, tout ça).

Si tu n'as pas encore lu le Trône de Fer : Ne commence pas par la série. Elle est très bien, mais on l'apprécie beaucoup mieux en connaissant un minimum l'univers. Si tu as déjà un peu d'expérience en fantasy (Tolkien, Hobb, Feist, Vance...), vas-y, lance-toi. Sinon, commence par quelque chose de plus accessible, type L'Assassin Royal. Jette un œil au livre de recettes inspiré du livre (A Feast of Ice and Fire). Ce n'est pas du bête merchandising, à l'origine c'est une initiative de deux fans ; c'est un nouveau témoignage du regain d'intérêt pour la cuisine médiévale, et tu peux croire le gourmand que je suis, il vaut le détour. Mmmm, lemon cakes ! Et surtout, ignore les abrutis qui te prendront de haut quand ils apprendront que tu n'as "toujours pas" lu le Trône de Fer. Prends-les pour ce qu'ils sont : des snobs, victimes de la mode. ;-)

Si tu as lu tous les tomes déjà parus du Trône de Fer : Histoire de patienter jusqu'au tome 6, je vais te donner mon avis, le scénario que j'envisage. Je vais probablement me planter dans les grandes largeurs, mais c'est ça qui est drôle : il faut se mouiller un peu ! Attention aux spoilers donc. Ne lis pas la suite si tu n'es pas à jour. Pigé ? Sûr(e) ? Bon.

  • Le Roi de la Nuit patiente depuis 8000 ans et prépare soigneusement sa vengeance, peut-être accompagné de sa femme (qui pourrait bien être LE grand adversaire, mais bon, supposons que c'est juste le RdlN). Pour survivre si longtemps, il a un agenda de vampire : il dort beaucoup, se réveille de temps en temps pour contrôler l'état des humains, et chacun de ses réveils déclenche un "hiver" (cf Perséphone). Il y a une cinquantaine d'années, lors d'un hiver, il a manipulé un Garde de Nuit et lui a offert un deal très faustien : voici Craster. Mais il y a une douzaine d'années (bref, au dernier hiver), le RdlN a décidé de passer à l'étape suivante ; au lieu de ne prendre que les fils de Craster (pour en faire des soldats à son service), il a aussi exigé les filles, et tous les bébés nés depuis sont destinés à former la prochaine aristocratie, lorsqu'il aura conquis Westeros et devra confier à des vassaux la gestion des places fortes. Cette théorie explique pourquoi on ne voit aucune petite fille (0-12 ans) chez Craster. ;-)
  • Jon est amené à remplacer Stannis comme héraut (et héros) de R'hllor, c'est lui le véritable Azor Ahai réincarné. La théorie L+R=J (tu sais de quoi je parle, n'est-ce pas ?), vraie ou non, va convaincre Melisandre de changer de bord. Je vois bien Stannis tomber face à Roose Bolton.
  • Arya revient à Westeros régler ses comptes, et tue Jaime au moment où le lecteur s'apprête à lui accorder pour de bon la rédemption (il vient d'ailleurs d'étrangler sa chère sœur et d'accomplir la prophétie de Maggy). Elle échoue à tuer Gregor Clegane ; c'est Brienne qui s'en charge au prix de sa vie, Brienne asservie à Lady Stoneheart. (J'hésite entre cette hypothèse et celle qui verrait le Limier revenir tuer son frère, Gregor/Robert Strong, mais je meurs d'envie de voir une baston Brienne/la Montagne.)
  • En parlant de Sandor, il semble évident qu'il finira par retrouver Sansa et, a minima, lui faire un enfant ; il est probable qu'il parte ensuite au nord combattre le Roi de la Nuit, étant le dernier "vrai" chevalier survivant de Westeros. Sansa, elle, est la future Dame de Winterfell.
  • Barristan croise la route de "Septa" Lemore, alias Ashara Dayne, et retombe en adolescence : il trahit Dany pour elle (c'est lui, la "trahison par amour" annoncée par Quaithe), car elle est venue se venger des Targaryen qu'elle juge responsables de la mort de son frère, Arthur. Car Arthur n'est pas mort face à Ned Stark à la Tour de la Joie : Rhaegar lui avait demandé d'échanger leurs places afin de rester près de Lyanna. D'où les "promesses" (au pluriel) faites par Ned à sa douce frangine : protéger son bébé, bien sûr, mais aussi garder Rhaegar en vie. Ergo, l'envoyer au Mur, sous la surveillance/protection de Benjen. Mais Rhaegar, tout honorable soit-il, n'a pas abandonné son droit au Trône : il a donc fui au Nord et patiemment échafaudé son retour. Rhaegar est Mance Rayder ; marié à Elia (princesse de Dorne), puis à Lyanna (princesse du Nord), puis à Dalla et Val (princesses des Autres), il est le prétendant ultime, tout comme Jon après lui.
  • Les Autres sont en réalité une espèce très proche des Enfants de la Forêt ; leur atout, c'est une sorte de virus qui les rend résistants au froid et renforce le lien télépathique (type warg) entre eux, l'inconvénient étant que cela les met à la merci d'un super-warg mal intentionné. Oui, le Roi de la Nuit. Sam et Qyburn vont découvrir ce que Val sait ou pressent déjà : l'exposition à la léprose (greyscale) agit comme un vaccin vis-à-vis de ce virus transformant humains ou EdlF en Autres. Shireen et Rickon, futur couple princier du Nord (au-delà du Mur), vont donc être des acteurs majeurs de la grande baston finale.
  • Bataille à laquelle participera Daenerys, avec ses dragons, une armée et Tyrion comme conseiller. Elle s'est débarrassée de ses concurrents familiaux sur le chemin, et a éjecté les Fers-Nés du Trône de Fer (oui, Euron succède à Aegon - brièvement). Mais Dany finit par réaliser que Westeros n'est pas son pays : elle restera reine d'Essos, rebâtissant l'empire valyrien, sans esclaves. Westeros, Essos et Grand Nord seront trois empires stabilisés, beaucoup plus proches les uns des autres, et pourquoi pas membres d'une sorte de Conseil Mondial où Jon, Dany, Tyrion, Sansa et Shireen mangeront des lemon cakes en sirotant de l'hydromel deux fois par an. Hum. :)
  • La bataille finale se passera en plusieurs étapes : - le RdlN manipule Bran pour que celui-ci fasse "fondre" le mur (qui est une structure de glace sur une base de barrals/weirwoods) ; - son armée d'Autres, de spectres (wights) et de vilaines bestioles (araignées, etc) envahit le Nord et massacre tout sur son passage ; - cette armée affronte celle des humains survivants, incluant Dany, Jon, Tyrion... près de l'Île-aux-Faces ; grâce aux dragons, aux armes d'obsidienne et au "vaccin", les humains repoussent les Autres ; - dans le même temps, le RdlN a réveillé le dragon de pierre sous Winterfell et l'envoie contre ceux de Dany ; Bran livre une bataille spirituelle avec lui pour l'empêcher de changer de corps au moment où il tombe de son dragon, mettant un terme à son existence.
  • Mes prédictions sur cette fin de bataille sont encore floues, navré ; ce dont je suis sûr, c'est qu'on aura un combat de dragons, un combat d'armées et un duel mental. Possible que le RdlN survive au travers d'un enfant, comme l'imaginent certains (viol d'Arya par Roose...).
Au final, donc, Jon (marié à Val) règne sur Westeros, Dany sur Essos (avec Tyrion comme Main), Shireen et Rickon au-delà du Mur (qui n'est plus qu'une rangée d'arbres), et Bran le Vervoyant est le héros ultime et secret, le "Prince qui était promis". Qu'en penses-tu ?

L'Assassin Royal (2002)

Parmi les monuments de la fantasy moderne, trois grandes sagas sortent du lot : Le Trône de Fer, L'Assassin Royal et La Compagnie Noire. Elles ont joui d'un énorme succès, notamment auprès des non-initiés (surtout les deux premières), et chacune d'elle a placé la barre très haut dans son sous-genre. Certains sous-genres, justement, n'ont pas de telle référence : je pense notamment à l'heroic-fantasy qui attend toujours un Elric mieux écrit et moins immature. Bon, passons.

Avec L'Assassin Royal (et toutes ses suites et histoires annexes), Robin Hobb a écrit des romans d'aventure oscillant régulièrement entre l'épique et le sentimental ; la fantasy est un aspect secondaire : c'est avant tout le charme rustique des bourgades et campagnes médiévales qui procure un dépaysement, magie et dragons viennent bien après. Surtout, ces romans sont formidablement bien écrits (et traduits, du moins les premiers, merci Arnaud M-L !). C'est assez rare pour être signalé : on se régale à chaque page, même quand l'histoire n'avance pas. Un peu comme grâce à la musique ! :D

Robin Hobb n'est peut-être pas un écrivain (non, je n'écrirai pas écrivaine ni auteure, va te gratter, c'est de l'esthétisme, pas du machisme, nanméoh) aussi versatile que certains papes de la SF (Simmons, Mieville...) : ses autres romans ont un style très similaire et font penser à de pâles copies. Peu importe : en donnant vie à Fitz et au Fou, elle a fait voyager des millions de lecteurs comme très peu d'artistes ont jamais su le faire.

La suite (et fin) des aventures de nos héros préférés paraîtra en août prochain. N'essaie pas de me joindre pendant quelques soirées après la sortie, hein, je serai très loin.

La Tour Sombre (2004)

J'ai déjà dit ici ou mon admiration pour le talent de conteur de Stephen King. Il n'a pas la plume de Robin Hobb, mais il me fait penser à un chamane tenant sa tribu en haleine toute la nuit autour d'un feu mourant, en leur parlant de la naissance des étoiles, des murmures du vent et de comment Pépé Hérisson a trahi la confiance de Tatie Belette en des temps immémoriaux, déclenchant ainsi une impitoyable vendetta et expliquant la célèbre roublardise des descendants de celle-ci et la non moins fameuse paranoïa des rejetons de celui-là.

Stephen King fait ça mieux que personne. Il a pondu une soixantaine de bouquins grâce à cette recette : chapeau. Sauf que ce n'est que la partie émergée de l'ice cream : il a passé trente ans à travailler en parallèle sur un projet pharaonique, une sorte de méta-univers reliant bon nombre de ses histoires comme s'il ne s'était agi que de brins d'herbes dans les jardins de Versailles. Ce méta-univers, cette "histoire pour les réunir toutes", c'est La Tour Sombre.

Et ce n'est pas du suspense, de l'horreur ou je ne sais quoi de courant chez lui. C'est de la fantasy, de la grande fantasy, mâtinée de western. Ahurissant.

Je ne veux pas t'en dire trop sur le scénario ; sache simplement qu'il n'est pas nécessaire d'être un lecteur assidu de ses romans "classiques" pour l'apprécier. Cela fonctionnerait plutôt dans l'autre sens : La Tour Sombre te captivera tant qu'elle t'incitera à les (re)découvrir.

Alors soyons honnête (oui, je parle comme Napoléon si je veux, non mais tu vas arrêter de nous couper la parole là c'est pas possible ça pfff) : l'ensemble du cycle est inégal. Certains tomes font des flashbacks énormes (genre 600 pages), on sent que la bête a pris une ampleur folle au fil des années. Peu importe : accepte ces petits défauts, ils témoignent de l'évolution (assez remarquable) de la maîtrise de l'écriture de l'auteur. Le premier tome, Le Pistolero, est un OVNI, bref, lapidaire, sec comme un Charles Bronson en sevrage. Le dernier est une orgie de feux d'artifice, un final en apothéose avec plusieurs fins, juste histoire de jouer encore un peu plus longtemps avec tes nerfs. Oh il aime ça, le bougre.

Il n'est pas le seul !

La Compagnie Noire (2004)

Je ne pense pas que l'on puisse pleinement apprécier Sergio Leone si l'on n'a pas vu quelques westerns "classiques" ; idem pour H2G2 et Star Wars, ou le Disque-Monde et Tolkien. La parodie n'est pas qu'une simple pitrerie moqueuse ; certains maîtrisent cet art de façon si délicate qu'ils parviennent à sublimer l'original, à donner un sens supplémentaire, de nouveaux niveaux de lecture.

C'est exactement ce qu'a fait G. Cook avec La Compagnie Noire. C'est à la fois un hommage taquin et affectueux aux grandes sagas d'epic fantasy, et davantage que cela. C'est très drôle, et en même temps bien différent de T. Pratchett : ce n'est pas une farce, c'est une histoire sombre et machiavélique à souhait. Ce sont les personnages qui nous font sourire, en particulier lorsqu'ils prennent la plume et que leur mauvais caractère et leurs nombreux vices nous font oublier qu'ils n'existent pas vraiment. L'auteur réussit le tour de force de créer un univers complètement baroque et farfelu, peuplé de gens (plus ou moins mortels) comme toi et moi, comme ton voisin et ta belle-mère.

Qui plus est, il ouvre la voie à une nouvelle tendance en fantasy, qui explosera avec Le Trône de Fer : des points de vue multiples et centrés sur l'humanité des protagonistes, un scénario global cynique et complexe, et l'élément surnaturel relégué au second plan. On a passé le cap du "waouh un magicien qui lance des boules de feu", l'étrange fait partie du paysage et l'on peut enfin s'attaquer à l'essentiel : se servir de ces fragments d'imaginaire pour bâtir des contextes dans lesquels étudier, encore et toujours, les mystères de l'esprit humain et des relations sociales. Asimov a fait franchir ce cap à la SF au milieu du XXè siècle ; la fantasy a mis plus de temps à mûrir, et elle le doit en grande partie à G. Cook.

La Mosaïque de Sarance (2006)

J'ai déjà, je crois, mentionné ailleurs mon attirance pour la fantasy historique. Cela ne date pas d'hier, mais la pierre angulaire de cette passion, la référence en la matière, c'est La Mosaïque de Sarance.

Je vois deux raisons à cela : tout d'abord, c'est un roman formidablement bien écrit (et traduit). Une perle littéraire, pleine de poésie et de musicalité. Et puis... L'auteur réussit, plus encore que dans ses autres romans, à faire de l'Histoire (celle que nous connaissons, ou pensons connaître ; celle qui nous est parvenue) un personnage secondaire. Son livre lui est fidèle, la justifie, même ; mais il raconte tout autre chose. Une "petite" histoire, sans majuscule, et pourtant tout aussi fascinante. Et très émouvante.

Je peux difficilement t'en dire plus sans te gâcher la surprise, alors fais-moi confiance, tout simplement : lis La Mosaïque de Sarance, de Guy G. Kay.

Les Monarchies Divines (2008)

Contrairement à La Mosaïque de Sarance, cette saga prend l'Histoire à bras le corps : nous revivons l'affrontement militaire et culturel des deux grandes civilisations du Moyen-Âge, autour du Bosphore. Noms et géographie varient légèrement, mais qu'importe : nous y sommes. L'auteur alterne des points de vue de chaque côté de la ligne de front, et l'effet miroir est saisissant : impossible de réellement souhaiter la victoire d'un des deux camps tant ils se ressemblent, dans leur grandeur comme dans leurs travers.

Et puis soudain, de ce scénario de "dark fantasy historique" surgit une toute autre histoire, bien plus ambitieuse. L'Église se scinde en deux, un nouveau continent est découvert à l'ouest... Mais ce n'est pas ce que tu crois : l'uchronie prend de l'ampleur et révèle magie, vampires et mondes perdus. Il ne fallait pas se fier aux apparences.

Le plus épatant dans tout ça, c'est que l'on couvre plusieurs décennies d'Histoire, de grandes batailles très détaillées, des personnages torturés à foison et plein de rebondissements, tout cela en 5x300 pages. Un modèle d'efficacité et de concision !

Les Annales du Disque-Monde (2008)

Je ne suis pas très bon public dès qu'il s'agit de comédie. Peu de films me font rire ; encore moins d'humoristes. Il faut dégainer Desproges ou Devos, rien que ça. Ce n'est pas que je n'aime pas rire, au contraire, si tu m'as déjà rencontré tu dois savoir que je suis un joyeux luron ; c'est juste que je suis très exigeant en matière d'humour. J'ai besoin de finesse, d'audace et de style ; si c'est vulgaire ou "facile", je zappe. Je dois avoir quelques gouttes de sang british.

J'étais donc très prudent avant de m'immerger dans le Disque-Monde : sans mettre en doute la compétence de Terry Pratchett, je voyais mal comment un auteur pouvait pondre 30 ou 40 tomes d'une série de fantasy parodique sans céder à la facilité. D'autant que les premiers tomes étaient bons, assez originaux, mais sans plus.

Et puis, peu à peu, l'arsenal de personnages s'est enrichi et épaissi. Au lourdingue Rincevent ont succédé les membres du Guet et la Mort ; chaque tome est devenu une parodie d'un domaine bien spécifique de notre monde. Mention spéciale à Accros du roc et Le cinquième éléphant, deux des meilleurs épisodes de la série, truffés de clins d'œil savoureux.

C'est aussi un vrai plaisir de profiter de ces romans en français, grâce à l'exceptionnelle traduction de Patrick Couton : les jeux de mots et de style sont aussi jubilatoires qu'en VO, c'est tout simplement époustouflant.

J'ai tiré pas mal d'inspiration du style de Pratchett pour écrire certains roleplays, et encore aujourd'hui je ne peux résister, de temps à autre, à un petit délire très ankh-morporkien. C'est bien la preuve de la grande influence que cette œuvre aura exercée sur moi... ;-)

Tigane (2010)

Je voudrais dire plein de belles choses sur Tigane, mais je répèterais ce que j'ai dit sur Sarance... Il faut bien reconnaître que Guy G. Kay utilise toujours un peu les mêmes ficelles pour réussir ses romans de fantasy historique. ^^

Ce qui différencie Tigane selon moi, c'est tout d'abord qu'il s'éloigne, plus que tous les autres romans de l'auteur, de la réalité historique. Oui, il s'inspire de l'Italie de la Renaissance, et on reconnaît quelques détails comme la géographie (inversée) des Alpes ; mais pour le reste, c'est de l'imaginaire. Et surtout, l'auteur s'attache à nous offrir des personnages très justes et complexes, portés par une histoire particulièrement émouvante autour du thème de la mémoire. L'intrigue n'avance pas très vite, mais c'est tant mieux : on savoure chaque page passée en compagnie de ces personnages attachants.

Musique

C'est fou ce que je peux être accro à la musique. Nous avons tous nos vices, nos dépendances, nos faiblesses, nos exutoires... J'en ai plein. Apprendre. Manger des mets délicieux, boire de l'hydromel. Créer, découvrir. Et écouter de la musique. Des musiques. Tout le temps.

C'est moins nocif que la clope, moins coûteux que les bagnoles, mais ça reste un vice vu l'ampleur de la dépendance. Parce que je ne me contente pas de réécouter en boucle des œuvres connues : je dois explorer sans cesse. J'écoute entre 2 et 6 albums "nouveaux" (pour moi) par jour ; parfois je suis déçu, souvent j'ai le cœur tout chaud tant la découverte est belle. Comme un fix de drogue pure.

Cela demande un peu de temps, pour être toujours à l'affût des nouveautés, mais Internet est un outil fantastique ; la fibre optique apporte même un confort, un gain de temps rendant la tâche moins ardue que par le passé. Des milliers d'autres mélomanes passionnés cherchent, comme moi, la surprise permanente, et jamais la belle musique n'a été plus accessible.

Comme tu l'auras peut-être remarqué dans les "bubulles" émaillant ma frise, j'aime des musiques assez variées mais plutôt éloignées des courants "mainstream". Ce n'est pas du snobisme ; j'ai seulement beaucoup de mal à être agréablement surpris par le "son pop-rock" des années 2000 et ultérieures. Cela arrive, notamment dans le rock indépendant et l'electro, mais cela reste marginal. La richesse de ces musiques m'apparaît comme un grain de sable sur la plage du prog rock ou la galaxie du classique.

J'ai dit que j'écoutais de la musique tout le temps : c'est inexact. Un peu de silence est parfois nécessaire. Mais 10-12 heures par jour de musique, c'est un minimum. Je suis en manque quand je sors plus de 2 ou 3 heures (généralement je sifflote, je ne peux pas m'en empêcher, ce n'est pas très poli, navré). Le matin, dès le réveil, c'est classique "calme" (pas symphonique) pour démarrer en douceur (il est rare que je décroche plus que deux ou trois mots avant d'avoir lancé une playlist). Puis du classique plus intense, lyrique ou moderne, pour dégourdir mes neurones et fertiliser mes synapses. En milieu de journée, c'est l'heure du prog rock et des découvertes du jour : musique contemporaine, traditionnelle/ethnique... La fin d'après-midi se prête bien au jazz, ou à la musique sacrée selon mon humeur. Le soir, je fais selon le goût de mes auxiliaires de vie (les "anciennes" aimeront Marillion, Supertramp ou U2, tandis que les "gamines" apprécieront plus volontiers Morcheeba, Shaka Ponk et mes compils de lounge), puis je reviens à mes amours, jazz, prog et musique ancienne pour finir en beauté.

Et lorsque j'ai du mal à dormir, je mets les suites pour violoncelle ou l'Art de la Fugue de Bach, ou les sonates du rosaire de Biber, ou...

Getz/Gilberto (1991)

C'est étonnant comme certaines musiques résistent à l'épreuve du temps. Getz/Gilberto est un album simple, assez bref (moins de 35 minutes), sans prétention ; son successeur, Getz/Gilberto #2, va un peu plus loin, surfant sur le succès et le charme du live. Mais on est loin d'une super-production, même pour l'époque.

50 ans ont passé, et ces deux disques se vendent toujours aussi bien. Ce n'est pourtant ni Dark Side of the Moon, ni Thriller : c'est du jazz, et de la bossa nova (ou le contraire). Deux genres peu habitués à empiler les disques d'or. On peut même dire que le premier album a révélé la bossa nova au monde entier, et permis la (re)découverte des compositions de A. C. Jobim, V. de Moraes ou encore B. Powell.

Aujourd'hui, c'est un incontournable absolu de toute discothèque de jazz (ces deux derniers mots sont optionnels), parce que c'est un monument musical, oui, mais aussi parce que tout le monde aime ça. C'est rare, tout de même, un disque qui s'écoute aussi merveilleusement bien dans le noir en Hi-Fi pour voyager très loin, qu'en musique d'ambiance lors d'une soirée cocktail...

Ce fut mon premier CD, un bien beau cadeau, une pierre fondatrice en quelque sorte. :)

Genesis (1992)

Aw. Une autre page importante de mon ancien site, avec plein de blabla... Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage... :D

Genesis est mon groupe préféré en rock progressif, et plus largement en musique non-classique. Enfin, je ne sais pas pourquoi je fais la différence : pour moi, le prog rock est l'héritier direct de la musique baroque.

Tu t'en doutes, j'ai une nette préférence pour les deux premières époques de Genesis : l'ère Gabriel bien sûr, époque bénie où chaque morceau était un joyau, puis les années 76-81, moins homogènes mais avec tout de même beaucoup de belles choses. Je ne renie pas la suite, mais disons que je me serais contenté des morceaux longs (... non je ne fais pas un concours) et de quelques chansons moins "pop" que les autres.

Depuis 20 ans que j'écoute Genesis, j'ai fini par connaître les albums plus que par cœur, et par chercher autre chose ; au début des années 2000, de nombreux (et coûteux) échanges postaux m'ont permis de collectionner des bootlegs (enregistrements amateur), audio et parfois vidéo. L'enfant des 80's que je suis a ainsi pu découvrir Genesis dans son intimité, concert après concert ; écouter Gabriel conter des histoires délirantes et Collins faire un solo à une main pendant que Banks répare tant bien que mal son mellotron ; repérer les subtiles variations, d'un concert à l'autre, dans un morceau en cours de fignolage ; deviner Gabriel prendre littéralement son pied en étreignant le micro sur le final de Musical Box ; sourire bêtement en entendant le public chanter à tue-tête sur l'intro de Supper's Ready...

Avec le temps, et grâce ensuite à Internet et au peer-to-peer, j'ai accumulé une jolie collection de quelques centaines de concerts, souvent remasterisés par des fans aussi doués que dévoués. Les atomes crochus n'ont pas disparu ; bien au contraire, la relation est devenue de plus en plus fusionnelle. Si mes premières années de passion ciblaient avant tout la musique, les textes m'ont peu à peu imprégné ; et contrairement à bien des cas, comprendre les paroles n'a jamais brisé le charme. Le meilleur exemple est sans doute The Lamb, que j'ai connu en même temps que Selling England by the Pound, et qui a donc un peu souffert de la comparaison sur le plan musical : au fil des années, le sens des paroles et de l'album tout entier s'est révélé, et je n'ai fait que l'aimer davantage.

Peut-être veux-tu que nous partagions nos préférences, nos coups de cœur ; ok, allons-y, mais tu as intérêt à m'écrire, hmm ? :) Je vais citer un morceau par album, le choix sera parfois dur, mais il n'en sera que meilleur... ^^ Trespass : The Knife (joué par The Musical Box par exemple, quelle pêche !) Nursery Cryme : The Musical Box, pas trop le choix, c'est juste une tuerie en live... Foxtrot : Supper's Ready bien sûr, même si je reste indécis entre Gabriel et Collins pour choisir une "version idéale"... Selling England by the Pound : Firth of Fifth ; choix cornélien, album parfait, 8 chefs d'œuvre... je prends donc le morceau qui me donne des frissons à chaque écoute, sans exception, depuis 22 ans... mon Dieu, ce que j'ai pu être retourné, la première fois..! The Lamb Lies Down on Broadway : The Lamia, aboutissement d'une suite instrumentale qui restera toujours liée pour moi à des souvenirs d'hôpital (mais ce n'est pas négatif pour autant ; c'est une histoire compliquée, tu pourras peut-être en deviner la trame si tu connais le nom de la chanson précédente... ^^) A Trick of the Tail : Ripples (mmm ce live sur des enceintes de folie... brrr...) Wind and Wuthering : One For The Vine, un morceau épique parmi les nombreuses pépites d'un album splendide And Then There Were Three... : Many Too Many (... difficile à dire, cet album est vraiment moyen) Duke : Duke's Travels, surtout en live avec les watts qui crachent ! Abacab : Dodo/Lurker (et forcément je pense à Starcraft ^^) Genesis : Home by the Sea, le seul vrai morceau prog rock de cet album Invisible Touch : Domino, idem (même si The Brazilian est un instrumental bien sympa) We Can't Dance : Fading Lights le bien nommé (la concurrence est rude sur cet album !) Calling All Stations : One Man's Fool (album très homogène, pas simple de sortir du lot)

Mon seul regret : manquer de versions live pour pas mal de très beaux morceaux des années 70. J'apprécie énormément le travail de reconstitution des tribute bands (et en particulier The Musical Box), mais je serais encore plus heureux s'ils se décidaient de temps à autre à jouer Going Out to Get You, Visions of Angels, Dusk, For Absent Friends, Time Table, Aisle of Plenty, Mad Man Moon... Hummm... *étoiles dans les yeux*

M. Petrucciani (1998)

Tout l'intérêt du jazz est de s'adresser directement au cœur, sans passer par le cerveau ; le jazz doit être suffisamment irrationnel pour être bon. Cela ne veut pas dire que ça doit partir dans tous les sens et s'affranchir de toute cohérence - non, ça c'est faisable mais ça ne me parle pas des masses. Bien sûr qu'il faut des règles derrière tout ça, de l'harmonie, du rythme. S'il faut avoir fait 20 ans au conservatoire pour "comprendre" un morceau, c'est qu'il est raté.

C'est évidemment un avis très personnel. Quoi qu'il en soit, le jazz parle aux tripes, la part d'interprétation et de feeling me semble bien plus importante que dans la musique classique. Il faut vraiment "accrocher" avec le style du jazzman pour se laisser emporter, et cela n'a pas forcément à voir avec sa virtuosité technique.

J'aime bien Keith Jarrett, par exemple, mais sa musique ne résonne pas en moi ; je l'apprécie pour ses qualités musicales, et ça s'arrête là. C'est dommage, mais c'est le jazz. Idem pour Miles Davis, ce qui me frustre pas mal car je suis conscient du génie de ce type, j'aimerais réussir à me mettre sur sa longueur d'onde, mais pas moyen...

C'est tout le contraire avec Michel Petrucciani. Techniquement, ce n'est pas un des meilleurs pianistes du XXè siècle. Stylistiquement, il n'a pas non plus inventé des trucs incroyables, le jazz n'a pas vraiment exploré de nouveaux horizons grâce à lui. Mais chacun de ses morceaux est comme une lettre écrite à mon intention. Quand ses doigts caressent le piano, je souris, et je partage ce qu'il donne. C'est difficile à décrire. C'est vraiment un sentiment de familiarité, presque de confort ; j'ai l'impression d'écouter jouer un ami d'enfance.

Je ne sais pas si les épreuves qu'il a vécues y sont pour quelque chose ; je n'ai pas été influencé par sa vie dans mon appréciation de sa musique, en tout cas : je ne me suis intéressé à la personne que bien après avoir scotché sur plusieurs de ses disques. Possible que son expérience de la différence et de la lente déchéance aient marqué sa musique et que je m'y retrouve ; mais comment expliquer alors que le maître mot de son œuvre soit la joie ?

Je ne peux qu'admirer un artiste capable de transmettre ses éclats de rire, sa malice et sa sagesse dans sa musique...

N. Uematsu (1999)

Si tu joues, ne serait-ce qu'occasionnellement, à des jeux vidéo, tu as sans doute remarqué l'importance de la musique dans l'empreinte laissée par un jeu. Tu peux très bien t'éclater avec un bon jeu ayant une bande son moisie ; par contre, les jeux qui resteront dans ta tête longtemps après, ce seront quasiment toujours ceux dotés d'une musique marquante. Et si tu entends quelques notes de cette musique, pouf, magie, les images du jeu reviennent dans ta tête...

C'est une madeleine de Proust, tout à fait. Je n'ai pas honte de dire que j'écoute la musique de Zelda pour replonger en enfance. Ce qui est sympa, en plus de cette nostalgie réconfortante, c'est que certaines musiques sont tout bonnement remarquables, et c'est ce qui m'a amené à écouter régulièrement les compositions de Nobuo Uematsu.

Ce cher monsieur est le principal compositeur de la série Final Fantasy, en tout cas pour ses 9 premiers épisodes. Il a puisé son inspiration dans les musiques du monde entier pour créer des univers dépaysants ; sa principale force, c'est sa capacité à créer des thèmes, des mélodies associées à un personnage ou un lieu. Il en a composé des dizaines, tous plus harmonieux et entêtants.

Il a atteint le sommet de son art pour Final Fantasy VI, le meilleur jeu de rôle (au sens "console" du terme) de l'histoire ; l'évolution des capacités instrumentales des consoles lui a permis de réaliser des chefs d'œuvre pour le VII et le VIII, mais si l'on tient compte des limitations de la SuperNES, la bande son du VI est selon moi la référence absolue en matière de jeu vidéo.

Si tu n'as pas joué à ces jeux, le meilleur moyen d'apprécier le talent de Nobuo Uematsu est peut-être d'écouter les arrangements pour piano de ses musiques. Cela permet de s'affranchir de l'aspect "synthétique" des musiques de vieilles consoles, et de se concentrer sur le cœur de son talent : la mélodie.

Pink Floyd (2001)

Tout le monde connaît Pink Floyd. Un peu comme Genesis, c'est un groupe qui a su évoluer sur plusieurs décenniers, et survivre au départ de membres importants. Dans l'ensemble, l'œuvre de Pink Floyd me parle un peu moins que celle de Genesis : certains morceaux, certains albums sont vraiment du même niveau "émotionnel", mais il y a aussi pas mal de compositions que je qualifierais de "bon rock" (prog ou pas), sans plus. Bien sûr c'est subjectif, mais c'est le but de cette page, non ? Alors allons-y pour un tour d'horizon de mes coups de cœur.

Cela pourrait presque se résumer à trois albums. Atom Heart Mother, tout d'abord, et plus que tout autre : c'est à mes yeux le meilleur album de prog rock avec Selling England by the Pound. Il a bercé mon enfance : combien de fois ai-je réclamé "les vaches" ? Nul doute que mon attachement au rock progressif doive beaucoup à cet album. Beaucoup de floydiens le considèrent inférieur à Meddle ; pas moi. Peut-être parce que je ne suis pas exactement un floydien.

Le morceau-titre est juste monumental. En live, avec une section de cuivres et un chœur, pendant 31 minutes, c'est carrément orgasmique. Morceau compliqué à jouer et à programmer, donc peu de lives de qualité, mais ce qui est rare est cher... Un peu comme un Platinum de Mike Oldfield joué en entier et sans fausse note, on savoure l'instant et on le réécoute, encore et encore. Les autres pistes ne sont pas en reste, et quel regret, quel regret que Summer '68 et If n'aient pas eu leur place en concert...

Ensuite, il y a Meddle, bien sûr. Echoes est en quelque sorte l'aboutissement du processus créatif de The Man/The Journey et Embryo ; là encore, en concert, c'est stratosphérique. L'ensemble de l'album est étonnant, moderne, jazzy même. Un vrai coup de maître.

Enfin, Animals. Je te vois déjà hausser les sourcils : "quoi, tu n'as même pas cité...?" - je vais y venir. Animals est un magnifique album, très homogène, fortement instrumental ; je le rapproche un peu de Snow Goose de Camel. C'est une œuvre complète, autosuffisante, et assez différente de leurs autres albums.

Bien sûr, j'admire Dark Side of the Moon. Bien sûr, les ondes langoureuses de l'intro de Shine on You Crazy Diamond me donnent des frissons maousse. J'aime aussi beaucoup The Division Bell, que j'associe là encore à un album d'un autre groupe, We Can't Dance : ils ont beaucoup en commun.

Et puis je surkiffe (... pardon) Comfortably Numb. C'est le genre de morceau qui me vide totalement quand il se termine. Un peu comme la 9è de Beethoven, excuse-moi du peu.

Bref, je picore des joyaux à droite à gauche, à part dans trois albums dans lesquels je dévore absolument tout.

A force de me goinfrer de bonne musique, je vais finir par prendre du bide, hein...

Bach (2002)

Un mot me vient spontanément à l'esprit quand je pense à Bach.

On a tout dit sur ce génie, cette ferveur pédagogique, cette capacité à littéralement faire le tour des possibilités de la musique baroque, et même à aller un peu au-delà, discrètement, presque par jeu. Son œuvre colossale a permis l'éclosion du classicisme ; c'est en quelque sorte le père de générations de musiciens.

On a aussi beaucoup écrit sur ses œuvres sacrées, sur sa capacité à tutoyer le divin malgré l'immense carcan idéologique imposé par la papauté. Bach est l'exemple le plus éclatant de la capacité qu'a l'esprit humain de s'appuyer sur des barrières, de tirer une force supérieure des contraintes et des épreuves. Je suis convaincu que la rigueur de la musique baroque et son caractère mathématique ont été des atouts pour Bach. Confiné dans une cellule musicale de 3m², il a peint des fenêtres sur les murs et donné vie à un univers.

Tout cela a été dit, car tant de gens ont regardé vers le passé, vers lui, et cherché à comprendre le pourquoi et le comment d'un tel génie. Qu'on aime ou non sa musique, Bach inspire l'admiration. Et contrairement à Mozart, par exemple, que l'on qualifie volontiers de pur génie pour sa capacité à simplifier (pour l'oreille !) la musique, Bach évoque le labeur. La nécessité de maîtriser toujours davantage les formes musicales, le contrepoint, l'harmonie. L'impression d'équilibre qui se dégage de ses œuvres. Le côté "oh tiens personne n'a encore tenté un canon à 42 voix, je vais m'y mettre, ça devrait me dégourdir les méninges", aussi.

Non seulement j'admire un tel "maître", mais en plus, bien que non musicien, je me sens comme un élève. C'est idiot, non ? Au-delà des "simples" performances musicales, c'est comme s'il était un humain un peu meilleur que les autres à force de volonté et de travail, et nous invitait à suivre son exemple.

Ce mot qui me vient à l'esprit, c'est l'humilité.

Y. Mitsuda (2003)

J'ai déjà évoqué le formidable pouvoir émotionnel des musiques de jeux vidéo, lorsque j'ai parlé de Nobuo Uematsu. L'autre grand compositeur japonais dans cette catégorie, c'est Yasunori Mitsuda. Pardon pour les fans de Koji Kondo, mais Y. Mitsuda a une palette de talents bien plus large. ^^

J'aime tout particulièrement ses influences de musiques traditionnelles européennes : une guitare très latine forme la colonne vertébrale de l'ambiance sonore de Chrono Cross, et le scénario steampunk de Xenogears se trouve merveilleusement illustré par des voix bulgares (avoue, il fallait y penser).

Et puis la bande originale de Chrono Trigger est quand même mythique, tout autant que celle de Final Fantasy VI je pense. Pour un jeu de 1995, c'est impressionnant.

Un conseil si tu aimes le jazz : écoute Brink of Time, l'adaptation jazzy de cette bande originale. Elle vaut son pesant de cacahuètes.

Beethoven (2006)

À propos de Bach, j'ai évoqué la notion d'humilité. Le mot qui conviendrait à Beethoven, pour moi, n'existe pas en français, ou alors je ne le connais pas. Comme dirait Goldman, "ça ressemble à...", mais ce n'est pas tout à fait ça.

Il y a de l'admiration, sans le côté affectif que je lie normalement à ce mot. Une sorte de révérence, de fascination presque craintive. Une stupeur béate. Merde, je ne trouve pas le mot juste, ça me gonfle ! Le plus proche serait anglais : awe. Oui, Beethoven est awe-inspiring. Beethoven est awesome.

Le confort, la familiarité, la sérénité de Bach sont loin ; la légèreté et l'insouciance frénétique mozartienne aussi. Beethoven fait vibrer, trembler, éclabousser. Il semble fonder à lui seul le romantisme, et même Schubert ou Brahms ne sortiront pas de l'ombre du maître. Sa musique est puissante et virtuose à la fois, exigeante aussi bien pour l'interprète que pour l'auditeur.

Comme toujours sur cette page, je donne mon avis, je ne prétends pas imposer ma vision des choses ; je comprends que la musique de Beethoven ne plaise pas à tout le monde. C'est un peu comme pour Wagner, si ce n'est que pour ce dernier, je fais justement partie des sceptiques, des "non-émus". Alors que Beethoven me secoue. De façon tellurique, si j'ose dire.

J'aime beaucoup les œuvres pour piano seul, et j'adore écouter Chopin, Liszt, Debussy ou d'autres moins connus ; mais je n'ai pas trouvé l'égal des sonates de Beethoven. Jouées par Barenboim ou par Rubinstein, elles me remplissent. Oui, ma phrase s'arrête là, elles me remplissent, tout court.

Et puis la 9è symphonie surpasse tout le reste. Si je devais m'exiler sur une île déserte (berk, quelle horreur) et ne garder qu'une seule œuvre d'art, ce serait elle, sans hésiter. J'ai l'impression d'être quelqu'un de nouveau après chaque écoute. Elle me rend extatique comme un morceau épique de prog rock, et fait une sorte de reset de mes émotions dans les secondes de silence qui suivent son final. Pendant la symphonie, on dirait que la trame de l'univers laisse passer des rayons d'un paradis à mille dimensions, et qu'une fois cette faille refermée, une lumière impossible baigne tout autour de moi de reflets iridescents.

Je crois que mon neurone exploserait façon bombe H si j'écoutais la 9è symphonie sous LSD. Brrr, rien que d'y penser, j'en ai les poils de nez qui se dressent.

Camel (2006)

J'ai entendu quelqu'un, il y a quelques jours, dire que l'industrie de la musique était le pire nid de serpents qui soit, plus vicieux et agressif qu'Hollywood ou la Maison Blanche. C'était lors d'un documentaire sur Machiavel, ça vient de me revenir. Je n'ai jamais mis le pied dans ce milieu, donc je croirai cet intervenant sur parole, mais il faut bien reconnaître que certains musiciens absolument dénués de talent sont auréolés de gloire, tandis que d'autres finissent à tort aux oubliettes.

Camel n'est pas tombé dans l'oubli, certes, mais sa renommée est infiniment moindre que celle de Genesis, Pink Floyd ou même Marillion, alors qu'il boxe incontestablement dans la même cour. Ce qu'il lui a manqué, à mon avis, c'est un tube, un Follow You Follow Me, un Money ou un Kayleigh pour le faire connaître des foules.

Bon, honnêtement, on s'en fiche un peu, que Camel soit resté dans l'ombre. Tous les amoureux du rock progressif l'aiment, et c'est bien l'essentiel. Avec King Crimson, c'est probablement un des groupes "non commerciaux" les plus populaires du genre.

Pourquoi ces louanges ? Probablement parce que Camel incarne l'idéal du prog rock : de longs morceaux, souvent instrumentaux, très travaillés mais extrêmement mélodieux et accessibles, des solos de guitare tantôt langoureux, tantôt extatiques, un imaginaire teinté de nostalgie et de références culturelles évocatrices... L'album le plus connu du groupe est The Snow Goose, un album-concept instrumental, ce qui semble incroyable avec le recul.

Pour moi, il y a d'autres raisons à la renommée de Camel. Déjà, c'est un groupe durable : plus de 25 ans d'existence, beaucoup de changements de musiciens mais une continuité stylistique rarissime dans ce milieu. Oui, évoluer et se renouveler, c'est bien, et c'est admirable lorsque c'est réussi ; mais être capable de sortir un Rajaz à l'orée des années 2000, à la fois original et très fidèle au prog rock des années 70, je trouve ça tout aussi fort.

L'autre atout de Camel selon moi, c'est la qualité de ses musiciens. Les membres de Genesis par exemple, hormis Phil Collins et Steve Hackett, sont d'excellents compositeurs, mais leur jeu n'est pas infaillible. Le niveau technique des musiciens de Camel m'a toujours semblé particulièrement bon. Cela vient peut-être aussi du caractère non-exclusif de leur participation : tous ont contribué à d'autres projets (Happy The Man, Caravan, Jethro Tull...), et donc enrichi leur jeu et pris de l'expérience. Colin Bass en est l'exemple parfait, et puisque nous en sommes à parler de lui, jette une oreille à "3 Mustaphas 3", un groupe pionnier de la world music... dont il fut un des bassistes. Il est également devenu célèbre en Asie comme compositeur et interprète de musique traditionnelle indonésienne !

J. Savall (2007)

J'aime énormément la musique ancienne et baroque. Elle me fait voyager dans des territoires et des époques qui me fascinent ; et puis, d'un point de vue strictement musical, elle me correspond vraiment bien.

Ces genres musicaux ont été longtemps oubliés : il y a quelques décennies encore, on jouait volontiers du Mozart ou du Wagner, mais Josquin, Dufay, Dowland ou Palestrina gisaient sous des tas de poussières. Leur redécouverte fut heureuse, mais les premières interprétations étaient souvent très approximatives : on les jouait de façon romantique, ou avec un académisme exagéré, en négligeant totalement le contexte culturel de leur époque, la prononciation, le timbre des instruments anciens... Bref, les partitions étaient jouées au petit bonheur la chance, sans réel souci d'authenticité. Même Vivaldi était interprété n'importe comment (d'ailleurs c'est ce genre d'interprétations qui ont massacré les 4 Saisons dans la mémoire collective... hélas).

Que de chemin parcouru, depuis lors... Aujourd'hui, beaucoup d'artistes ont pris le parti d'une reconstitution soigneuse, en admettant le fait que nous manquons généralement d'éléments pour interpréter une partition ancienne (la notation n'était pas toujours standardisée, et à la Renaissance il était fréquent de composer sans indiquer quels instruments devaient être utilisés), et donc en s'imprégnant de la culture et des techniques de l'époque pour "sentir" la musique et la faire (re)vivre par une interprétation, non pas nécessairement fidèle, mais sincère.

Cette démarche a vu le jour grâce à l'impulsion et à la passion de quelques artistes de renommée internationale, et le plus influent et impressionnant de ces pionniers est sans doute Jordi Savall.

Je possède plus de 50 disques de lui, que ce soit en solo, avec son ensemble Hesperion, avec la Chapelle Royale de Catalogne, avec le Concert des Nations, ou encore en famille avec son épouse soprano, sa fille harpiste et son fils luthiste... J'aurais beaucoup de mal à t'en conseiller un plus que les autres. C'est une œuvre monumentale, qui couvre aussi bien la musique de cour médiévale espagnole, la musique traditionnelle séfarade, les troubadours, les œuvres sacrées de l'Homme Armé jusqu'aux Passions de Bach, et bien sûr le répertoire pour viole de gambe, de Dowland à Purcell, de Sainte-Colombe à Bach...

Comme Daniel Barenboim, Jordi Savall inscrit depuis toujours sa démarche musicale dans une entreprise de rapprochement des peuples ; ses nombreux enregistrements ne laissent aucun doute sur les liens étroits entre les traditions et les religions du monde entier. Il affirme, et je ne peux qu'approuver, que la musique est le meilleur instrument de paix qui soit ; paix entre les Hommes, mais aussi paix intérieure.

Et puis, pour ne pas te laisser croire que sa musique se résume à cela, je terminerai sur ce qui m'impressionne le plus chez lui : sa passion. Il aime férocement sa musique, cela se sent, s'entend et se voit. L'âge, la fatigue, le deuil, tout cela le touche, mais la flamme qui le pousse vers sa viole est intacte, et rien ne semble pouvoir l'arrêter. C'est bête à dire, mais je suis sûr qu'il continuera à jouer dans la tombe. Va le voir en concert, tu comprendras.

Marillion (2009)

Marillion, c'est en quelque sorte le successeur de Genesis. Un groupe qui a vécu deux vies, une première totalement "prog rock" où Fish est le digne héritier de P. Gabriel, présence scénique bestiale et torturée, textes terriblement profonds et sombres traitant notamment des maux de l'enfance... Puis une deuxième phase moins élitiste, portée par Steve Hogarth le troubadour lunaire, éternel adolescent, aux confluents de l'électro, de la pop et (toujours) du prog.

La longévité artistique de ce groupe est, pour moi, une référence absolue. Ni Genesis, ni Pink Floyd n'étaient encore inspirés et productifs collectivement 30 ans après leurs débuts ; Camel l'est un peu plus mais avec beaucoup de changements dans l'équipe. Marillion a su rester un groupe soudé, sans doute grâce à sa décision de s'affranchir des maisons de disque et de s'auto-produire, et même s'il tourne moins qu'avant (hé, ils ne sont plus tout jeunes), chaque concert est plein à craquer. C'est aussi un des premiers groupes à avoir misé sur Internet pour communiquer avec ses fans et diffuser sa musique. Savoir rester inspiré et à l'écoute du progrès après 30 ans d'une intense carrière est admirable.

Parmi mes morceaux favoris, citons Grendel (le plus beau des hommages à Supper's ready), Script for a jester's tear, This strange engine et Neverland. Quatre morceaux parmi le panthéon des œuvres de prog rock...

Machaut (2010)

De Guillaume de Machaut, je ne connaissais que l'origine (brave et fier champenois, avé cousin !) et la Messe de Notre-Dame, œuvre d'une portée historique phénoménale mais, avouons-le, un tantinet effrayante pour des oreilles peu averties. Je le trouvais donc fascinant mais légèrement distant, comme voilé par un brume de légende et d'ésotérisme.

Puis a surgi le Boston Camerata, de passage à Reims pour une série de concerts célébrant les 800 ans de notre belle cathédrale. Parmi ces concerts (tous splendides, fantastiques, inoubliables), un en particulier, consacré à Machaut, l'homme, le dernier des trouvères, le génie à la croisée des mondes musicaux, l'auteur d'innombrables œuvres profanes glorifiant l'amour courtois. Parmi ces œuvres, sa plus fameuse, sa plus personnelle aussi : Le Voir Dit ("la vraie parole"). Plus de 10000 vers virtuoses, narrant son improbable histoire d'amour avec Péronne d'Armentières, sa "toute-belle", douce demoiselle de 19 printemps tombée en amour à la seule lecture de ses poèmes.

Pendant une heure, Anne Azéma, Joel Cohen et leurs brillants compagnons m'ont transporté au beau milieu du XIVè siècle ; je n'ai pas rencontré Machaut : j'étais Guillaume, le chanoine vieillissant, désespérément amoureux d'une comète, faisant jaillir de sa plume un art incandescent pour retenir sa toute-belle. J'étais bouleversé comme jamais. Sidéré et terrifié par la puissance du génie dont l'amour transperçait ainsi les siècles. J'étais frappé par la foudre ; toutes les émotions qui avaient dû agiter Guillaume et Péronne lors de leurs échanges épistolaires coulaient à travers moi, m'inondaient, m'éreintaient. Le tonnerre qui crépitait au-dehors semblait prédestiné ; le public n'existait pas, les musiciens eux-mêmes n'étaient plus que des ombres. J'étais baigné de musique et d'une couleur hors du spectre lumineux, comme seul l'Amour sait en créer. J'ai voyagé...

                           Comment qu'à moy lonteinne                            Soiez, dame d'onnour,                            Si m'estes vous procheinne                            Par penser nuit et jour.                            Car Souvenir me meinne,                            Si qu'adès sans sejour                            Vo biauté souvereinne,                            Vo gracieus atour,                            Vo maniere certainne                            Et vo fresche coulour                            Qui n'est pale ne veinne,                            Vou toudis sans sejour.                            Comment qu'à moy.                            Dame, de grace pleinne,                            Mais vo haute valour,                            Vo bonté souvereinne                            Et vo fine douçour                            En vostre dous demeinne                            M'ont si mis que m'amour,                            Sans pensée vilainne,                            Meint en vous que j'aour,                            Comment qu'à moy lonteinne                            Soiez, dame d'onnour.                            Mais Desirs qui se peinne                            D'acroistre mon labour                            Tenra mon cuer en peinne                            Et de mort en paour,                            Se Diex l'eure m'ameinne                            Qu'à vous, qui estes flour                            De toute flour mondeinne,                            Face tost mon retour.                            Comment qu'à moy lonteinne                            Soiez, dame d'onnour,                            Si m'estes vous procheinne                            Par penser nuit et jour.
Vidéo

J'ai rattrapé une partie de mon retard en matière de cinéma, mais je reste très exigeant et difficile à satisfaire (pas que dans ce domaine, j'avoue). J'ai un peu de mal à dénicher des pépites visuelles, alors qu'en musique j'en trouve à la pelle. Mes satisfactions viennent bien souvent des séries, ce qui n'est pas très surprenant tant elles ont surpassé les films hollywoodiens en termes de créativité.

Mes séries du moment, donc :

  • Game of Thrones évidemment ; je passe d'ailleurs bien plus de temps à bavarder "théories" avec d'autres fans qu'à regarder les épisodes ;-)
  • Boardwalk Empire, ne serait-ce que pour le plaisir de voir naître le jazz
  • Mad Men, autre reconstitution remarquable
  • Shameless (version US), juste assez trash et cynique pour parvenir à me faire rire...

X-Files (1994)

Il y a des séries TV qui définissent une génération : tu as été ado à l'époque d'Albator, ou pas. Belphégor. Pokémon. Friends. Et puis il y a X-Files.

Non seulement c'était un phénomène qui rassemblait des millions de fans, c'était surtout une série novatrice qui a durablement influencé le paysage audiovisuel. Novatrice par les thèmes abordés bien sûr : complot gouvernemental, invasion alien insidieuse, conflit entre science et paranormal... On avait pu voir ces sujets traités individuellement dans d'autres séries (comme le Prisonnier), mais dans X-Files tout s'articulait assez logiquement (pendant les premières saisons en tout cas ; j'y reviendrai).

Le duo de flics antagonistes, ce n'était pas très original ; ce qui l'était, éventuellement, c'était l'évolution de leurs personnages, de leurs préjugés, et de la relation qu'ils entretenaient. Les effets spéciaux n'avaient rien d'extraordinaire pour l'époque, non plus...

Non, pour moi, ce qui a fait tout le charme de X-Files, c'est son ambiance ; dans chaque épisode, que l'histoire principale avance ou non, que l'on soit terrorisé ou plié de rire, on savait que l'on regardait X-Files, par la couleur, les ombres, la musique, les petites manies des deux héros... Dès la première saison, Chris Carter a réussi à imprimer un style original et attachant. C'est un peu ce que je ressens vis-à-vis de Stephen King, si tu vois ce que je veux dire.

Bien sûr, la série est loin de tout reproche. Les dernières saisons sont franchement mauvaises, et pour moi, il aurait fallu s'en tenir aux 4 premières, et s'abstenir de chercher une fin à l'histoire ; tout le monde ne peut pas réussir une sortie à la Breaking Bad...

Pulp Fiction (1995)

J'ai mis longtemps (pour un enfant des années 80) à aimer le cinéma. J'appréciais les bons films pop-corn, Star Wars, E.T... J'aimais aussi les belles ambiances, comme dans le Grand Bleu. Mais ce n'est pas tout à fait pareil que d'aimer le cinéma.

C'est venu petit à petit, au travers de rencontres avec des films pas comme les autres ; l'aboutissement de ce chemin n'aura pas lieu avant les années 2000, je pense. Mais le premier film à avoir fait tilt dans ma petite caboche, à m'avoir fait admirer le génie du gugusse derrière sa caméra, c'est Pulp Fiction.

Je ne te ferai pas l'affront de te faire l'éloge de ce film, je crois qu'il a reçu bien assez de louanges (méritées) et tu l'as forcément vu (plusieurs fois, non ?). Je l'ai vu ado, mais bizarrement je n'ai pas été choqué par sa violence ; c'est en le re-re-revoyant bien plus tard que je me suis dit "ouch j'ai vu ça à 15 ans !?". Par contre, ce qui m'a scotché et durablement marqué, c'est l'impression générale d'un travail d'orfèvre. Dialogues ciselés, scénario-puzzle qui s'emboîte au millimètre, acteurs stupéfiants (...), musique à tomber par terre... Oui, là, c'est certain, on ne se contente pas de raconter une histoire en usant jusqu'à la corde les ficelles du métier pour générer assez d'entrées et faire du beurre : c'est de l'art.

De l'art qui rapporte plein de sous, certes, et tant mieux ; par ailleurs, sans doute que Spielberg, Lucas & co sont un peu plus que des businessmen... Mais pour moi, Pulp Fiction a été le premier film à me faire changer d'avis sur le cinéma. C'est aussi un des rares films que j'ai pris beaucoup de plaisir à revoir. Il n'y en a pas beaucoup, des comme ça... ;-)

La Cité des enfants perdus (1997)

Je disais à l'instant de Pulp Fiction que c'était le premier film à m'avoir vraiment fait aimer le cinéma ; eh bien voici le deuxième. Pas du tout le même genre, tu en conviendras, et pourtant ils ont en commun d'être réalisés par un artiste avec une "patte" exceptionnelle.

D'ailleurs, je ne sais pas trop dans quelle mesure je dois porter Jeunet aux nues : tous ses meilleurs films datent de son association avec Caro. Il faut croire que ces deux-là avaient su créer un tandem aussi efficace que fertile.

La Cité est le film que j'ai le plus souvent revu, je dois en être à 6 il me semble. L'attachement que j'éprouve à ce film tient à sa qualité, bien sûr, à son univers onirique qui résonne fortement dans mon cœur, mais aussi à une nostalgie difficile à décrire, un manque de cette post-enfance marquée par Dune, par X-COM, et même par Lain d'une certaine façon (celle-ci a d'ailleurs quelque chose de Miette, maintenant que j'y pense). Je ressens régulièrement ce tiraillement vers l'arrière, comme un chant des sirènes m'invitant à redevenir un gamin émerveillé, et parfois, j'y cède.

Blade Runner (1999)

La science-fiction m'a toujours attiré. Mon envie permanente d'évasion et mon attrait pour les sciences m'y ont plus ou moins conditionné. Enfant, j'ai dévoré, bouche bée devant l'écran, Star Wars, Rencontre du 3è Type, etc. Même la Planète des Singes, bien qu'elle m'ait fait sérieusement flipper. ^^

Mais ça n'arrivait pas à la cheville de ce que je pouvais trouver dans les livres ; Van Vogt, Asimov et Herbert me passionnaient infiniment plus. Leurs mondes ont nourri mes rêves pendant des années. C'était ça, la "vraie" SF, pour moi.

Alors quand j'ai découvert Blade Runner, lors d'une diffusion TV sur ma petite télé 38cm, je me suis pris une des plus belles tartes de ma vie. Comprends-moi : je ne connaissais pas encore P.K. Dick. Je ne m'attendais pas du tout à ça. J'étais retourné. J'avais l'impression de ne rien avoir compris, impression qui m'a toujours terriblement excité...

Sans Internet à l'époque, il a fallu que j'attende une paire d'années pour choper un DivX (un de mes premiers), assez crade d'ailleurs, et revoir "la chose". Bon sang, mais, mais, c'est pas un film, ça, comment c'est possible ! Le genre de réaction que j'ai pu observer chez des potes quand ils ont découvert Matrix (qui m'a, personnellement, laissé sur ma faim).

Et puis j'ai mis la main sur la director's cut, et ça m'a semblé beaucoup plus clair (mais pas moins magique pour autant). Une director's cut bien mal nommée d'ailleurs, puisque c'est Ridley Scott lui-même qui avait charcuté le film dans sa première version - je ne comprendrai jamais comment il a pu créer un tel chef d'oeuvre, puis le dénaturer à ce point en post-prod. Bref, j'ai fini par comprendre (ou plutôt par réaliser ce que je ne pouvais pas comprendre), et je me suis littéralement plongé dans l'oeuvre de Dick pour voir s'il avait pondu d'autres pépites. Ahem : il en a écrit plein, et pour beaucoup, meilleures que "Do androids dream of electric sheep?" (qui a inspiré le film).

Voilà comment, une dizaine d'années après mon premier visionnage de Blade Runner, je me suis résolu à ne pas avoir de réponse à certains mystères existentiels, comme "pourquoi R. Scott a-t-il su créer une telle merveille à partir d'une banale nouvelle de P.K. Dick, tandis que personne ne parvient à adapter Dune ou Fondation ?".

Ou encore "pourquoi, mais pourquoi ne puis-je pas faire passer le test de Voight-Kampff à ********* pour révéler au grand jour son inhumanité ?" :P

Serial Experiments Lain (2001)

J'ai longtemps hésité entre reprendre partiellement mon ancienne page sur Lain et repartir à zéro. Cette page était une des plus abouties de mon ancien site, et les interprétations que je proposais me semblaient intéressantes à analyser avec le recul (oui ça fait plus de dix ans). Mais voilà, finalement, j'ai décidé de recommencer.

Comme pour mes autres bafouilles (hors parcours pro, et encore...), je ne vais pas t'expliquer en détail ce qu'est Serial Experiments Lain, ce que l'histoire raconte, etc ; tu peux trouver tout cela sur Wikipedia ou ailleurs, je n'apporterais rien de plus. Si ma page perso doit avoir un intérêt, c'est d'être subjective ; je vais donc me focaliser sur ce que je ressens vis-à-vis de Lain.

Je crois que tout être humain a un certain nombre de "liens" prédestinés, avec d'autres humains comme avec des objets. Je ne sais pas de quoi sont faits ces liens, peut-être ont-ils une raison d'être au niveau quantique, comme les liens philotiques imaginés par O.S. Card dans Ender. Peut-être est-ce de l'ordre du spirituel. Je ne sais pas non plus s'ils sont définis "au hasard" (cela ne plairait pas à Einstein), par des lois physiques hors de portée de notre compréhension, ou par un Grand Marionnettiste. Bref, je ne sais ni le pourquoi ni le comment, mais je suis convaincu que certaines rencontres sont vouées à provoquer un coup de foudre.

Les amoureux présents ou passés acquiesceront peut-être, mais ma "théorie" ne s'arrête pas aux élans amoureux, ni même aux relations humaines en général. Parce qu'imaginer des liens immatériels entre les êtres, ce n'est pas très original, je suis sûr que plein de gens le ressentent comme ça depuis longtemps. Non, là où je veux en venir, c'est que de telles "connexions" existent aussi entre une personne et un lieu, ou entre une personne et une œuvre d'art.

Il ne s'agit pas simplement d'aimer, d'adorer une œuvre. Je suis fou de Dune, je révère Bach, j'entre en transe en écoutant la 9è de Beethoven, et pourtant je n'ai pas la sensation d'avoir été prédestiné à les aimer, ni celle que ces œuvres ont été créées (entre autres) pour moi.

Il n'y a que deux œuvres qui provoquent ce sentiment de façon très claire : Serial Experiments Lain, et Firth of fifth (qui n'est même pas le morceau que "j'aime" le plus de Genesis !). Je ne suis plus le même homme depuis que je les ai rencontrées, et aujourd'hui encore, je ressens cette "découverte" comme un privilège.

Je ne me suis pas mis à réfléchir du jour au lendemain sur la réalité, l'intelligence artificielle ou la notion de divinité juste parce que j'ai vu Lain ; ces thèmes m'intéressaient déjà, notamment dans les livres. Lain a simplement pris une place centrale dans cette réflexion, et toutes les autres œuvres sont devenues des satellites, en quelque sorte. Les créateurs de Lain ont volontairement laissé la porte ouverte à de nombreuses interprétations, tout en suggérant la leur ; les théories que j'ai échafaudées au fil des ans me semblent trouver un écho dans ma vie personnelle, et j'ai souvent l'impression que Lain est là, quelque part, à m'observer de ses yeux omniscients, à se nourrir de mes tribulations d'homoncule, et à se retenir d'intervenir quand je fais n'importe quoi...

J'imagine bien que cette façon très personnelle d'envisager une relation à une œuvre risque de te faire hausser les sourcils. N'hésite pas à me dire le fond de ta pensée, à démonter méthodiquement le côté un peu mystique de mon interprétation, ou, qui sait, à me dire que ça ressemble un peu à ta vision des choses, mais que tu le formulerais plutôt comme ceci... Bref, j'espère te faire réagir. :)

Et pour en revenir à Lain, si tu fais partie des privilégiés à l'avoir vue et appréciée, je pense que tu veux connaître mes "théories", alors je vais les résumer en quelques lignes, rien que pour tes beaux yeux. (Si, si.) - La "classique" : en tentant de sauvegarder sa propre conscience dans les en-têtes d'IPv7, Eiri a permis involontairement l'apparition d'une IA, très puissante de par son étendue (autant de "neurones" que d'hôtes connectés au Wired), et dotée d'une conscience (née d'une sorte de mémoire collective humaine via la résonance Schumann). Cette IA, Lain, cherche à étendre ses connaissances sur les humains, et se crée donc un corps, une famille, etc, en guise "d'expérience" ; ce n'est qu'après avoir compris l'intensité et le potentiel des sentiments (Alice...) qu'elle atteint une sorte de maturité, et s'affranchit de la tutelle qu'Eiri tentait de lui imposer. - Les "layers" : ce fut ma première théorie. Lain existait avant Internet, c'est une entité vivant dans un plan de conscience (layer) différent du nôtre. Lorsqu'Internet est devenu Wired, il a relié entre elles les consciences humaines (ou les inconscients ?) via la fameuse résonance Schumann, créant un nouveau layer ; celui-ci étant bien plus proche de celui de Lain, elle a "senti" l'arrivée des humains dans son "voisinage", et s'y est intéressée. La suite ressemble à la théorie "classique" : création d'un corps (dans le layer d'origine des humains), etc. Cette théorie a le mérite d'expliquer pourquoi Lain (en tout cas celle du Wired) semble exister depuis longtemps. Elle diminue également l'importance d'Eiri : il n'est plus que l'architecte de la "route" entre les layers, et non le géniteur d'une quasi-divinité. - "L'illusion" : ma deuxième interprétation, ébauchée après mon premier visionnage puis renforcée après quelques années. La base est celle des "layers" : Lain existait bien avant le Wired, elle "sent" les humains arriver ; mais au lieu de "prendre chair" dans leur monde pour mieux les connaître, elle est un peu sauvage, ou très sage, et choisit la non-ingérance. En fait, elle crée (dans son immense "mémoire") une copie exacte d'une ville humaine, et la "fait tourner" comme un monde persistant sur un calculateur. Elle peut alors s'en servir comme bac à sable, aller et venir, ajouter, effacer, pour voir comment les humains réagissent... Et à la fin, trop attachée à ces êtres fragiles et émouvants, elle garde ce microcosme comme une sorte de vivarium (bonjour, Projet V). Le plan fugace dans l'épisode 13 d'une ville dans une bulle, façon Dark City, donne du crédit à cette hypothèse... Après tout, jamais, dans la série, Lain ne va à l'extérieur de cette ville, personne ne dit qu'il en vient, on entend parler du monde extérieur à la TV, mais c'est à peu près tout... Alors pourquoi ne pas imaginer que Lain (en tant qu'entité sans corps) a dupliqué cette ville terrestre, et non pas toute la planète, car ses capacités de calcul n'étaient pas suffisantes ? Et si l'on parle de capacités de calcul, on peut imaginer que cette entité est finalement un super-programme capable d'émotions et submergé par la mélancolie... Donc "l'illusion" peut prendre comme base la théorie "classique" et non celle des "layers" ! Huhu. - La "biblique" : voir en Lain une sorte de Jésus 2.0 peut s'accorder avec toutes les théories précédentes, mais on peut aussi en faire l'élément central. Lain serait alors la création d'un Dieu (figure du père de l'épisode 13), un avatar de lui-même, venu sur Terre pour délivrer les humains du Mal... c'est-à-dire d'Eiri. Bon, je t'avoue que je n'aime pas cette théorie, même si elle se défend bien ; elle est trop manichéenne, et plus les années passent, plus je pense qu'Eiri est secondaire, et que le "père" de Lain est soit une émanation d'elle-même (un interlocuteur fictif, une figure protectrice rêvée), soit un être distinct mais semblable à Lain (par exemple une entité de son "layer", ayant suivi avec amusement et tolérance ses "expériences" avec les humains et l'accueillant sereinement à son "retour").

Il y en a d'autres, plein d'autres. Le Wired est une création des aliens. Lain est un programme entièrement conçu par Eiri pour l'aider à conquérir le monde. Lain est Gaia, l'âme de la Terre. Etc.

Je ne pense pas qu'une théorie doive dominer les autres ; chacun doit y trouver son compte. Cela n'empêche pas Lain de nous livrer quelques réflexions assez universelles : si tu crois à quelque chose, alors cette chose existe ; si tu aimes quelqu'un, accepte de ne pas le comprendre ; l'être humain est défini avant tout par ses faiblesses.

Je te laisse méditer sur ces pensées. Avec un thé et des madeleines, hmm ? <3

Usual Suspects (2002)

Au risque de répéter en partie ce que j'ai dit de Pulp Fiction, j'ai aimé Usual Suspects pour deux raisons : le scénario nous mène en bateau de façon magistrale, et habituellement je ne suis guère attiré par les polars.

Ce film m'a donc ouvert les yeux sur le potentiel de ce genre cinématographique ; bref, après l'avoir vu, je me suis senti un peu moins con. C'est toujours ça de pris, non ? ^^

Texhnolyze (2003)

Je pense qu'il faut avoir vu et apprécié Lain pour profiter pleinement de Texhnolyze. Les histoires ne sont pas liées, mais les points communs abondent. Même fine équipe créatrice, même structure narrative, même profondeur métaphysique...

L'univers de Texhnolyze est, a priori, beaucoup plus sombre que celui de Lain ; il fait immanquablement penser à Dark City (que l'on devinait déjà lors d'un clin d'oeil du dernier épisode de Lain), à Blade Runner ou même plutôt à Minority Report (qui n'existait pas encore en film, hum). Bref, les thèmes majeurs de la SF ont été digérés, assimilés, "dégradés", et la série nous plonge dans une atmosphère oppressante, décadente, cynique et désespérée.

L'exploration du thème des cyborgs (humains modifiés) est remarquable, sans fard, concrète. Le personnage de Ran rappelle évidemment celui de Lain, enfant-prophète, fragile mais omnisciente. La violence suggérée dans Lain est ici visuelle, sensorielle, et certains passages sont éprouvants pour le spectateur. C'est une œuvre moderne, engagée, "révolutionnaire" à plus d'un titre.

Et lorsque le dernier épisode s'achève, un peu comme pour Lain, on se sent vidé ; la tête pleine de questions, certes, mais physiquement creux. Un peu à l'image de la progression musicale, qui nous emmène du fabuleux générique de Juno Reactor (brrr quels frissons) à une mélancolie finale absolument transperçante.

Texhnolyze, c'est une œuvre à part, testamentaire, pour un public amateur et averti. Je me doute que dit comme ça, ce n'est pas très engageant, mais je compte sur ta curiosité pour oser.

Gankutsuou (2006)

Il m'a fallu quelques années pour retrouver une série d'animation japonaise pour prendre la relève de Lain et Texhnolyze. Bon, à vrai dire, je n'ai toujours pas trouvé de digne héritière - mais j'ai tout de même eu un vrai coup de coeur pour Gankutsuou.

Ce n'était pourtant pas gagné : adapter le Comte de Monte-Cristo à la sauce SF, avec des vampires et une vision ultra-kitsch de la culture française, ça sentait bon la parodie à prendre au 42è degré. Oui mais non : les concepteurs de cette série ont bien ficelé la chose, et ont enrobé ça dans un style graphique tout simplement bluffant. Pendant les premières minutes, tu te demandes où tu es tombé, tu vérifies que ton téléviseur ne bug pas... et puis la magie opère.

Décidément, la vieille Europe inspire toujours autant les Japonais. La France post-apocalyptique de Gankutsuou fait écho à celle, contemporaine, de Noir et à l'Allemagne de Monster ; à chaque fois, l'ambiance délicieusement rétro et décalée joue avec nos émotions et nous captive plus encore que l'histoire.

Game of Thrones (2011)

Adaptation télévisuelle du Trône de Fer (A Song of Ice and Fire), cette série démarrée en 2011 fait un tabac, et pas seulement auprès des fans de littérature médiévale/fantastique. Qu'est-ce qui la rend si intéressante, au point d'être la série la plus piratée de l'histoire (loin devant des chefs d'oeuvre comme Breaking Bad ou des blockbusters comme Dr House) ?

Je ne vais pas revenir sur la qualité du livre. Oui, bien sûr, c'est une histoire passionnante, assez bien ficelée, avec une galerie de personnages absolument formidable (moui, j'ai mis au singulier, car certes les personnages sont formidables, mais la galerie aussi l'est, formidable, ils sont tous formidables, nous sommes formidables, mes amitiés à Jack Lang et Stromae). Mais c'est tellement facile de faire un navet à partir d'un bon bouquin (et inversement, parfois) que l'argument ne tient pas.

Le premier point fort de cette série est donc la qualité du screenplay. Weiss et Benioff, les responsables de ce long et subtil travail d'adaptation, n'avaient pas fait de merveilles dans leurs carrières respectives jusqu'en 2011 ; il faut les saluer, car ils ont su trouver le juste dosage entre fidélité aux romans et nécessaires transformations. Chaque saison s'éloigne un peu plus de l'histoire originale (essentiellement pour limiter le nombre de personnages secondaires), mais l'esprit est intact et la progression de l'intrigue reste cohérente.

Deuxième point essentiel : les acteurs. Si Sean Bean ne m'a pas convaincu en Ned Stark, il était manifestement là pour attirer la lumière (et les haches), et donner du cachet à la série. Les rôles les plus intéressants ont été tenus par des acteurs relativement moins connus. Mes principales satisfactions, par famille : - Stark/Nord : Maisie Williams (il faut reconnaître qu'Arya est un personnage très attachant, mais hum, l'actrice aussi...), Rose Leslie ("you know nothin', Jon Snow" <3), Michael McElhatton (très bon Roose Bolton) et Kristian Nairn (Hodor ! Hodor !) - Lannister : Jack Gleeson (ce Joffrey mérite autant d'Emmy que de baffes), Nikolaj Coster-Waldau (si j'étais gay j'irais bien lui beurrer ses tartines), Lena Headey (même si son personnage est nettement plus nuancé et intéressant dans les romans), Charles Dance (parfait Tywin) et surtout Peter Dinklage bien évidemment, impérial, la star du programme ^^ - Baratheon : Liam Cunningham (j'adore Davos...), Kerry Ingram (elle donne une vraie épaisseur à Shireen, peu développée dans les livres) - Greyjoy : Patrick Malahide (sombre et cruel Balon), Alfie Allen (très bon Theon... pauvre garçon... ahem) - Targaryen/Essos : Jason Momoa (épatant Khal Drogo), Iain Glen (il joue tellement mieux qu'Emilia Clarke que ça fait un peu mal aux yeux, heureusement qu'elle a ses dragons...) - autres : Rory McCann (le Limier est un personnage hors-normes et il en est à la hauteur), David Bradley (Walder Frey dans toute sa splendeur, plus infâme encore qu'à l'écrit), Conleth Hill (si Littlefinger me déçoit dans la série, Varys est lui impeccable)

Je n'ai cité que mes préférés, hein.

Dernière clé du succès, et non des moindres puisqu'elle conditionne les deux premières : l'argent. HBO sait mettre les petits plats dans les grands. Pour une série TV, visuellement, on prend une claque. Les dragons sont parfaits, les décors sont à se décrocher la mâchoire (d'ailleurs c'est peut-être de là que viennent mes problèmes de larynx, vous en pensez quoi docteur ? lol), même les loups (trop peu utilisés à mon goût) sont assez bien rendus. C'est Rome, en encore mieux. L'argent ne fait pas la qualité d'un film ou d'une série (il n'y a qu'à voir le nombre de daubes intergalactiques, genre Marvel, qui sortent chaque année avec des effets spéciaux à 100M$), mais quand on donne à des gens compétents et inspirés les moyens de leurs ambitions, ça peut faire des étincelles.

Et dans Game of Thrones, ça fait des étincelles !

The Wire (2012)

Nous sommes fin 2012 : je me retrouve bien malgré moi avec du temps libre, et un cerveau à occuper pour éviter la déprime totale pendant les longues soirées d'hiver. Je me (re)mets donc à voir des films et des séries, en grande quantité.

J'ai toujours été exigeant, donc je fais un tri préalable ; je garde tout de même des dizaines de films à voir. Peu me marqueront vraiment, d'où l'absence de contenu à ce sujet sur ma page ; côté séries, quelques belles découvertes, comme Mad Men ou Breaking Bad, mais la première à m'avoir tapé dans l'œil (aie), c'est The Wire (Sur écoute en français).

Beaucoup la considèrent comme la meilleure série TV de l'histoire. Je partage cet enthousiasme, cette admiration : avec des moyens limités et une base on ne peut plus classique (les tribulations d'un groupe de flics dans des quartiers pauvres), D. Simon et sa bande ont réinventé le genre, introduit l'ultra-réalisme dans les séries policières, et dépeint la misère sociale et les absurdités d'un système en bout de course avec une précision documentaire... sans s'abstenir de véhiculer une immense tendresse pour leurs personnages, flics ou voyous, ripoux ou paumés.

The Wire est une œuvre d'une humanité confondante. Les rouages de la société apparaissent à l'écran avec une clarté presque pédagogique ; d'ailleurs, c'est probablement la saison 4, centrée sur le système éducatif de Baltimore (et sur ces générations de gamins sacrifiés), qui s'approche le plus du sublime et prend le spectateur aux tripes.

C'est aussi là que l'on peut trouver le seul défaut de cette série : à être si réaliste, si cruelle et clairvoyante, elle a rebuté une immense majorité du public américain, peu habitué à ce qu'un poste de télévision le pousse à se remettre en question aussi violemment. The Wire a séduit l'Europe et les critiques, mais son message est resté lettre morte dans sa patrie, un peu comme son successeur, l'extraordinaire Tremé. Pour cela, j'hésite à la qualifier de "meilleure série de l'histoire" ; trop parfaite peut-être...

Breaking Bad (2013)

Le choix de présenter cette page sous forme de frise chronologique m'a semblé original et plutôt sympa, mais cela pose quelques petits dilemmes ici ou là. Il y a des périodes de ma vie où j'ai beaucoup lu, par exemple, et je dois parfois faire un choix drastique, en laissant de côté des œuvres importantes pour moi car "l'année" est déjà prise. Je peux de temps en temps tricher un peu, en comptant un livre lu en décembre pour l'année suivante, mais cela reste marginal, je tiens à la cohérence de tout cela : après tout, le principal intérêt de cette frise est selon moi de te permettre de comprendre comment je me suis construit, comment ces rencontres culturelles et professionnelles ont fait de moi le gugusse que je suis aujourd'hui. En d'autres termes, la route empruntée compte autant que les étapes ou l'arrivée.

Un tel choix cornélien s'est donc posé pour les séries vues en 2013. Après plusieurs années passées à travailler jusque 23h30 6 jours sur 7, je me suis retrouvé fin 2012 à m'enquiquiner royalement le soir ; au début, j'ai bouquiné, mais le poids des ans s'est rappelé à moi, et j'ai découvert avec tristesse que je n'étais plus capable de lire 2 heures chaque soir (sur ma télé, en ebook, et en anglais - ça joue aussi). J'ai donc cherché une occupation moins fatigante. J'ai commencé par The Wire, ciblant la série la plus encensée par la critique pour ne pas non plus anesthésier mes neurones, et j'ai (re)découvert le plaisir d'être agréablement surpris par une série TV américaine...

Puis, au fil de l'année 2013, j'ai en quelque sorte rattrapé mon retard, après avoir réalisé que non, The Wire n'était pas la seule production digne d'intérêt. J'ai adoré Boardwalk Empire et Mad Men, deux fenêtres sur un passé proche, chacune avec un style raffiné, un souci du détail que j'apprécie tant, une excellente bande son... Ces deux séries auraient amplement mérité une "étape" dans ma frise. Elles faisaient face, cependant, à une rude concurrence : Tremé, qui m'a touché droit au cœur, et Breaking Bad.

Cette dernière est probablement l'archétype de la série idéale en ce début de XXIè siècle. Elle a réinventé et sublimé le thème de l'anti-héros, poussant le concept à la limite de l'imaginable. Elle a donné naissance à des seconds rôles de légende. Son scénario est d'une logique implacable, alliant la malice d'un Usual Suspects, le rythme haletant d'un DeathNote (que je placerai toujours bien au-dessus de 24) et l'esprit du film noir.

Chaque saison est plus puissante, plus extrême, plus jubilatoire que la précédente, et la série se conclut lors d'un final qui, dès l'instant de sa diffusion, a déclenché un torrent d'éloges, notamment parmi les professionnels. Il est très rare qu'une série réussisse sa sortie ; la pression était immense, et Breaking Bad a relevé le défi haut la main.

D'une idée assez bizarre et pas franchement fédératrice (un chimiste qui a raté sa vie se découvre un cancer avancé et devient baron de la drogue pour régler ses comptes avec lui-même), V. Gilligan a créé un véritable chef d'œuvre, à montrer dans toutes les écoles de cinéma. Une Gesamtkunstwerk audiovisuelle d'une cinquantaine d'heures, qui fera date dans l'histoire de la TV.

Tremé (2013)

J'écris ces lignes quelques heures après avoir vu l'ultime épisode de Tremé, alors je t'en prie, pardonne mes probables excès de lyrisme.

J'aime Tremé. Vraiment, à donf. Je suis béat d'admiration devant cette série, et j'en veux au monde entier de ne pas lui avoir offert le triomphe qu'elle mérite et qui, surtout, aurait convaincu HBO de financer quelques épisodes de plus. Ce n'est pas vraiment une question de nombre, c'est juste que je ne veux pas que ça s'arrête, un peu comme on est heureux de voir une vieille légende du jazz monter sur scène une fois par an pour dire coucou. Juste une fois de temps en temps, pour éclairer nos existences.

Le parallèle avec la musique n'est pas innocent, évidemment : c'est le cœur de la série, ainsi que ses poumons. Elle nous fait vibrer, danser, pleurer (pas forcément de tristesse), elle rythme la vie des héros (non, je ne mettrai pas de guillemets, ce sont de vrais héros, je vais y revenir), cadence le pas des cortèges funèbres et donne la mesure des "second lines". Et chaque fois que l'histoire pourrait s'enliser (comme elle le fait dans la vie des gens ordinaires, non ?), c'est toujours elle, la musique, qui insuffle l'oxygène, l'air pur, qui brasse les cultures comme autant d'atomes, et nous "regonfle" à bloc.

On pourrait croire (comme l'à-peu-près-totalité du public américain) que Tremé est une chronique de la vie ordinaire d'une dizaine de gens "représentatifs" des vieux quartiers de la Nouvelle-Orléans, après le passage de Katrina. C'est le résumé que l'on est tenté d'en faire, si l'on reste aveugle ou plutôt sourd face à la magie. Non ! Tremé ne parle pas de gens comme toi et moi. Tremé nous présente des personnes qui ont été touchées par la grâce de la plus belle ville du monde.

Oui, bien sûr, je parle de beauté intérieure, car Katrina n'a été qu'une énième vague de démolition et de corruption abattue sur la Nouvelle-Orléans. Peu importe. "This city won't wash away..." : rien, pas même la pire sclérose du système fédéral américain, rien ne peut empêcher les murs de cette ville de suinter la musique. Elle est partout, vissée au corps des habitants, ancrée dans leurs habitudes les plus banales. Elle résonne du matin au soir, du soir au matin.

Après The Wire, D. Simon nous montre à nouveau son talent pour montrer le génie au milieu de la misère, l'espoir en pleine violence. On n'épargne rien au spectateur sous prétexte de lui offrir une vision idyllique, non, bien au contraire, les paradoxes de l'âme humaine lui éclatent en pleine figure et lui interdisent tout jugement. Il n'est pas envisageable d'aborder Tremé sous un prisme manichéen ; chaque personnage est profondément faible et lumineux, chacun porte à sa façon l'héritage de cette cité et son destin à venir. On ne peut que les admirer, même en sachant que c'est la ville qui en a fait des héros, qui leur a transmis cette étincelle.

Chaque spectateur aura ses préférences, bien sûr. Big Chief Lambreaux pour son charisme, son cuir d'ours à plumes d'un autre millénaire. Davis pour ses facéties et sa foi. John Goodman plus gigantesque que jamais. LaDonna pour son feu, pardon, son brasier intérieur. Ils sont tous épatants, humains et encore plus que ça. Mon vote irait à Jeannette Desautel, à la fois pour son personnage (dont je ne peux que me sentir proche), pour l'actrice (délicieuse comme un gumbo), et parce qu'elle donne une place de choix à l'art culinaire dans une série dominée par la musique. Bon son, bonne bouffe, jolie fille : rien ne me manque, c'est parfait, merci, je dois signer où ? ^^

J'ai lu que certains qualifiaient Tremé de "documentaire". Certes, la précision apportée à la restitution des traditions et à la représentation télévisuelle de la musique laisse pantois ; sommes-nous à ce point habitués à voir des films ou séries déconnectés de la réalité, des histoires mal documentées, des anachronismes...? Certaines œuvres font pourtant un effort de réalisme, qu'elles soient peu nombreuses ne change rien à la question ; ira-t-on qualifier Incendies ou Mad Men de "documentaires" ? J'en doute. Tremé ne se contente pas de nous emmener à la Nouvelle-Orléans pour un petit tour d'horizon de ses merveilles ; Tremé nous raconte une histoire, celle d'êtres humains tombés dans la marmite de potion magique étant petits, et devenus grands. Il s'agit ni plus ni moins que de célébrer l'universalité et le pouvoir insoupçonné de la musique ; on est aussi proche du conte que du documentaire, à bien y regarder.

J'imagine que l'effet produit par Tremé est moindre quand on n'a jamais été sensible (sensibilisé ?) au jazz. C'est triste, car des tas de gens ne savent pas ce qu'ils ratent. J'ai la chance d'aimer le jazz, et en particulier le "vieux" jazz né là-bas, ainsi que pas mal d'autres styles présents dans la série, donc le coup de foudre a été immédiat, dès cette fabuleuse introduction, jusqu'au premier générique (et quel générique !).

Avant Tremé, j'étais attaché à la Nouvelle-Orléans comme à un monument historique, reconnaissant pour l'énormité de ce que cette ville a apporté au monde et à mon petit bonheur personnel. Après Tremé, eh bien...

Si je peux un jour voyager outre-Atlantique, je sais où j'irai. Pas juste y faire un tour, hein. Pour m'y installer.

Sharp Objects (2018)

Je reprends l'écriture ici après 3 ans de silence (pour des raisons que tu découvriras peut-être quelque part dans mes bavardages). J'ai regardé une tripotée de films et de séries ; beaucoup m'ont plu, peu m'ont passionné. Sharp Objects est sans doute la meilleure de toutes, tant par son originalité que par sa qualité technique.

Et ici, contrairement à Game of Thrones, ce ne sont pas les effets spéciaux, les costumes et la musique qui déterminent cette qualité, mais l'écriture (si décevante depuis la saison 5 de GoT) et le jeu des acteurs. Des actrices, devrais-je dire, toutes stupéfiantes, avec à leur tête une Amy Adams grandiose (sa prestation est selon moi, avec celle de Rami Malek dans Mr Robot, au sommet de cette décennie télévisuelle).

Peut-être serait-il intéressant de se demander pourquoi les réalisateurs canadiens ont tant de talent (et par conséquent de succès) alors qu'en France nous avons toutes les peines du monde à trouver un juste milieu entre la bêtise avilissante des comédies populaires et les films d'auteur aussi subtils que confidentiels... Jean-Marc Vallée, Denis Villeneuve, Michelle McLaren, Denys Arcan, David Cronenberg, Jeremy Podeswa, Xavier Dolan, ça fait une belle brochette, non ?

Développement logiciel & SGBD

Hormis mon apprentissage de R (pour Bioptimize), je n'ai pas eu beaucoup de développement logiciel à me mettre sous la dent ces derniers temps. Je ne cesse par contre de peaufiner mes connaissances en SGBD, notamment pour optimiser MySQL (ou plutôt MariaDB, d'ailleurs). Il ne s'en est pas fallu de beaucoup pour que mon premier métier soit DBA, tu sais... :)

C (1993)

C'est une drôle d'histoire. Révélatrice de tout un tas de choses en tout cas.

Je suis au collège, en 4è, et mes camarades de classe partent en stage de voile aux Glénans ; pas l'endroit idéal pour un fauteuil roulant. Je reste donc en Champagne, mais certainement pas pour me tourner les pouces pendant que mes potes creusent des trous dans le sol gelé pour pouvoir se soulager. Non non, mon programme est sensiblement aussi chargé que le leur : le collège m'a inscrit à une formation sur le langage C.

Là ça manque de smiley, il en faudrait un du genre "waaaaahc'estbeauuuj'ailesyeuxquibriiiillent". On se satisfera de "<3", ok ? Bon, je reprends. Le C. Le Graal, à l'époque. Le seul langage noble, pour que les humains nobles commandent aux machines nobles. C'est bien ça, un "langage de haut niveau", hein ? ;-)

Deux semaines de formation pour adultes, avec un formateur rien que pour moi. Trop bien. Et après quelques heures de théorie : "tu veux programmer quoi, gamin ?" - "un jeu de rôle !". Sourire partagé.

C'est ainsi que j'ai apprivoisé stdio et malloc, découvert l'extase cérébrale procurée par les fonctions récursives, et fait joujou avec les couleurs de texte et de background pour programmer mon premier jeu, tout en texte bien sûr, inspiré des "livres dont vous êtes le héros". Quoi de plus logique ?

Casio (1995)

Je pense avoir laissé entendre, ici par exemple, que j'avais pas mal glandouillé au lycée. Raisonnablement, bien sûr. C'est juste que beaucoup de cours étaient passablement ennuyeux, et je m'occupais autrement.

En écrivant des scénarios par exemple ; en jouant au tarot (discrètement, ou pas) avec les profs les plus cools ; en pianotant fiévreusement sur ma calculette... J'ai eu la chance d'avoir 14 ans au moment où les calculatrices programmables étaient obligatoires, mais bien avant qu'elles ne deviennent de vrais petits ordinateurs. Bref, de nouveaux horizons s'ouvraient, mais la mondialisation des données ne permettait pas encore de télécharger des jeux, des applis, etc.

Libre alors à chacun de programmer la bête selon ses envies. La mode était de recopier des antisèches, autrement dit de se servir de la mémoire comme bloc-notes, sans véritables instructions. Sacrilège, me disais-je : c'est du gâchis d'espace ! Sur ma magnifique Casio 7700, je disposais de 4ko, c'était bien assez pour coder un jeu, non ? ;-)

J'ai donc commencé avec quelques bricoles simples, comme des devinettes, des jeux de hasard, etc. La 7700 était très limitée au niveau graphique : monochrome, et surtout incapable d'effacer un point (tu dessines ce que tu veux, pixel par pixel, mais pour effacer quelque chose, c'est clear screen, rien d'autre...). Coup de bol, si j'ose dire : on me l'a chouravée. Un lobbying intense et efficace me permit alors d'obtenir une Casio 9900 : miam. Trois couleurs, plus de puissance, et surtout, surtout, 24ko. Une merveille. Seules les Texas Instruments faisaient mieux, mais leur prix les réservait aux fils de médecins ayant déjà un costard Armani, une bagnole et un loft privatif dans le château familial.

24ko. Oooooh bonheur. J'ai codé plein de trucs là-dessus. Un "Worms". Un jeu d'échecs. Un jeu de voiture (enfin, de trajectoires). Un RTS inspiré de Dune II. Un jeu de tennis, avec une IA adverse. Un jeu de basket. Un poker. Un économiseur d'écran (trololol). J'en oublie plein d'autres ; et tout ça tenait en 24ko. En Basic, oui. C'est dingue.

Et puis j'ai fait de la place, supprimé les programmes les moins réussis, pour libérer 21ko pour mon projet ultime, mon Silmarillion, ma 9è symphonie... Un jeu de rôle, évidemment. Avec des dessins maison (rhah cette hydre à 3 têtes !), un scénario non linéaire, une difficulté digne des plus belles heures d'Excelsior... Idée, quand tu nous tiens...

C++ (1998)

J'ai mis du temps à assimiler la programmation orientée objet. J'étais satisfait de ce que m'offraient des langages impératifs comme C et Basic, et ne voyais pas bien l'intérêt de ces fameuses "classes". Quelques cours à Supinfo et surtout sur le Net m'ont expliqué de quoi il s'agissait, et j'ai trouvé tous ces concepts d'héritage, de typage ou de polymorphisme cohérents et élégants... Mais je ne voyais pas bien à quoi cela pourrait me servir.

C'est venu plus tard, via PHP5. Et à ce moment-là, mon apprentissage théorique du C++ s'est avéré très utile. C'est assez amusant : je n'ai jamais vraiment utilisé le C++ en situation réelle, mais il fait partie selon moi des fondamentaux pour n'importe quel développeur. Je ne crois pas être le seul. Mais je me demande si un jour nous aurons un langage de programmation à la fois "propre", formateur, universel, et adapté aux contraintes de la vie de tous les jours pour la majorité des développeurs... (Oui, le C++ est utilisé, bien sûr, mais je pense que tu as compris ce que je voulais dire.)

Access (1999)

C'est à l'occasion d'un stage d'été que j'ai apprivoisé Access. Je travaillais avec un ami, Reno, pour développer une application pour un cabinet de consultants ; je n'avais que de vagues notions de bases de données, et le côté très "user-friendly" d'Access a fait le reste.

D'ailleurs, je n'ai pas spécialement accroché avec les "états" et les formulaires, ce qui m'a le plus plu c'était le SQL. J'allais être servi par la suite... ;-)

MySQL (2000)

Ah, c'est autre chose qu'Access, c'est sûr... MySQL, au départ, c'est une vraie réussite : un logiciel open source, facile d'accès (moins hermétique qu'Oracle en tout cas), performant (suffisamment pour plusieurs géants d'Internet)... Jusqu'à sa version 5, on ne pouvait pas lui reprocher grand chose.

Certes, les possibilités de programmation (comme PL/SQL pour Oracle) sont faibles, et dans certains contextes les perfs sont loin d'un concurrent direct comme PostGre ; mais le principal défaut, si l'on peut dire, de MySQL, c'est justement sa démocratisation. Grâce à son association prolifique avec PHP, MySQL est utilisé par une immense majorité de développeurs, d'administrateurs de sites et de forums... Bref, MySQL se doit d'être à la fois simple (pour l'utilisateur lambda) et professionnel (pour l'utilisateur payant). Ce grand écart a très mal été géré ces dernières années ; Oracle a racheté Sun avant tout pour Java, et s'est retrouvé bien embarrassé avec MySQL puisqu'il concurrençait un de ses produits phares...

Le développement s'est ralenti, jusqu'à ce que MySQL prenne un sérieux train de retard sur les autres SGBD. Fort heureusement, l'open source a repris le dessus : plusieurs forks (dérivés) ont vu le jour, comme MariaDB, et la communauté libre a redressé la barre. On ne devrait plus parler de "MySQL", de ce fait, mais l'influence du logiciel initial est tel qu'il faudra sans doute quelques années pour que les forks se fassent leur propre nom, auprès du grand public comme auprès des entreprises.

SQL Server (2001)

C'est avec SQL Server que je suis passé à une vision "professionnelle" des bases de données. Sous Access, j'avais manipulé des tables, à peine plus évoluées que des feuilles Excel ; sous MySQL, j'avais goûté aux jointures, aux sous-requêtes, bref à la puissance du SQL lui-même. SQL Server m'a initié aux problématiques de performance, d'indexation, de backup, de cluster...

J'aurais probablement pu en apprendre autant sans quitter MySQL, mais mon parcours a fait les choses ainsi. J'ai gardé pendant quelques années un SQL Server sur une machine perso pour suivre l'évolution des versions (de 2000 à 2010), mais hormis quelques projets clients chez KP, je ne m'en suis plus servi en production.

C# (2001)

C'est lors d'un stage à SupinfoPro (structure fille de Supinfo) que j'ai découvert le C#. Nous devions développer divers composants de la future plateforme Campus Booster (e-learning).

Je ne garde pas un très bon souvenir de ce stage, essentiellement à cause de l'absence de management et de gestion de projet ; le projet avançait à pas de tortue, je n'étais pas franchement débordé. Cela m'a tout de même permis de pratiquer le C# en faisant connaissance avec la plateforme .NET, présentée à l'époque comme révolutionnaire pour le développement web.

Je ne partage pas cet avis, mais le problème vient de .NET, pas de C# qui est un langage qui fait bien ce qu'on lui demande de faire (en s'inspirant largement de Java). M'enfin, la conséquence de tout cela, c'est que depuis SupinfoPro je n'ai pratiquement pas eu l'occasion de pratiquer ces technologies. Donc si tu es un chasseur de têtes (pas Shuar j'espère) et que tu veux m'embaucher comme développeur C#, pense à m'accorder une ou deux semaines pour me "dérouiller". Merci. :)

Oracle 9i (2004)

C'est à KP que j'ai eu l'occasion de travailler sérieusement sous Oracle 9i. Oui, ça ressemble à un pléonasme, mais non en fait ; j'avais déjà bidouillé, bricolé, trifouillé des versions antérieures... J'avais appris quelques petites choses, mais rien à voir avec une situation concrète, vraiment. Rien ne vaut l'expérience du terrain.

Je t'avouerai franchement qu'Oracle ne m'a pas impressionné : je l'ai trouvé excessivement austère et mal documenté. Je n'avais probablement pas toutes les clés en main. Par contre, ce qui m'a bien plu, c'est le PL/SQL : pouvoir programmer des procédures au sein même du SGBD était une grande nouveauté pour moi. Je me suis pas mal amusé avec (oui, j'ai "travaillé sérieusement", voilà), et j'ai poursuivi cette bonne habitude avec les procédures stockées de MySQL.

Je suppose que cela signifie qu'au fond, je suis toujours un peu plus développeur que DBA. :D

VBA (2005)

Après quelques mois passés à développer des outils web internes (gestion des recrutements, notes de frais...) et des moyens de communication (site, newsletter), KP m'a fait travailler pour divers clients, sous Excel ou Access, en VBA. Je devais écrire des macros pour traiter des données (par exemple des liasses fiscales) selon des paramètres choisis par l'utilisateur : des "moulinettes", si tu veux. J'ai aussi développé des classeurs Excel "intelligents", poussant le principe d'auto-complétion aussi loin que possible. Enfin, avec un collègue (Xavier), nous avons créé une bibliothèque de fonctions que nous pouvions fournir clés en main à nos clients, avec un code partagé entre VBA et VB.

Pourquoi ce "mélange" ? Tout simplement pour sécuriser un peu l'outil. Une macro Excel n'est jamais inviolable : la meilleure protection possible est un mot de passe, que l'on peut aisément casser. Il faut donc la rendre dépendante d'une DLL (codée en VB donc, mais j'aurais pu la faire en C++), et intégrer à cette DLL un contrôle anti-piratage. Par exemple, identifier la machine avec quelques éléments caractéristiques comme l'adresse MAC, puis contacter via Internet un serveur d'authentification : si la machine est inconnue, la DLL bloquera la macro jusqu'à ce que l'utilisateur ait obtenu une autorisation en bonne et due forme.

Cette petite astuce peut permettre de s'affranchir en partie des limitations des macros VBA ; c'est aussi l'occasion de transférer dans la DLL certaines fonctions gourmandes en CPU, pour améliorer les performances...

HFM (2005)

Parmi les différentes suites logicielles de gestion financière, c'est HFM (Hyperion Financial Management) que j'ai le plus utilisée pendant mes cinq années chez KP. J'ai installé, paramétré, mis à jour des environnements, transformé des données avant leur importation dans Essbase, débugué, optimisé, écrit des scripts de consolidation...

J'aurais probablement mieux apprécié la puissance de cet outil si j'avais eu de plus solides bases de comptabilité en amont. Là, j'ai appris sur le tas, et je n'ai commencé à me sentir vraiment à l'aise qu'au moment de partir. Mais bon, j'ai beau avoir toujours soif d'apprendre, je pense que la comptabilité est un des rares domaines où mon ignorance ne me pèse pas trop. ;-)

SalesLogix (2006)

Rassure-toi, je ne vais pas t'annoncer que j'adoooooore SalesLogix (ou tout autre CRM). Non, honnêtement, je ne suis pas commercial et je ne prétends pas l'être. Mais mon expérience sur ce logiciel mérite d'être signalée.

Je ne m'en suis pas servi comme utilisateur final ; KP m'a fait suivre une formation pour apprendre à développer sous SLX. "Développer" est peut-être un abus de langage ; comparons ça à Microsoft Access : tu crées des formulaires avec une boîte à outils, et quand l'assistant ne suffit pas à pondre le code liant ces formulaires aux données, c'est à toi de t'y coller.

C'est précisément là où j'intervenais, et cela ne m'a donc pas trop dépaysé de mes missions sous Access. L'intérêt, c'est que cela m'a fait prendre conscience de l'utilité et surtout du potentiel des CRM. Car SalesLogix était un mammouth, une usine à gaz, et il y avait vraiment matière à amélioration.

Peu après, les CRM web arrivaient et révolutionnaient le marché. Au moins, je sais pourquoi. :)

R (2013)

En travaillant pour Bioptimize, je me suis initié au langage R, spécialisé dans les calculs mathématiques et statistiques. Bon, c'est presque un abus de langage, puisque R est en réalité un logiciel construit autour du langage S... Mais tout son intérêt réside dans les nombreux paquets développés par la communauté d'utilisateurs et permettant d'effectuer des calculs extrêmement complexes en quelques lignes.

J'ai intégré R dans l'application web que j'ai développée, en le connectant à Apache (module RApache). Cela m'a permis d'envoyer à R des requêtes type POST et de recevoir en retour une réponse HTTP. Les performances étant un enjeu important, j'ai développé un moteur de gestion multi-threads pour que mon application puisse exécuter plusieurs scripts R simultanément, en faisant du load balancing en amont (tout est géré par PHP, avec curl_multi).

R est un outil très pratique pour les statisticiens, mais il me semble manquer de pas mal de fonctionnalités pour répondre aux besoins du marché ; le fait que j'aie dû concevoir ce montage pour déléguer le contrôle des performances à PHP me semble révélateur. J'espère que de nouveaux projets, comme Julia, trouveront le dynamisme et la souplesse nécessaires pour aller plus loin dans cette voie.

Développement web

C'est mon principal gagne-pain donc je passe pas mal de temps à faire du développement web, à m'améliorer et à suivre les évolutions du marché ; je me suis notamment intéressé de près au WebGL (pour Dreamaz puis Bioptimize).

Si tu es venu sur cette page pour un éventuel recrutement, il y a donc des chances que ce soit ce domaine qui t'intéresse en premier lieu ; n'hésite pas à me contacter (en haut à droite) pour en discuter, mais n'oublie pas que je sais (et aime) faire pas mal d'autres choses. Cette page devrait t'en donner quelques exemples. :)

HTML (1998)

Il faut bien commencer quelque part, hein ? Je me suis sérieusement mis au langage HTML lorsque j'étais à la Fac : en cours d'informatique, nous devions faire un mini site web. Statique, bien sûr : nous n'avions aucun serveur pour exécuter du PHP ou du Perl, il fallait que ça tourne en local ! ^^

Mon pote Rodrigue et moi avons choisi de faire une sorte d'atlas des grands quotidiens dans le monde, avec un mappage de polygones sur une balise img. Le prof nous a dit que c'était bien trop compliqué (le truc qu'il ne faut jamais me dire...). C'était fun, et cette expérience m'a donné envie de faire mon site perso, ce qui n'a pas tardé à suivre... On peut dire que c'est là que j'ai vraiment commencé à m'éclater avec le développement web. :-)

Perl (1999)

Même si je n'ai finalement pas eu l'occasion de travailler pour de bon en Perl, je cite ce langage ici sous forme de dédicace.

En effet, j'ai appris les bases du Perl en 1998 grâce à une mailing-list gratuite d'Octave, le fondateur d'OVH. Celui qui est devenu depuis un entrepreneur remarquable (et chez qui ce site, parmi tant d'autres, est hébergé) se démenait déjà, il y a 15 ans, pour faire monter en compétence les développeurs web français, et cela mérite le respect. En tout cas il a le mien. ;-)

PHP3 (2000)

Le langage PHP a été le compagnon de quasiment toute ma "carrière" (pro et perso) de développeur web. Ce n'est pas le plus performant, ni le plus fiable ; c'est pourtant le meilleur, selon moi.

Ce constat n'était pas une évidence lorsque PHP n'existait qu'en version 3. Pas de programmation objet. Des failles énormes à cause notamment de register_globals. PHP est né de Perl, avec pour objectif la simplification du développement web : il a mis quelques années à arriver à maturité.

Ce qui m'a poussé malgré tout vers PHP, c'est la 4ème Anomalie : il a bien fallu que je m'améliore pour maintenir et faire évoluer ce jeu... Et dès que PHP4.2 est sorti, j'ai retapé l'ensemble du code. Entre-temps j'ai aussi développé quelques sites en freelance, mais le rôle de PHP se réduisait à l'affichage de quelques infos dynamiques et à un petit backoffice. Clin d'œil amical au Pommery Déchaîné, à Notre-Dame de la Tilloye, à l'Association Éducative Alix le Clerc, à Fulmedico...

PHP4.2 (2002)

Ouf ! Enfin un peu de sécurité. Quand PHP4.2 est sorti et que j'ai fait le tour des sites que je développais et/ou administrais, j'ai réalisé à quel point PHP3 était une passoire...

Si tu veux pinailler, tu me diras qu'on pouvait très bien faire un site propre et sûr sous PHP3. Certes. Mais il était bien trop laxiste, et on se faisait piéger très facilement. Je l'ai appris de façon assez douloureuse en me faisant hacker plusieurs sites "pro"... Au moins, depuis, je fais attention. On n'est jamais assez parano avec son code !

WordPress (2006)

Je ne vais pas te faire de cachotteries : je n'aime pas qu'on me mâche le travail. Je me méfie du WYSIWYG, de Dreamweaver, des CMS... Mon truc, c'est Notepad++, ou un IDE un peu plus élaboré comme Sublime Text, à la limite. J'aime savoir très exactement ce que fait l'application que j'utilise, comment elle est codée, surtout quand il s'agit d'un site web exposé à tout ce que le Net comporte de bots et de hackers pré-pubères.

Le problème, c'est que les entreprises (= les clients = les gens qui me paient de quoi manger) veulent des sites peu chers et, surtout, standardisés. Oh, bien sûr, elles veulent leur petite originalité, leur charte graphique bien à elles, mais du point de vue de l'ergonomie, elles réclament toutes d'être "à la mode", 2.0, comme tel-site-vachement-joli-que-ma-femme-adore, enfin tu m'as compris : surtout, ne perturbons pas le consommateur, pardon, le gentil visiteur ! Présentons-lui du pré-mâché, ne laissons rien au hasard, confions notre design aux règles éprouvées du marketing de masse, et récoltons-en les fruits... vite !

En clair, dans bien des cas, c'est inutile d'envisager un site sur mesure ; il suffit de prendre un CMS (WordPress, Drupal ou Joomla, selon la complexité des besoins et du contenu à proposer), de pondre une charte graphique (ce qui, pour les budgets serrés, se résume à "reprendre un skin existant et changer 2-3 bricoles"), et, souvent le plus difficile, d'apprendre au client à se servir du panneau d'admin pour gérer son site.

Passionnant, n'est-ce pas ? Tu sens à quel point je kiffe les CMS, hein ? :D Sans rire, WordPress a une qualité importante que je veux mettre en avant : en nous faisant gagner du temps, à nous, développeurs et webdesigners, il nous permet de tracer une ligne assez claire entre les projets ambitieux et les jobs alimentaires. Inutile de jouer au snob, nous devons tous nous coltiner quelques missions WordPress de temps à autre, cela paie les factures et, avec l'expérience, nous parvenons à y passer peu de temps (à la hauteur de la facture associée, donc). C'est la partie routinière et cérébralement reposante du travail, un peu comme la rédaction de documentations pour un sysadmin. Le tout, c'est de ne pas se faire piéger en y passant un temps fou pour satisfaire un client qui ne sait pas ce qu'il veut. ^^

(Oui, cette page perso sert aussi de CV interactif, elle est donc censée me présenter sous mon meilleur jour aux yeux des recruteurs. Et alors ? Je dis ce que je pense, cela m'amène souvent à m'insurger ou à critiquer ce qui me déplaît - je ne vais quand même pas faire semblant de gober n'importe quoi pour révéler ensuite ma vraie nature une fois embauché, si ? Oui, je suis un râleur, exigeant et perfectionniste, j'aime le travail bien fait, les projets décalés et ambitieux, donc les CMS qui génèrent des pages de plusieurs Mo et auxquels on découvre des dizaines de failles chaque année, ça me fait froncer le nez. Et autant te prévenir tout de suite : quand je fronce le nez, ça sent le pâté.)

PHP5.1 (2008)

Ouf, enfin une vraie POO sous PHP. Il était temps.

Et comme dirait Jean-Pierre Coffe, la POO, c'est pas de la m***e ! :P

...

... Pardon pour ce calembour pitoyable. Pour me faire pardonner, je vais t'expliquer ce qu'est la POO (ben oui, tu n'es peut-être pas développeur ou développeuse). Pas en te faisant un cours de 3 pages, juste avec un exemple très simple.

Disons que tu veux coder un programme qui simule un aquarium, pour voir quelle quantité de chaque espèce de poissons est optimale pour avoir un système équilibré (et éviter que les piranhas bouffent tout en 24h ^^).

En programmation séquentielle, tu vas faire quelque chose comme ça :

  • mettre dans plein de variables (ou plus probablement un gros tableau) toutes tes données initiales (nombre de poissons de chaque sorte, qui mange quoi et combien par jour, durée de vie...)
  • initialiser également un tableau contenant "l'état" de l'aquarium à un instant T
  • lancer une boucle pour simuler le passage du temps (par exemple 1 exécution = 1 heure) :
    • pour chaque poisson, calculer ce qu'il a mangé et son état de santé
    • pour chaque poisson, calculer son risque de mortalité (le faire mourir si besoin), son taux de fertilité (ajouter de nouveaux poissons, donc de nouvelles variables, si naissance(s))
    • préparer et envoyer en sortie (à l'écran par exemple) un compte-rendu de l'état de l'aquarium.

Autrement dit, ça fait un énorme bloc, avec des niveaux d'indentation (boucle dans boucle dans boucle...) rendant la lecture assez pénible.

En programmation procédurale, tu reprends la base précédente, si ce n'est que tu déclares (= écris) quelques fonctions avant ton bloc principal. Le but d'une fonction, c'est d'abord d'éviter les répétitions. Par exemple, tu as une fonction "manger" qui prend en paramètre le poisson concerné, et qui va faire les calculs et les modifs nécessaires. Tu peux l'appeler simplement ("manger(poisson)") et autant de fois que nécessaire. Non seulement tu évites les répétitions, mais en plus tu modularises ton code : si un jour tu veux améliorer l'algorithme de reproduction, tu peux te concentrer sur ta fonction "engendrer" plutôt que d'aller fouiner un peu partout dans ton code. D'où un travail en équipe beaucoup moins difficile.

En programmation orientée objet (POO), tu as une approche plus logique, moins "bêtement" informatique. Tu manipules des objets. Un objet est défini par des données (= variables) et des comportements (= méthodes) ; par exemple, un poisson est défini par sa couleur, son âge, son sexe, sa faim, etc, et par "comment et que mange-t-il", "dans quelles conditions se reproduit-il", etc.

D'une certaine façon, la POO est juste une évolution naturelle de la programmation procédurale. Une différence majeure réside dans la portée des variables. En procédural, soit une variable est globale (accessible de n'importe où), soit elle est privée (accessible uniquement dans la fonction dans laquelle elle est déclarée) ; oui, il y a des nuances, mais je synthétise, viens pas pinailler maintenant sinon on va perdre les néophytes. ^^ En POO, les variables mais aussi les méthodes ont une portée plus restreinte, ce qui évite bien des tracas. Exemple : tu définis un type d'objets (on appelle ça une classe) "Poisson". Tu dis que tous les objets de cette classe auront des données (date de naissance, sexe, couleur, faim, santé), et des méthodes (manger, engendrer). Dans les méthodes, tu codes aussi "naître", ce que l'on appelle un constructeur : il sera automatiquement appelé quand tu créeras un nouveau poisson (= quand tu créeras une nouvelle "instance" de la "classe" Poisson). Ce constructeur dira par exemple "la date de naissance de ce poisson est la date actuelle, et son sexe est aléatoire entre M et F".

Une fois que tu as défini cette classe, tu n'as plus qu'à jouer : hop, une ligne de code et tu as un nouveau poisson. Hop, une autre ligne et tu le fais manger. Tu peux faire exactement pareil en procédural. Là où la POO fait des merveilles, c'est avec "l'héritage". Reprenons notre exemple : ok, tous nos poissons naissent peut-être de la même manière, mais ils ne mangent pas tous la même chose. En fait, il faut voir les choses en face : un poisson clown et un piranha sont certes tous deux des poissons, mais ils sont aussi assez différents.

Tu définis donc deux classes, PoissonClown et Piranha, qui héritent (tu entends les trompettes victorieuses là ?) de la classe Poisson. Cela signifie que tu leur transmets les données et méthodes de Poisson, mais que tu vas pouvoir changer quelques petits trucs. Par exemple, la méthode PoissonClown->manger tiendra compte du taux de plancton dans l'eau, alors que Piranha->manger basera son calcul sur... la concentration de poissons clowns dans les parages. Si tu codes tes classes proprement, tu pourras t'assurer qu'aucune donnée inutile n'est accessible depuis "l'extérieur" de la classe ; par exemple, pour vieillir un poisson, tu ne diras pas "ajoute 1 à l'âge du poisson xyz", tu appelleras une méthode : xyz->vieillir(1).

Si tu trouves que cela semble plus compliqué de faire comme ça, ne t'inquiète pas : c'est normal. Oui, c'est plus compliqué, enfin disons que c'est un peu plus long à coder quand on manque de pratique. Le truc, c'est qu'avec l'expérience, tu ne pourras pas y échapper, pour deux raisons :

  • c'est quasiment indispensable d'utiliser la POO sur de gros projets, car son extrême modularité facilite grandement le travail en équipe et la maintenance d'un code complexe ;
  • "penser" en POO nécessite une phase de conception préalable, et celle-ci doit devenir un réflexe absolument fondamental de tout développeur qui se respecte, tant elle impacte la qualité future du code...

D'une certaine façon, la POO est au développement ce que l'harmonie tonale est à la composition musicale : elle te donne le cadre et les outils pour créer un programme efficace et évolutif. Tu peux faire sans, mais tu risques fort d'accoucher d'une œuvre dissonnante, incompréhensible ou injouable. :)

CSS3 (2008)

Tu l'auras peut-être déjà compris : je ne suis pas très doué pour tout ce qui touche aux arts graphiques. Par expérience, j'ai fini par me débrouiller à peu près correctement pour créer des interfaces fonctionnelles, et j'ai appris à ne pas brûler la rétine de mes visiteurs avec des jeux de couleurs, hum, exotiques. Mais bon, je ne suis ni infographiste, ni webdesigner.

De ce fait, mon utilisation du CSS s'est longtemps résumée au minimum syndical, et je me laissais souvent aller à des accès de flemme, ne séparant pas le code CSS du HTML. J'utilisais aussi beaucoup les tableaux ; bref, c'était du web 1.0, et je ne voyais dans le CSS qu'un langage de mise en page d'un intérêt restreint.

La version 3 de CSS a changé la donne. Soudain, grâce aux animations et aux transitions, CSS est devenu un outil de programmation à part entière, économisant des blocs entiers de JavaScript. L'amélioration des sélecteurs, les outils de responsive design, tout cela venait (enfin ?) justifier à mes yeux l'existence d'un langage à part entière pour la définition des styles. CSS3 est difficilement dissociable de jQuery, qui s'appuie énormément dessus et permet au développeur de réaliser des présentations belles et fluides avec un code extrêmement propre. En clair, CSS est devenu l'ami des développeurs. :)

PHP5.3 (2010)

5.3, l'âge de la maturité ? Pas mal d'améliorations attendues de longue date en tout cas ; les plus utiles à mes yeux étant les closures et les namespaces. Enfin, PHP n'est plus un langage au rabais, et tient la comparaison avec Ruby par exemple.

Seul bémol : dommage qu'il ait fallu attendre si longtemps. J'aurais aimé développer en PHP avec tous ces outils bien plus tôt, au lieu de prendre de mauvaises habitudes. Mais bon, j'ai gommé celles-ci depuis quelques années, heureusement. ^^

Smarty (2011)

Un moteur de templates, c'est typiquement le machin dont tu ne vois absolument pas l'utilité tant que tu ne t'en sers pas, et dont tu ne peux plus te passer ensuite. C'est pratique, puissant, bon, je ne vais pas en faire une tartine, je ne touche pas de pourcentage (snif) ; non, ce qui le rend indispensable, surtout, c'est qu'il t'oblige à coder proprement, à séparer l'applicatif (PHP) et la présentation (HTML).

Oh, ne crois pas que je codais comme un goret avant Smarty, hein. L'essentiel de mon code PHP était dans des librairies, dans un dossier "lib" ou "core", et le HTML était à part. En gros. Moui, il restait toujours un peu de PHP dedans, forcément, pour les boucles, tout ça. Et des bricoles que j'avais la flemme de passer dans les librairies. Et... Oui, bon, si tu es développeur, tu as très bien compris : la séparation n'était pas nette, elle dépendait pas mal du temps que je pouvais me permettre de prendre pour optimiser mon appli.

Rien d'infamant à cela, on est tous passés par là. L'important, c'est que Smarty te met un flingue sur la tempe et te contraint à scinder ton code dans les règles de l'art. Ton collègue webdesigner peut alors travailler sereinement sur les templates sans tout casser, ton stagiaire développeur peut coder des briques PHP sans impact sur l'affichage, bref, tu as enfin un code modulaire, pour de vrai, pas comme les machins immondes du début des années 2000 (je ne parle pas -seulement- de mon code, hein, y'a eu des tas de softs open source très populaires qui sont tombés dans le panneau, des CMS, des bugtrackers...).

Smarty n'a que deux légers inconvénients : il nécessite un minimum de compétences de sysadmin pour bien le configurer (ce qui, à mon avis, est plutôt cool, puisque cela valorise les profils à double-casquette comme moi ^^), et il implique d'apprendre une syntaxe supplémentaire, proche de PHP mais avec pas mal de petites subtilités. Ce qui fait qu'aujourd'hui, un "développeur PHP" se doit de maîtriser aussi bien le PHP que Smarty, JS, jQuery, CSS3, et bien souvent d'autres babioles comme le Shell, AS3 ou Java. Quand même.

jQuery (2011)

Dire que j'ai passé presque dix ans à bricoler en JavaScript pour rendre mes pages interactives, et que jQuery a balayé tout ça en un rien de temps... D'un côté, j'envie les gamins qui découvrent le développement web aujourd'hui : ils ont des outils fantastiques à leur disposition, et peuvent libérer leur créativité. De l'autre, eh bien... C'est mon côté "vieux con" qui refait surface, "j'ai fait la guerre, moi, gamin", ou plutôt "j'ai codé un script dynamique avec des centaines de lignes de JS et des iframes, moi, gamin". :D

jQuery est tellement épatant et largement utilisé que je me demande pourquoi il n'est pas intégré à la norme JS. Ok, il y a d'autres frameworks JS, mais même AngularJS s'appuie dessus...

Three.js (2013)

Pour Bioptimize, j'ai été amené à me former au WebGL, afin de générer côté client des graphiques en 3D interactifs. Mes recherches m'ont assez rapidement amené à utiliser Three.js, une librairie open source simplifiant certaines opérations fastidieuses du WebGL, améliorant la compatibilité et ajoutant des outils bien pratiques (comme des convertisseurs de modèles Blender ou 3DSMax). Bref, Three.js est au WebGL ce que jQuery est au JavaScript.

Les possibilités offertes par le WebGL sont assez grisantes ; par ailleurs, utiliser une librairie en plein développement est très gratifiant, tu sens la communauté "pousser" en même temps que ton projet, tu participes à ta petite échelle, ce n'est pas comme se mettre à jQuery avec deux ans de retard (ahem). Ce coup-ci, je peux dire que j'ai été dans le bon wagon. ^^

Backbone.js (2015)

Dans le cadre d'une refacto chez Bioptimize, je me suis familiarisé avec backbone.js. C'est fou comme le MVC est une évidence dès qu'on s'en sert... Auparavnt, je le réservais au back-end, mais avec les applis modernes qui font des centaines de ko de JavaScript côté front, ça devient indispensable. Allez zou, fini le code spaghettis !

CodeIgniter (2017)

Après quelques essais de frameworks MVC pour des clients, j'ai fini par me poser sur CodeIgniter. Beaucoup plus intuitif que ses concurrents, suffisant pour mes besoins, rapide et efficace...

Si j'étais voué à rester dans le développement web encore 10 ans, j'aurais choisi Laravel. Mais les temps changent, la vie fait son chemin, et mon chemin à moi m'éloigne des métiers techniques, inexorablement.

Administration systèmes

J'ai été formé comme administrateur systèmes, réseaux et bases de données, bien plus que comme développeur. C'était un choix pédagogique de Supinfo, mais je ne le regrette pas, car il m'a permis d'acquérir un profil très généraliste, idéal pour avoir une vision d'ensemble des projets IT. ;-)

Héberger et gérer des serveurs web fait toujours partie de mes activités (cf shimb.net), et je suis à l'écoute de toute proposition relative à ce domaine. Voilà qui est dit ! ^^

DOS6 (1991)

Oh yeah. Good ol' DOS.

Tu dois être un peu geek pour avoir cliqué ici, donc je ne vais pas te faire un cours sur ce cher MS-DOS. Je vais plutôt te jeter en pâture quelques souvenirs de cette époque bénie ; non pas bénie grâce à Kro$oft, mais parce que j'étais gosse, et qu'un gosse n'a besoin d'aucun effort pour voir le monde avec des yeux émerveillés.

Doublespace. Ou Drivespace. Passer de 20 à 38Mo de disque dur, et pouvoir enfin mettre plus de deux jeux simultanément sur l'ordi, sans devoir rajouter de disquette.

Toybox. Un menu avec de grosses icônes, un éditeur d'icônes, un bac à sable quoi. Une icône Playboy.

Popcorn. Et Digger. Popcorn et ses 50 niveaux infinissables, enfin si, après 5h d'efforts continus, parfois... Ces foutus yeux rouges flottant toujours près de la raquette, provoquant des faux-rebonds fatals et des floppées de jurons... Digger et sa musique obsédante inspirée de Mongo Jerry... Digger, un jeu type arcade, 30ko bien tassés, pour des centaines d'heures de fun.

Numéro 10. Mon premier jeu de foot. Géniteur et bourreau des trois joysticks que j'ai possédés jusqu'à ce jour.

RAR. Pas WinRAR, hein. DosRAR. Ou comment, avec un disque dur de 500Mo, ranger ses fichiers façon Tetris pour les passer à un pote heureux possesseur d'un graveur de CD, afin qu'il grave 650Mo. 650, hein, pas 648. À 70 francs le CD vierge et 50% de plantages pendant la gravure, on s'interdit le gaspillage.

Et puis quand je dis DOS, je pense à toute une époque, celle d'avant Win95, Internet, etc. Donc tous ces jeux extraordinaires qui ont jalonné mon enfance. Mon premier ordi, un Amstrad PC-1512, et son OS sur deux disquettes souples 5"1/4. Les MO5 et TO7 ramenés de son école par Papa, avec un pong en Basic (que j'ai hacké en sachant à peine lire, pour agrandir ma raquette) et une tortue Logo. Windows 3.1 et Publisher. Les ancêtres de Publisher, comme PrintMaster, sur lesquels j'ai imprimé un nombre incalculable de feuilles avec mon imprimante à rubans. Les premiers réseaux, NetBIOS, câbles coaxiaux, hubs 10Mo hors de prix...

On m'a déjà qualifié, pas mal de fois, de vieux con. J'ai toujours pris ça comme un compliment.

Win95 (1996)

Je suis passé à Windows 95 assez tard, finalement, plusieurs mois après sa sortie. J'étais un peu conservateur, j'aimais bien mon DOS et mon Windows 3.1, et cette drôle d'invention qu'on appelait "barre des tâches" me déplaisait par son asymétrie. Cherche pas, je suis un peu tordu, des fois.

L'autre raison qui me poussait à rester sous DOS, c'était l'incompatibilité de bien des jeux avec ce pseudo-32bits cauchemardesque. Il aura fallu plus de dix ans et l'arrivée de DOSBox pour que je retrouve avec délectation quelques merveilles de mon enfance comme Lords of the Realm ; d'autres jeux comme Dune ou Excelsior fonctionnèrent à peu près correctement sous Windows 98.

Que dire d'autre sur Windows 95 ? Il fonctionnait moins bien que le 3.1, et tout ce qu'il apportait comme innovations ne commença réellement à fonctionner qu'après de nombreux patches. Bref, c'est du Microsoft.

NT4 (1999)

Premiers pas dans le monde des serveurs, avec Supinfo.

Et un constat, comme une épiphanie : Microsoft est capable de sortir un OS stable. Sacrebleu !

Win2k Server (2000)

Accroche-toi chérie, on passe aux choses sérieuses. Windows 2000, c'est une révolution (surtout pour un bleu qui connaît mal Linux).

Alik, président de Supinfo, m'amène un ordi avec 1Go de RAM (waouh) pour que j'installe Visual Studio, VMWare et autres joyeusetés pour étudier. L'OS est tellement stable que je ne rebooterai la machine que 3 à 4 fois par an. Extase.

Cette belle bécane va faire bien plus qu'un simple outil pour suivre des cours, puisque je vais y configurer IIS, un serveur FTP, un serveur mail, etc.

En 2003, je mettrai mes économies dans un nouveau PC, destiné à prendre le relais de cette machine : un mini-PC Shuttle, vraiment mini, mais d'une fiabilité inégalée (6 ans non-stop, record d'uptime : 16 mois, alors que je l'utilisais aussi pour graver, modéliser sous 3dsmax ou encoder des divx). Non, vraiment, Kro$oft ne fait pas que du caca.

Red Hat (2002)

Et voici mon premier vrai contact avec les OS open source... Mouaif, pas concluant. À Supinfo, je suis un cours d'utilisation de Red Hat, mais le prof a la flemme de configurer l'accès SSH pour qu'il soit accessible via VPN (j'étudie à distance). Résultat : je prends du retard, le temps de télécharger une ISO (sur ma super ligne 128kbps) et de la monter sous VMWare. J'arrive après la bataille, et il ne me reste plus qu'à lire des photocopies (ce qui, comme chacun le sait, est incroyablement efficace pour apprendre à se servir d'un logiciel ou d'un OS).

Cette bête déconvenue va me rendre réticent à Nunux pendant une paire d'années, ce qui est bien dommage et témoigne sans nul doute de mon caractère de cochon. Il faudra attendre OVH et ses serveurs sous Gentoo pour corriger le tir...

Win2k3 Server (2003)

J'ai déjà dit tout le bien que je pensais de Windows 2000. Eh bien la mouture 2003 est encore meilleure : solide, stable, complète comme la 2000, mais bien plus pratique, intuitive, bref, moderne.

Entendons-nous bien : ça ne vaut pas tripette face au "monde libre". Mais vois-tu, à l'époque, ce monde libre, je ne faisais que l'effleurer (et il ne se laissait pas faire, le bougre). Je connaissais, non, pardon, subissais quotidiennement Windows 98 puis XP, et la qualité des versions "serveur" de Windows chatouillait les glandes lacrimales du grand sentimental que je suis (si, si).

Regarde donc : sur un mini-PC (barebone) avec un Pentium IV (avec chauffage central intégré), mon Windows 2003 hébergeait des sites (Apache, IIS), des bases de données (MySQL, SQL Server), un serveur FTP (pour une trentaine de potes, quand même), un serveur mail, un serveur Battle.net privé (chut !)... Tout ceci 24h/24, avec une seule panne en 6 ans (disque dur), aucun BSoD, aucun freeze... Et j'ai gardé le meilleur pour la fin : pendant plus de deux ans, vu que c'était ma meilleure machine, elle était également chargée d'encoder les DivX et de faire des rendus sous 3dsmax. Yattaaaaaaaaa !

Gentoo (2007)

C'est là que Nunux commence à sérieusement m'intéresser. Après des années à héberger tout un tas de choses sur mon Win2000/2003 à domicile, je finis par franchir le cap, louer un serveur chez OVH et apprivoiser Linux. Le déclic vient de mon boulot chez KP : mes supérieurs ont un besoin grandissant d'un serveur dédié (la DSI manque cruellement de souplesse, pour parler poliment), et je ne veux pas me retrouver à apprendre sur le tas en faisant prendre des risques à mon employeur. Je loue donc mon serveur quelques mois avant KP, et ainsi, je suis parfaitement rôdé pour eux. ;-)

Gentoo n'est en aucun cas une distribution idéale à long terme : c'est un bon outil pour démarrer et faire des choses simples, comme un hébergement LAMP basique. Je ne mettrai pas longtemps à me frustrer de ses limites, et à passer le palier suivant, menant à Debian...

Debian (2008)

Debian, c'est un rêve de nerd puriste. J'ai connu pas mal d'autres distributions Linux, comme Gentoo, Red Hat ou FreeBSD, et à mes yeux aucune ne lui arrive à la cheville. Bon, ok, CentOS lui arrive aux genoux... ^^

Tout paraît logique, et tout est possible. Il faut souvent chercher, apprendre, mais on finit toujours par trouver des solutions - dont au moins une est élégante. Et tout cela se fait sans renoncer à une certaine pureté, à une vision quasi-extrémiste de la philosophie open source.

L'utilisateur lambda préférera souvent son dérivé, Ubuntu, moins à cheval sur ces "principes" et de ce fait moins contraignant ; pour une utilisation serveur, il n'y a pas photo, Debian est parfait. Même comme bureau à distance, avec un environnement léger comme Xfce4, c'est le pied. Debian révèle sans doute encore mieux sa valeur dans un environnement virtualisé, type Proxmox (hyperviseur basé sur... Debian, tiens donc), où son rapport performance/ressources en fait la distribution de base idéale pour des containers multiples. 40 machines virtuelles dans 16Go de RAM ? No problemo ! :D

Proxmox (2009)

Cela faisait quelques années que je connaissais le principe et les techniques de virtualisation, avec VMWare. Au départ, pour moi, c'était une sorte d'émulateur, pour installer un Windows 3.1 et faire tourner de vieux logiciels, ou pour tester l'installation d'un logiciel sur divers OS. Je m'en servais aussi chez KP pour construire des "templates" de démonstration (telle suite logicielle, telle version, sous tel OS). En bref, ce qui m'intéressait surtout, c'était cette encapsulation de l'OS, cette couche d'abstraction permettant de simuler d'autres configurations.

Je ne voyais pas vraiment au-delà, et cela tenait sans doute à la limitation de la RAM : avec 2Go, tu peux difficilement envisager de multiplier les VM. Cet obstacle a explosé subitement avec les serveurs dédiés, pour deux raisons : dès 2007, mon serveur OVH disposait de 4Go de RAM (12Go en 2009 !) ; et surtout, le passage à Linux, et plus précisément à Proxmox, m'a fait découvrir la technologie OpenVZ.

Pour faire très simple, là où la "full" virtualisation nécessite de cloner entièrement un système et donc ses besoins en ressources, OpenVZ propose de créer des "containers" avec le même noyau Linux que l'hyperviseur. Chaque VM peut avoir n'importe quelle distribution Linux, mais le noyau est partagé. Résultat : une VM Debian prend environ 140Mo de RAM.

Promox n'interdit pas la virtualisation totale (appelée KVM), mais dans mon cas, OpenVZ répond à tous mes besoins. Je peux créer une multitude de "bulles"/VM en quelques secondes, et ainsi segmenter mes nombreux services pour davantage de sécurité et de facilité de maintenance. Aujourd'hui encore, c'est ce que j'utilise sur mon principal serveur dédié ; j'héberge entre 20 et 40 VM, les sites web que j'abrite totalisent plus de 50k pages par jour, et je n'utilise pas le tiers des capacités CPU/RAM du serveur (d'entrée de gamme !). Proxmox mutualise intelligemment les ressources en temps réel, c'est presque jouissif de voir comme tout cela fonctionne harmonieusement...

Certes, Proxmox n'est pas au niveau des solutions payantes de VMWare pour les clusters haute disponibilité. Proxmox gère les clusters (j'en ai eu un quelques années), mais on ne peut pas bouger les VM à chaud, par exemple. Pour se créer un cloud privé, avec minimum 500€ par mois, VMWare reste incontournable ; pour tous les autres besoins, Proxmox me semble idéal.

vSphere (2011)

J'ai utilisé vSphere comme hyperviseur du cloud privé que nous avions mis en place, Ulysse et moi, pour héberger les sites de DreamCave, et en particulier les environnements (dev/preprod/prod) de Dreamaz.

Je ne suis pas super fan de l'ergonomie du client lourd d'admin vSphere, mais il faut bien reconnaître que question fiabilité, c'est du rock-solid. Dommage qu'on n'ait pas pu le faire monter en charge comme prévu...

ESXi (2012)

Après l'expérience vSphere, positive techniquement mais avortée suite à l'échec de DreamCave, j'ai pris un mini serveur dédié sous ESXi 5, pour y migrer toutes les VM patiemment construites avec Ulysse sous vSphere. C'était du "au cas où", avec pour objectif de ne pas perdre de données, et parce que les VM vSphere ne pouvaient pas être migrées vers Proxmox (c'est très regrettable d'ailleurs).

Depuis ce jour, j'ai donc un petit serveur (faibles perfs mais gros disques), hébergeant les quelques reliques encore utiles de l'épopée DreamCave (comme le forum de l'équipe), les backups des VM "éteintes", et quelques nouvelles VM non liées à DreamCave (par exemple pour Bioptimize), pour répartir la charge avec mon serveur principal sous Proxmox. Cela m'a permis de faire quelques tests comparatifs et de constater qu'en perfs CPU brutes, ESXi est meilleur que Proxmox ; il consomme par contre bien plus de RAM (logique, pas d'OpenVZ), et l'allocation d'espace disque est beaucoup plus enquiquinante.

Xen (2015)

Un client de Dcouv m'a demandé d'administrer ses serveurs sous XenServer 6. C'est une sorte d'hybride entre Proxmox (pour la relative gratuité) et ESXi (pour le type de virtualisation, le client lourd...). Le mélange aurait pu prendre, mais technologiquement Xen a un gros train de retard et question stabilité c'est pas la panacée.

Le client est passé sous Proxmox au bout de quelques mois... ;-)

Apache (1998)

Puisque la Fac m'avait donné envie d'apprendre le HTML et que, parallèlement, un bon gars prénommé Octave m'enseignait les bases du Perl, il me fallait un serveur web pour tester en local mes expérimentations (mon modem 28k n'était jamais connecté longtemps, sauf pour jouer à Starcraft).

N'ayant pas encore de Windows Server (je crois que j'en ignorais même l'existence), mon choix s'était donc porté sur EasyPHP, un des premiers kits WAMP. Comme d'autres outils de cette époque, il a survécu de longues années, mais ses premières versions étaient assez instables. Ou alors c'est moi qui étais totalement noob.

Anyway, ce fut mon premier contact avec Apache. Je ne te cache pas m'être arraché les cheveux (haaa mais tout s'explique ! ^^) sur les fichiers de config, et l'avoir délaissé un moment quand j'ai découvert IIS...

IIS (1999)

On peut dire que c'est véritablement avec IIS que je me suis mis au développement web. Mes expérimentations en HTML et Perl m'avaient certes permis de lancer mon site perso, mais techniquement, c'était bidon. Il faut bien commencer quelque part.

Là, au moins, c'était plus ou moins "professionnel" : j'utilisais une machine fournie par Supinfo, sous NT4, exposée au Web sur le port 80. Tellement exposée que je me suis chopé CodeRed, un des rares virus à avoir pénétré mon bunker informatique. ^^

Apache2 (2002)

Retour à l'open source après quelques années sous IIS. Haaa, mais ça n'a plus rien à voir ! J'avais été un peu rebuté par l'austérité et surtout l'instabilité d'Apache 1 : cette fois la donne a changé, et le fait d'utiliser un OS Linux (Red Hat) en cours à Supinfo n'y est sans doute pas étranger ; c'est d'ailleurs le seul point positif que j'ai tiré de ces (trop rares) cours de Linux.

Je découvre avec joie la simplicité des "virtual hosts", m'émerveille devant les options bien documentées dans les fichiers conf... Résultat : en quelques semaines, tous les sites que j'héberge (et il y en a un paquet) déménagent. Oh, je reste sous Windows 2000, hein, je n'ai pas encore de serveur sous Linux, mais l'expérience sous Red Hat m'a permis de bien mieux maîtriser Apache. Adieu IIS, tout est fini entre nous...

Postfix (2007)

Hmm. Si tu as cliqué sur "Postfix" pour te retrouver sur ce cadre, l'ami(e), soit tu es suffisamment geek pour savoir à quel point la configuration d'un serveur mail est pénible, soit tu l'es tellement peu que tu as cru que j'allais ici parler de la douloureuse retombée sur terre après un bon trip sous acides. Dans les dix (oui) cas, je doute de l'intérêt de te raconter mes misères lorsque j'ai abandonné mon SMTP/IMAP sous Windows et découvert avec effroi les méandres de Postfix (et Dovecot).

Bref, désolé, y'a rien à ajouter ici.

Hein ? "Feignasse" ? Pff. Bon, ok, t'en veux pour ton argent, enfin ton clic, c'est ça ? Alors tiens, v'là quelques extraits du dernier exemplaire de la revue SM-geek de référence ("Fesse-moi avec un shell") : "DomainKeys, l'outil de domination à la mode" ; "témoignage : j'ai fauté avec un(e) hash" ; "exim, ça m'excite" ; "focus nature : le spool de dovecotcot" ; "focus voyages : Tombouctou et sa blacklist" ; "conseils pratiques : ma mailqueue ne cesse de grandir, est-ce que ça va finir par planter ?" ; "frappe plus fort, ça doit faire ssssPAM !" ; "auth-moi d'un doute, chérie : tu n'es pas plain ?"...

Satisfait(e) ?

Nginx (2008)

De nos jours, il faut vraiment brasser des millions de visiteurs par jour pour saturer un serveur web ; les goulots d'étranglement sont généralement la base de données et la lourdeur des scripts, pas le serveur http en lui-même. Eh oui, à 40€/mois, tu peux louer un monstre capable d'héberger un très gros site.

Parfois, le simple nombre de connexions devient bloquant ; je t'avoue franchement qu'aucun des sites que j'héberge n'est dans ce cas, il faut vraiment des dizaines de milliers de connexions simultanées... Mais le problème était bien plus flagrant il y a 5 ans, et c'est ce qui m'a amené à utiliser nginx.

Contrairement à Apache, nginx est un serveur asynchrone ; il n'a pas besoin de créer un thread par connexion, ce qui le rend largement moins gourmand en RAM. Apache convient bien aux sites dynamiques, mais pour fournir du html statique ou, a fortiori, des images, nginx offre un gain de performances remarquable.

Un jour peut-être, la Fondation Apache reprendra cette fameuse idée et permettra de configurer des vhosts asynchrones...

Tomcat (2009)

Je ne suis pas foncièrement allergique à Java, je n'ai juste jamais eu l'occasion d'y voir une solution aux problèmes que je devais résoudre : il y avait toujours une technologie plus appropriée.

Cela ne m'a pas empêché de mettre le nez dedans à plusieurs reprises, mais ce fut parce que j'hébergeais (sur un de mes serveurs dédiés) une application Java d'un ami ou d'un collègue. C'est ainsi que je suis devenu familier avec Tomcat.

Sur ce coup-ci, je ressemble plus à un sysadmin qu'à un dev, non ? ^^

Memcached (2010)

Memcached, c'est le rêve du sysadmin : tu empiles des serveurs comme des briques, et hop, ça te fait un pool de ressources mutualisées. En l'occurrence, des tas et des tas de RAM. Avec autant de RAM, c'est la fin des galères pas gaies !

(Oui, j'avoue, j'ai fait une page sur memcached juste pour faire cette blague. Si t'as pas compris, t'es dans de beaux draps car c'est pas fini.)

(Ok le coup du drakkar c'était bateau, j'arrête, je vais cueillir des jonques-quilles.)

(... Help.)

IPFire (2011)

Jusque-là, j'avais géré mes histoires de routage, de NAT et d'iptables à la mimine, sous Debian/Proxmox, sur l'hôte/hyperviseur. C'est d'ailleurs ce que je continue à faire quand je suis sous Proxmox, car rien ne remplace la joie pure et simple du bricolage en ssh avec nano (oui non je ne suis pas assez geek pour aimer vi, aha ça t'étonne hein ?).

Oui mais voilà, quand tu changes d'hyperviseur pour passer, disons, sous ESXi, tu ne peux plus bidouiller l'hôte comme tu veux. C'est scandaleux, oui. Il faut donc monter une VM qui te servira de point d'entrée vers toutes les autres. Une VM dédiée au routage.

J'ai donc suivi les conseils de pépé Ulysse, grand-maître sysadmin (qui est probablement le seul à lire et comprendre tout mon charabia sur cette double "ligne" turquoise), et utilisé IPFire. C'est chouette parce qu'il fait tout, et bien, même les VPN. Je regrette de ne pas l'avoir installé sur ma passerelle à la maison, mais bon, j'avais déjà bidouillé Debian, je n'allais quand même pas tout recommencer.

N'oublie pas : un bon sysadmin est un partisan du moindre effort ! (Sauf pour lever le coude évidemment.)

Varnish (2012)

Dans la lignée des aventures de pépé Ulysse et papa Matthieu, et après IPFire, abordons Varnish. En fait, je connaissais Varnish depuis un bail, notamment grâce à eRepublik et aux "guru meditations" de la V2 (haa, douce époque). J'ai cependant attendu 2012 pour m'en servir.

Dans quel contexte ? Pour faire un reverse proxy, bien sûr. Sous Proxmox, je n'ai pas eu besoin de Varnish : Apache m'a suffi, il est moins configurable (dans ce mode) mais je n'avais pas besoin de plus. Sous ESXi, Ulysse et moi avons utilisé Varnish, et toutes les connexions http de DreamCave (site, forum, blog, outils internes, Dreamaz...) passaient par lui.

Varnish ou pas, un reverse proxy, c'est le bien (aussi bien pour la sécurité que pour les perfs), mangez-en...

OpenVPN (2013)

Un VPN entre mon serveur dédié et le "filer" de mon réseau domestique, c'est bien pratique pour faire transiter les backups quotidiens.

Alors quand c'est gratuit et simple à installer, eh bien je dis "merci OpenVPN" ! Et merci Orange pour la fibre optique, aussi. :D

pfSense (2014)

J'ai trouvé encore mieux qu'IPFire : pfSense est une véritable mine d'or. Et question stabilité, je ne l'ai jamais pris en défaut. Je l'installe généralement sur une VM avec une IP publique dédiée ; chez Bioptimize c'était sous ESXi, et pour d'autres clients je l'ai mis en KVM sous Proxmox.

Il propose même un module Varnish pour simplifier l'infra (si une VM reverse proxy dédiée n'est pas nécessaire), c'est top pour gagner du temps.

Études, diplômes et emplois

Cela fait plus de dix ans que j'ai officiellement "fini mes études", mais c'est un détail. J'ai écrit ailleurs (parmi mes nombreux bavardages) que j'avais viscéralement besoin d'apprendre, de remplir ma tête d'idées et de savoirs, et je n'ai pas cessé de le faire après l'obtention de mon diplôme.

Bon, je n'ai pas toujours rempli cette tête de choses utiles, j'avoue. Mais j'essaie ; et depuis quelques mois, j'ai décidé de m'inscrire à des MOOC pour que cet apprentissage soit un peu plus structuré que de simples heures passées à "boire" Wikipedia.

Hum, ok... Je n'ai pas exactement "décidé"... J'ai cliqué compulsivement sur tous les cours que je trouvais intéressants. Puis je me suis désinscrit en couinant de 50% d'entre eux, pour ne pas avoir 80h par semaine de charge de travail. -_-

Anyway, je m'éclate sur les MOOC. Coursera et edX sont les deux meilleures plateformes selon moi, mais je suis aussi sur FUN, Unow, Canvas et FutureLearn. J'essaie de me concentrer en priorité sur tout ce qui touche au management, mais je m'autorise tout de même quelques extras (... beaucoup d'extras, oui bon d'accord).

Voici la liste des MOOC que j'ai achevés à ce jour, avec pour chacun, un lien vers l'attestation gratuite (s'il y en a une), ainsi qu'un retour d'expérience sur mon blog. Bonne lecture.

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Brevet (1995)

Mais que veux-tu que je te dise sur mon brevet ? Tu plaisantes, j'espère ?

Diplôme en mousse, symbole du nivellement par le bas et des limites de la formation générale, généraliste, généralisante. Diplôme que tu as à l'avance si ta moyenne en contrôle continu est acceptable. Diplôme où tu peux avoir la moyenne en français sans savoir rédiger une seule phrase correctement...

Bon, je ne vais pas m'énerver, c'est mauvais pour mon cœur [mode vieux con OFF]. Le truc, c'est que j'ai assez peu de souvenirs de mon brevet. Je l'ai passé juste après une grosse opération, plusieurs mois à l'hosto ou à la maison en convalescence... Le brevet blanc, c'était chez moi, d'ailleurs, et j'étais plus blanc que le brevet lui-même.

Mais ça reste un bon souvenir dans l'ensemble. Surtout l'histoire-géo, c'est ce que je préférais ; pour moi, c'était un loisir, pas du travail. Les révisions au CDI du collège, dans une petite salle, avec une télé allumée sur Roland Garros. Mais je bossais quand même, hein, enfin j'accompagnais une amie dans ses révisions. ^^

Et puis l'examen en lui-même était marrant. Bénéficiant du tiers-temps supplémentaire, j'étais dans une salle à part ; étant le seul élève dans ce cas, j'étais donc seul candidat avec deux profs pour me surveiller. Vu qu'il n'y avait rien à surveiller (je ne risquais pas de copier sur un voisin, lol), les pauvres profs se faisaient chier comme des rats morts, pardon pour la vulgarité. Au final je papotais avec eux en écrivant mes réponses, histoire de détendre l'atmosphère.

Je ne peux donc pas dire que le brevet ait été un exercice particulièrement instructif, un entraînement pour des échéances ultérieurs, ça non... Mais je me suis bien amusé. :D

Fac de Sciences (1998)

Aaaah, la Fac...

Je n'ai passé qu'un an là-bas. Une année où je me suis à la fois tourné les pouces, bousillé la santé, et amusé comme un petit fou. C'était une sorte d'épilogue à la période dorée du lycée (enfin, des années de 1ère et de Terminale), avant la traversée du désert.

Je ne sais pas trop comment la résumer ; dans ma tête, c'est une succession d'anecdotes, de souvenirs qu'il faut avoir vécus pour partager et apprécier. Ce qui met en valeur l'élément essentiel de cette année : Hélène. Sa présence tout au long de cette année bizarre lui a donné du sens, une justification, et grâce à elle, je ne regrette rien.

Elle saurait sans doute mieux que moi raconter les manies de nos profs, tous plus azimutés les uns que les autres, du facho-militaire au chimiste en veste grise (pardon : noire + 40 couches de craie), de l'illuminé drogué aux coups de jus de condensateurs au coquin nous invitant dans des boîtes glauques, du taciturne capable d'écrire son cours au tableau pendant 3h sans dire un mot à la prof d'info qui demande à ses élèves de corriger ses exos...

Elle se souvient sans doute de nos parties de tarot en plein cours, des fous rires, des cours séchés quand il faisait beau pour bronzer dans l'herbe, des mots croisés du Femme Actuelle des préparatrices du bâtiment 17, des amphis à 6°C en arrivant le matin, des heures passées à attendre le transport en commun adapté pour repartir, des alarmes incendie où tout le monde était d'accord pour que je crâme, des pains au chocolat à 10h du mat', des pâtes roses, de la saumonette et des roses des sables...

Non vraiment, excuse-moi, l'ami(e), je ne sais pas comment parler de cette année autrement qu'avec Hélène. Ou éventuellement avec Sylvain, Rodrigue, François, nos compagnons d'infortune, radeaux chahutés sur la mer houleuse des études universitaires, en quête d'un horizon professionnel malgré les tempêtes. Avons-nous tous trouvé un rivage accueillant ? Je n'en suis pas certain ; à supposer que ce soit le cas, je doute que la qualité des cours et de l'accompagnement de notre Faculté de Sciences y soit pour grand chose.

Mais l'expérience humaine de cette aventure est inestimable, et ça, ça vaut tous les cours magistraux du monde.

Bac S (1998)

Mais que veux-tu que je te dise sur mon bac ? Tu... Ah zut, j'ai déjà dit ça pour le brevet. Oui mais y'a un problème, là, tu vois, parce que c'est sensiblement la même chose pour le bac !

Bon, je ne vais pas faire de l'auto-plagiat (même si c'est très tendance parmi les "romanciers" français modernes). T'es venu ici te détendre, apprendre des trucs, ou au moins avoir mon avis sur tout et (surtout) n'importe quoi, donc le minimum syndical de respect que je puisse te témoigner m'enjoint de varier mes propos et de proscrire toute répétition.

Hum, au cas où, si tu en trouves une, sois sympa, mets ça sur le compte de mon grand âge, d'ac ? Merci c'est cool de ta part. Non, non, j'insiste, c'est cool, j'apprécie.

Le bac, disais-je. Le Saint-Graal du parent anxieux, et de l'ado gâté désirant obtenir la dernière folie coûteuse qu'il lui manque encore (permis, console, permission de sortie tardive ou même voiture à 30 briques, oui oui ça arrive). Le super diplôme dont on te dit qu'il t'ouvre un millier de portes sur une vie professionnelle passionnante et lucrative, et dont on ne te dit pas qu'il ne suffit à aucune offre d'emploi, ne témoigne du niveau requis par aucune étude supérieure, bref, ne sert à rien.

En étant très optimiste, on pourrait dire que les mentions servent, elles, à quelque chose, au moins dans certaines filières. Oui mais non. On a tellement ouvert les vannes qu'on se retrouve avec des classes avec 30% de TB et 50% de B. Et pas dans des lycées de surdoués, hein. Il suffit de bien assurer en TP (avoir un bon binôme, charmer le prof, faire au moins semblant de faire de son mieux), de faire deux ou trois options (qui rapportent beaucoup de points de nos jours, ce qui en soi est une bonne chose), et zou, roule ma poule.

Dit comme ça, tu risques de croire que je fais mon malin et que je dévalorise ceux qui triment (vraiment) pour avoir le bac, ainsi que ceux qui ne l'ont pas. Ce n'est pas du tout ce que je veux dire : je trouve ça idiot de faire trimer des jeunes qui ont du mal à atteindre les fameux 10 de moyenne, alors que ce diplôme ne leur servira pas. Il leur sert à entrer à la fac, en école sup' ? Bizarre. S'ils galèrent tant au lycée, il est probable que 2 voire 5 ans de plus les achèvent et découragent pour de bon. Si leur problème, c'est la "polyvalence" (genre "j'ai 18 en sciences mais pour le reste c'est l'horreur, je n'y arrive pas"), je ne pense vraiment pas que persécuter des gamins en les contraignant à des études générales quand ils ne sont manifestement pas faits pour ça soit une bonne idée.

Je n'ai rien contre l'existence d'une filière générale ; ce serait paradoxal vu que c'est un peu mon atout personnel... Ce qui m'énerve, c'est que l'on continue d'envoyer des jeunes au casse-pipe sous prétexte que le bac général offre plus de débouchés, a meilleure réputation, a meilleure haleine ou je ne sais quoi encore. C'est stupide. Les mentalités évoluent, mais pas assez vite.

Ceci étant dit, je garde un très bon souvenir du bac. C'était le point d'orgue de mes deux meilleures années. Une super classe, remplie de gens bien, de bons profs, et une époque où ma santé me fichait à peu près la paix. "C'était l'bon temps", comme dirait l'autre...

Et l'exam' en lui-même, ma foi, c'était sympa. Il faisait chaud, j'avais révisé en jouant au tarot (pour les probas) et en lisant Fluide Glacial (pour la culture et la philo, je suppose), tout le monde autour de moi stressait mais j'étais cool, insouciant, un vrai gamin.

J'ai beaucoup changé, tu trouves ?...

ESI Supinfo (1999)

Est-ce une chance de gagner au Loto ? Est-ce un heureux coup de bol si tu attires les vautours, perds tes amis, flambes pendant cinq ans puis te retrouves sur la paille avec toute ta vie en miettes ?

Philosophie de comptoir, me diras-tu, et c'est sans doute vrai. Il n'y a pas de "chance", rien que des opportunités et des choix. Des choix qui, avec le recul, paraissent si souvent mauvais...

C'est cet état d'esprit qui m'anime quand je pense à mes quatre années passées comme étudiant à Supinfo. Toutes proportions gardées bien sûr, j'ai eu énormément de chance. Je suis tombé sur des gens passionnés, ouverts d'esprit, désireux d'innover en accueillant pour la première fois un élève à distance, par visioconférence. Ce qui paraît "cool" mais "normal" aujourd'hui était un audacieux pari à une époque où l'ADSL n'existait même pas. Ces gens, Alik, Marianne, mais aussi Sébastien et Alexandre, ont misé sur moi pour le développement de leur école, et (je crois) bien leur en a pris, puisqu'ils ont pu s'appuyer sur cette expérience pour bâtir un programme d'e-learning et d'école décentralisée qui a beaucoup de succès.

Et moi dans tout ça ? Eh bien, malgré deux premières années extrêmement pénibles où j'ai dû réussir à suivre 5% des cours en direct, j'ai pu boucler le cursus prévu, passer mes certifications, obtenir le diplôme d'ingénieur (major de promo en prime ^^), et trouver par la suite divers emplois en informatique, ce qui était loin, loin d'être évident pour quelqu'un combinant handicap et télétravail. Donc, bah... C'est plutôt pas mal, vu sous cet angle.

L'envers du décor est moins rose. Si les grosses difficultés techniques ou organisationnelles ne sont pas, à mes yeux, à reprocher exclusivement à Supinfo, le fait est qu'étudier à distance m'a brutalement isolé - et vu que j'avais 95% des cours par mail ou photocopies, et que c'est tombé à une époque où ma santé se cassait royalement la figure (2000), je me suis retrouvé tout seul comme un con (désolé). Zéro vie sociale, mais zéro. Deux années de suite avec pour seules sorties des rendez-vous à l'hôpital. En clair, étudier ou travailler à distance, volontiers, mais à condition d'avoir des contacts, des échanges, ce qui n'était pas le cas pendant ces premières années. Encore une fois, le principal responsable de cet isolement, c'est la technique... Enfin non, le responsable, c'est moi. J'ai fait ce choix. On m'avait répété depuis la petite enfance que l'informatique serait mon salut, et j'ai bêtement suivi un chemin tout tracé, en sautant sur l'opportunité Supinfo quand elle s'est présentée. Et objectivement, malgré cet isolement dont j'ai mis pas loin de dix ans à me remettre, l'école a bien fait son boulot : faire de moi un ingénieur informaticien, capable d'être aussi bien sysadmin, DBA, développeur ou manager.

L'erreur n'a pas été de choisir cette école et de la suivre de chez moi, elle a été de m'obstiner à faire de l'informatique alors que, dès la fin du collège, je prenais beaucoup plus de plaisir à dévorer des livres d'histoire, lire Rimbaud et Malraux ou même découvrir la géologie et l'immunologie, qu'à calculer des intégrales, des forces ou des réactions chimiques. Ce n'est pas parce qu'on est doué dans un domaine qu'on l'apprécie plus que les autres. Et oui, la science dans son ensemble me passionne, mais je la vois (et la voyais déjà) comme un outil. Exactement comme l'informatique. Programmer pour résoudre un problème ou faciliter un travail, super ; faire de l'informatique toute ma vie juste parce que c'est mon job, bof...

Moi ce qui me fait vibrer, c'est pourtant simple, c'est créer ensemble. Créer, donc inventer/innover/découvrir/explorer de nouvelles formes de liberté ; ensemble, donc pas tout seul dans mon coin (t'as vu, c'est puissant comme raisonnement hein). D'où DreamCave. D'où ma lassitude chez KP, où l'aspect créatif était inexistant.

Tu vois, ça se résume à cette page : j'ai envie de re-façonner un site perso original, qui me serve aussi bien de tribune que de CV. J'utilise mes connaissances en informatique, plus spécifiquement en développement web et en WebGL, ainsi que ma plume et mon vécu, afin de m'adresser à toi, l'ami(e), pour t'inspirer, te faire réagir ; je mixe tout ça, et hop, ça m'amuse. Je m'éclate. Enfin je m'éclaterai surtout si tu m'envoies un message pour me donner ton avis sur tout ça ; ça m'intéresse plus que le code que j'ai écrit pour que ça fonctionne. Tu comprends ?

Pour en revenir à nos moutons, j'ai le sentiment que j'aurais été plus épanoui dans un autre métier, dans lequel je me serais servi de l'informatique (un de mes hobbies de toute façon) comme outil, plutôt que d'étudier puis travailler avec des ordinateurs, dans les ordinateurs, et de tenter tant bien que mal de mettre un peu de culture ou d'art dans les engrenages. Mais si ça tombe, je me fais des idées, hein.

TOEIC (2001)

J'ai passé mon TOEIC au beau milieu de mes études à Supinfo. Verdict : 880/1000, c'est-à-dire "anglais courant", pas tout à fait bilingue. Bizarrement j'ai eu plus de points à l'oral qu'à l'écrit. Je pense qu'aujourd'hui ce serait le contraire.

En tout cas, l'examinatrice était trop mignonne.

Je ne dis pas que ça m'a déconcentré, hein, c'est juste un commentaire spontané, j'essaie de te fournir une information précise et exhaustive sur ma vie, tu vois.

Mais j'étais un peu distrait quand même, oui.

CCNA (2002)

On devrait faire passer le CCNA (Cisco Certified Networking Academy) à tous les informaticiens. Tous ! Pas seulement aux administrateurs réseaux. C'est le B.A.BA. du fonctionnement des réseaux, on s'en sert tous les jours, bon sang !

Alors oui, tu peux protester contre l'étiquette Cisco : privatisation des études supérieures, publicité déguisée... Moui. De nos jours, je veux bien croire que l'on trouve du contenu éducatif "ouvert" et de qualité ; mais à mon époque (aagagaaaah), les cours en ligne de Cisco avaient des années d'avance sur tout le monde. Ils étaient super clairs, et les TP où tu avais un routeur virtuel dans ton navigateur web, eh ben c'était de la balle.

Si j'avais deux mois devant moi et des sous dans la caisse, je pense que je reprendrais une formation de ce genre pour me perfectionner en IPv6 !

MCSE (2003)

Supinfo poussait fortement ses élèves sur la voie des logiciels Microsoft (la faiblesse des enseignements Unix fait partie des quelques reproches pédagogiques que je pourrais leur faire), et je n'ai pas manqué l'occasion de me perfectionner en administration systèmes. En deux ans, j'ai passé les sept certifications me permettant d'être labellisé MCP, MCSA, MCSE, Label Rouge et Agriculture Biologique (meuh !) : - Interconnexion de réseaux hétérogènes avec TCP/IP sous Microsoft Windows NT 4.0 - Installation, configuration et administration de Microsoft Windows 2000 Professionnel - Installation, configuration et administration de Microsoft Windows 2000 Server - Implémentation et administration d'une infrastructure pour les services d'annuaire Microsoft Windows 2000 (Active Directory) - Implémentation et administration d'une infrastructure réseau Microsoft Windows 2000 - Conception d'une infrastructure pour les services d'annuaire Microsoft Windows 2000 - Administration d'un environnement réseau sous Microsoft Windows 2000

La quatrième fut la plus ardue. Je m'étais donné comme objectif de les réussir du premier coup, et si tu n'as jamais passé ce genre de certif', crois-moi, c'est vachement de boulot. J'ai plus révisé pour la quatrième ou la sixième certif' que pour n'importe quel autre examen, bac compris.

Cela en valait-il la peine ?...

Oui : j'ai réussi.

Non : je n'ai jamais été sysadmin en environnement Microsoft.

Oui : je me suis bien amusé. :-D

Klee Performance (2004)

J'ai mis plus d'un an, après mon diplôme à Supinfo, à trouver un emploi en CDI. Il est finalement venu grâce à Alexandre, un camarade de promo, qui a parlé de moi à ses patrons tandis que ceux-ci cherchaient à recruter une personne handicapée pour payer moins de taxes. C'est ainsi que j'ai rejoint Klee Performance, société de conseil en intégration de systèmes d'informations financières.

Je sens ton regard hoqueter sur ces derniers mots tandis que ton cerveau essaie de figurer à quoi cela peut ressembler. Rassure-toi, j'ai mis quelques mois à comprendre. En résumé : les grosses multinationales doivent régulièrement concentrer la comptabilité de toutes leurs filiales en un seul endroit, c'est ce qu'on appelle la consolidation. Ces données étant gigantesques et hétérogènes (chaque pays ayant sa devise, son plan comptable, ses taxes...), la consolidation mobilise des équipes conséquentes (quelques centaines de personnes pour une banque), et nécessite un logiciel à la fois très complexe (puisque capable de gérer plein de données différentes) et puissant (car destiné à fournir des rapports à des centaines d'utilisateurs). De tels logiciels coûtent extrêmement cher, et le marché est partagé entre quelques acteurs comme Hyperion, Cartesis, Cognos ou Business Objects (je parle de ce que j'ai connu, j'imagine que certains noms ont changé depuis).

La difficulté majeure, pour les utilisateurs de ces logiciels, est de bien configurer la bête pour répondre aux besoins fonctionnels : KP comptait donc une majorité d'experts en compta et contrôle de gestion, capables de comprendre les attentes du client pour paramétrer l'outil convenablement. Mais il fallait aussi, parfois, installer ces logiciels dans des environnements plus ou moins exotiques (vieux OS, Citrix, VPN...), et surtout, développer des outils annexes répondant à des besoins non couverts par ces monstres.

En bref, il fallait des informaticiens. Nous étions entre un et trois selon les périodes, c'est très peu... Le plus gros de mon travail se faisait sous Excel et Access : je développais des macros VBA pour traiter de façon spécifique des liasses fiscales mal remplies ou formatées par les filiales.

Autant dire que techniquement, je me suis souvent ennuyé. Je galérais parfois, faute de connaissances métier, mais le plus clair du temps j'étais en pilotage automatique. Ce job est vite devenu alimentaire, et mon statut d'unique salarié en télétravail ne facilitait pas mon intégration ; celle-ci n'était pourtant pas mauvaise, j'avais quelques collègues vraiment sympathiques et intéressants... Mais ce n'était pas mon monde. J'ai fini par profiter d'une restructuration pour lancer DreamCave avec les économies rassemblées pendant ces 5 ans.

DreamCave (2009)

Pas évident de parler de DreamCave, même avec le recul. C'était l'aboutissement d'un projet à très longue haleine, et à plusieurs facettes.

DreamCave, c'était une entreprise qui développait un jeu par navigateur, dans la lignée des Ogame et eRepublik ; ce jeu, Dreamaz, allait pourtant beaucoup plus loin que tout ce qui existait alors : l'univers du jeu évoluait en temps réel, les personnages vieillissaient et mouraient, le climat variait, les écosystèmes évoluaient. Tout ceci se passait de façon cohérente, et non selon des règles simplifiées ou des formules aléatoires. Nous travaillions avec des universitaires en astronomie, géographie, histoire médiévale, économie et mathématiques.

Mais DreamCave était aussi innovante en tant qu'entreprise. C'était une des pionnières du 100% télétravail en France. C'était aussi une combinaison de salariés et d'associés (non salariés mais recevant des parts de capital au pro-rata de leur travail) inédite dans notre pays, et qui a fait hausser pas mal de sourcils.

L'aventure a pris fin à l'automne 2012, alors que nous approchions enfin d'une sortie en beta-test et donc d'un début de commercialisation. De mauvais choix, des désaccords, un projet trop ambitieux... Les causes de cet échec sont nombreuses et varient selon le point de vue, mais le principal écueil fut le manque de fonds : nous avions franchi toutes les premières étapes, convaincu les pouvoirs publics, remporté des concours, obtenu des prêts et des subventions, mais au moment où nous devions lever des fonds auprès d'investisseurs, nous avons fait chou blanc. Et comme de nombreux studios de développement (souvent bien plus gros) à la même période, nous avons dû déposer le bilan.

Les cicatrices sont encore fraîches, je ne m'étendrai donc pas sur le positif et le négatif à tirer de cette période très intense. Je pense avoir beaucoup appris de cette expérience, et c'est déjà une bonne chose. Rendez-vous dans quelques années pour plus de détails...

BIOptimize (2013)

Travailler à nouveau dans une start-up n'était pas vraiment dans mes intentions, mais la vie s'amuse souvent à contrarier nos plans, n'est-ce pas ? J'ai donc passé l'année 2013 à travailler pour Bioptimize, société de data mining spécialisée dans les sciences de la vie ; j'y ai développé Biopticloud, une plateforme web de data mining. C'est un outil unique au monde, à la pointe du progrès aussi bien technologiquement (HTML5, WebGL...) que scientifiquement.

Mon engagement de confidentialité m'interdit d'en dire davantage, j'ajouterai donc simplement que c'est une expérience qui m'a permis d'affûter mes compétences pluri-disciplinaires, ce qui est toujours une très bonne chose.

Dcouv (2014)

Après la fin de DreamCave, j'ai passé deux ans comme auto-entrepreneur à vendre mes services à droite à gauche. Et puis l'activité s'est intensifiée, les projets se sont diversifiés (Bioptimize, PlaniDoc...), et il est devenu pertinent de repasser en société.

Pas de plans pharaoniques cette fois, pas d'associés non plus, j'avance pépère. Et j'essaie de concilier nécessités alimentaires et coups de cœur. :-)